L'ancien président de la Fédération Français de Rugby s'est éteint hier soir à Agen. Il avait 94 ans.
Agen : Albert Ferrasse est mort
Il a été à la tête du rugby français pendant 23 ans. Le lot et garonnais Albert Ferras est décédé hier soir à Agen. Un homme de caractère, qui voyait d'un mauvais oeil la professionalisation des joueurs. Retour sur un parcours de près de 50 ans dans le monde du rugby.
Vingt ans à la tête du SU Agen, 7 fois réélu président de la Fédération Française de Rugby, Albert Ferrasse, personnage généreux et exubérant régna d'une main de fer sur le monde du rugby. Ses obsèques auront lieu mardi à 15h30 en la cathédrale St Caprais d'Agen.
Né en août 1917 à Tonneins dans le Lot-et-Garonne, Albert Ferrasse a d'abord essayé, avec succès, le tennis de table. Mais, c'est en rugby qu'il fera carrière. Licencié à Marmande, puis à Agen en 1941, il ne quitte plus le SUA. Il occupe d'abord le poste d'ailier puis glisse en deuxième ligne, où il s'illustre grâce à ses qualités de sauteur.
Champion de France et vainqueur de la Coupe de France en 1945, celui que l'on
surnomme alors "Bébert" raccroche les crampons en 1951 à la suite d'une blessure
au genou. Mais il ne quitte pas l'ovalie pour autant. Il reste sur les terrains en comme d'arbitre. Il officie lors de la finale Racing/Mont-de-Marsan en 1959.
Généreux, il se lance dans la carrière de dirigeant. Il devient président d'Agen en 1963, puis du Comité Périgord-Agenais en 1966. Il s'affirme sur le plan national et gravit les échelons. Il est élu président de la Fédération française de rugby en 1968.Il le reste 23 ans. Avec son ancien partenaire à Agen, Guy Basquet, il forme une doublette redoutable à la tête de la FFR.
"Il a su, par son tempérament et son caractère affirmé, tenir tête notamment aux Anglais et aux gens de l'hémisphère Sud qui régnaient alors en maîtres sur le rugby mondial, a indiqué le manageur du XV de France Jo Maso. Il a imposé la griffe française par sa capacité à échanger mais aussi à passer outre certaines décisions".
Conflit avec Fouroux
Durant ces sept mandats à la tête de la FFR, "Tonton" a traversé de nombreuses crises. Il a du affronter l'ancien capitaine et sélectionneur des Bleus Jacques Fouroux, considéré comme l'un de ses fils spirituels.
Très actif, il s'oppose farouchement au professionnalisme dans le rugby et défend envers et contre tous le milieu amateur.
Il est l'un des grands artisans de la création de la Coupe du monde de rugby, dont la première édition a eu lieu en Nouvelle-Zélande en 1987. C'est aussi l'un des membres fondateurs des Barbarians français en 1979.
Un personnage diversement apprécié
Généreux, exubérant mais aussi intransigeant, il n'était pas rare de le croiser dans son bar "le Fair Play" autour d'une de ses fameuses parties de belote, "pendant lesquelles un joueur pouvait connaître le bonheur suprême de connaître la sélection en équipe de France, ou bien se faire couper la tête pour trois ou quatre matches", se souvient aussi Maso.
Certains le comparent à un "tyran débonnaire", d'autres le définissent comme "affable, bon vivant et disponible".
Il donne son nom en 1990 à une fondation chargée de venir en aide aux handicapés du rugby.
Toujours proche de "son" SUA, il réchappe à la noyade en décembre 2004 après
la chute de son véhicule dans un canal. Trois personnes réussissent à le sortir de son véhicule en plongeant dans l'eau.
Fatigué et diminué, ses sorties publiques étaient moins nombreuses ces dernières années.
Camou: "Un pan de l'histoire qui s'en va"
Pour Pierre Camou, l'actuel président de la FFR, "c'est un pan de l'histoire de la FFR qui s'en va. Même si c'est la vie, même s'il y a l'âge, même si on s'y attendait car on savait qu'il n'était pas bien ces derniers temps et que l'issue serait fatale, c'est un coup de massue." Et M. Camou ne tarit pas d'éloges sur M. Ferrasse. "C'est le patron du rugby français, quelqu'un qui lui a donné plus qu'une image. Il a montré la voie à des moments charnière de l'histoire." Il note également le clin d'oeil de l'histoire. "Que (son décès intervienne) cette année, alors que l'équipe de France prépare sa Coupe du monde en Nouvelle-Zélande, alors que c'est Albert Ferrasse qui a fait la première Coupe du monde de l'histoire en 1987 en Nouvelle-Zélande, vous comprendrez que cela rajoute encore à la tristesse", indique-t-il. "C'est à Albert que l'on doit que la France ait été écoutée. (...) Ca me rappelle les débuts de mon implication dans le rugby fédéral. Mes débuts qui étaient contre Albert Ferrasse parce qu'on ne se connaissait pas, qu'on avait le même tempérament. C'est à partir de là que s'est nouée une amitié comme elles existent dans le rugby."