La justice a rejeté jeudi 29 avril à Bordeaux la demande de l'auteur des meurtres de deux soignantes à Pau en 2004 d'être transféré d'une Unité pour malades difficiles (UMD) vers un hôpital psychiatrique classique.
Fin 2007, Romain Dupuy, souffrant de schizophrénie, avait été reconnu pénalement non responsable de ses actes et n'avait pas été jugé pour les meurtres à l'arme blanche au centre hospitalier psychiatrique de Pau, d'une aide-soignante et d'une infirmière qu'il avait décapitée.
Lors d'une audience mardi 27 avril 2021, les nouveaux avocats de Romain Dupuy, Mes Hélène Lecat et Serge Portelli, avaient plaidé devant un juge des libertés et de la détention pour que leur client puisse quitter l'UMD de Cadillac (Gironde), où il est en hospitalisation complète sans consentement depuis 2005, pour un service de psychiatrie classique, où il resterait en hospitalisation complète mais où "il pourrait évoluer positivement".
Une juge a répondu jeudi 29 avril qu'elle n'était pas compétente pour "décider des conditions mêmes de l'hospitalisation (octroi de visites autorisées, organisation de visites...) du patient ni de choisir l'unité de soins dans laquelle il doit être affecté", selon son ordonnance consultée par l'AFP.
Elle a également écarté la demande subsidiaire des avocats de désigner deux nouveaux experts psychiatres n'ayant jamais examiné Romain Dupuy.
Un contexte qui pèse
La préfecture de Gironde et de l'Agence régionale de santé avaient souhaité à l'audience le maintien de l'intéressé en UMD, comme elles le font depuis plusieurs années. Selon la préfecture, il existe un risque qu'il puisse s'échapper de son nouveau lieu d'accueil, moins surveillé qu'une UMD, et qu'il y ait plus facilement accès à des produits stupéfiants qui pourraient le déstabiliser.
Les deux avocats ne sont "pas surpris".
Au regard du contexte actuel (ndlr: l'annonce récente de l'irresponsabilité pénale du meurtrier de Sarah Halimi tuée en 2017 à Paris), il semble que le juge ait manqué de courage alors qu'il a toute latitude pour prononcer ce transfert.
"En outre, il y a un problème: en 2018, le juge administratif avait dit qu'il n'était pas non plus compétent", ont-ils fait valoir. "Nous sommes devant un conflit négatif (ndlr: quand deux ordres se sont déclarés incompétents pour juger d'un litige)".
Dans l'immédiat, les deux conseils de Romain Dupuy envisagent de faire appel de l'ordonnance devant la cour d'appel de Bordeaux ou une saisine du Tribunal des conflits pour que ce dernier détermine l'ordre compétent. A terme, le patient a également la possibilité de formuler lui-même une demande de transfert. Par ailleurs, un juge des libertés et de la détention examinera son cas de nouveau dans six mois. "Nous sommes un peu devant un déni de justice. On ne va pas en rester là", ont prévenu les deux avocats.