Le quotidien local agenais fête ses 100 ans ce jeudi 11 septembre. Alors que la presse écrite subit une crise sans précédent, ce journal local s'en sort bien, grâce à des lecteurs fidèles. 10 000 exemplaires paraissent chaque jour.
La première édition est sortie le 11 septembre 1914, sur du papier bleu. L'objectif à l'époque était de donner des nouvelles des poilus envoyés au front.
Cent plus tard, ce quotidien local est toujours là. Il est même largement en tête des ventes sur l'agglomération agenaise, malgré la concurrence de
Sud Ouest et de La Dépêche du Midi, à qui il appartient depuis 1982.
C'est une longévité exceptionnelle dans la presse française. Elle est basée sur la relation étroite tissée au fil des décennies avec les habitants.
"On est dans un contexte difficile. La presse écrite est fragile. Mais elle est solide si elle reste sur ses grands fondamentaux que sont les informations de proximité" - Sébastien Bouchereau, le directeur du Petit Bleu
Les nouvelles des poilus
Au lendemain du déclenchement de la Première Guerre mondiale, le directeur de l'Imprimerie moderne d'Agen, Paul Arjo, propose au ministère de la Guerre, alors replié à Bordeaux, de communiquer aux habitants de sa ville les informations officielles des armées.
"Il s'agissait de répondre à l'attente des Agenais qui n'avaient aucune nouvelle du front et, quelque part, de les rassurer", en donnant par exemple des informations sur la localisation des régiments, explique Sébastien Bouchereau.
Pour imprimer recto-verso son bulletin, Paul Arjo a l'idée d'utiliser le papier bleu qui servait à l'époque de support aux télégrammes: Le Petit Bleu était né.
Ce premier numéro relate la victoire des troupes françaises lors de la Bataille de la Marne, engagée le 4 septembre.
L'après-guerre
A la fin du conflit, Le Petit Bleu poursuit son développement en étoffant ses infos, jusqu'à devenir un journal généraliste à part entière.
A l'exception d'une période de neuf ans, entre 1944 et 1953, où il est rebaptisé "Le 44", en référence au numéro du département du Lot-et-Garonne de l'époque, le quotidien a toujours gardé son nom.
Un nom qui prend un relief nouveau, lorsque le quotidien est le premier en France à utiliser, en 1967, la rotative offset qui permet l'impression couleur, lui donnant sa dominante "bleu cyan" si caractéristique.
"Je crois que pour les Agenais Le Petit Bleu est personnifié, c'est comme si c'était quelqu'un. En achetant Le Petit Bleu, les Agenais font acte d'indépendance: ils n'appartiennent ni à Bordeaux, à travers de Sud Ouest, ni à Toulouse, via La Dépêche du midi" - Dino Milani, 41 ans d'ancienneté au Petit Bleu.
"Le Petit Bleu est accroché à Agen comme la Garonne. Mes parents le lisaient, ma grand-mère était abonnée. Chacun a une bonne raison de l'acheter, soit pour le sport, les faits divers ou la rubrique nécrologie. Et puis chaque Agenais est passé au moins une fois dans Le Petit Bleu" - un lecteur de 51 ans.
"On a cette proximité avec le lecteur qui ose nous arrêter. Il nous connaît physiquement. Il n'hésite pas à nous dire : j'ai lu ton article, c'est bien mais tu aurais pu davantage parler de ci ou de ça" - Corine Dallaverde, journaliste au quotidien
Une fidélité partagée par l'ex-international de rugby et ancien joueur du Sporting union agenais (SUA), Philippe Sella, pour qui Le Petit Bleu accompagne "depuis 100 ans le SUA, dans les bons comme les moins bons moments".
Pour Sébastien Bouchereau, la longévité du quotidien, qui compte de 24 à 28 pages pour 0,85 euro, s'explique aussi par l'évolution des technologies de l'information.
"Plus il y a d'informations uniformisées en continu, plus les gens ont besoin de savoir ce qu'il se passe en bas de chez eux".
Les 100 ans, une fête dans toute la ville
Preuve de l'attachement des Agenais à leur journal, les initiatives pour célébrer ce centenaire sont multiples : gâteau spécial Petit Bleu créé par un boulanger, cuvée "centenaire" chez un caviste, courses pédestres, match de rugby du SUA aux couleurs du journal, etc...
Parallèlement, un numéro spécial de 44 pages dédié à cet anniversaire est publié ce jeudi par la rédaction, avec des témoignages de lecteurs, d'anciens journalistes et de personnalités comme le chanteur Francis Cabrel, résidant près d'Agen, le philosophe Michel Serres, la cantatrice Béatrice Uria-Monzon, natifs de la ville.
Et puis un livre réunit également les plus belles Unes du quotidien.
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AFP le 11/09/2014 06:32:24);