La hausse des prix de l'énergie et la menace de coupure de gaz cet hiver fait réfléchir de nombreux producteurs cultivant des fruits et légumes sous serre. En Lot-et-Garonne certains envisagent de ne pas semer. Ce mercredi, la Coordination rurale organise une manifestation à Agen pour faire pression sur les pouvoirs publics.
"C'est la première fois qu'on ne produira pas en hiver". Gilles Marcadet semble dépassé par les évènements.
Prix de l'énergie prohibitifs
Ce producteur de fraises et de tomates à Birac-sur-Trec dans le marmandais doit chauffer ses 10 000 mètres carrés de serres pendant les mois les plus froids chaque année.
Or son contrat avec son fournisseur de gaz se termine au 30 novembre. Et, mauvaise surprise :
"On nous a proposé de passer de 40 euros le kilowatt à 220, 250. Multiplié par six !"
Gilles Marcadet - producteur du Lot-et-Garonnesource : France 3 Aquitaine
Avec des valeurs aussi importantes "on ne peut pas planter" affirme l'agriculteur.
"Les semis de tomates, il faut les chauffer au minimum à 16 degrés la nuit et 17, 18 degrés le jour. Si le prix du gaz doit autant augmenter, on préfère ne pas planter".
Menaces de coupures de gaz
Autre incertitude, les coupures possibles annoncées par le gouvernement le 16 septembre dernier.
"Un dispositif de contrôle et de répartition du gaz naturel" est prévu en cas de rupture d'approvisionnement et d'hiver rigoureux prévient la circulaire.
Le conseil des ministres pourra ainsi, par décret, "limiter la consommation de gaz " à l'exclusion des consommations domestiques et des établissements d'intérêt général.
Les plus grands consommateurs, d’au moins 5 GWh/an, représentant plus de 80% de la consommation industrielle, sont concernés.
Parmi eux, certains agriculteurs produisant sous serre en hiver comme Gilles Marcadet.
Il suffit qu'ils nous coupent l'approvisionnement pendant une nuit, s'il fait moins dix dehors, ça y est, la culture est morte.
Gilles Marcadet - producteur du Lot-et-Garonnesource : France 3 Aquitaine
"Et là, on n'a pas de solution de remplacement. Pour l'électricité on a un groupe électrogène donc on peut faire avec, mais le gaz non. Et on a besoin de la chaleur".
Le producteur de Birac-sur-Trac s'interroge maintenant sur l'avenir. "Peut-être qu'il faudra arrêter les fruits et légumes sous abri. Parce qu'il n'y a pas que le problème de l'énergie, il y a le coût des engrais, de la main-d'oeuvre, toutes les charges vont monter et s'empiler".
La solution, pour lui, serait d'attendre le mois de mars pour ses semis de tomates. Mais il devra alors revoir toute la gestion de son exploitation.
"Les salariés le savent, les permanents comme nos saisonniers habituels. Au 20, 25 novembre on ne plantera pas de tomates. C'est des heures qu'ils ne feront pas".
Une "situation inadmissible"
Pascal Béteille, le président de la Coordination Rurale en Lot-et-Garonne ne décolère pas face à une situation qu'il juge inadmissible.
"Certains ont déjà semé avec beaucoup d'argent engagé" affirme le syndicaliste, "en janvier si on coupe, en deux jours, les tomates sont gelées, c'est fini".
Les agriculteurs vont décaler leur production de deux ou trois mois, c'est autant de mois de perdus
Pascal Béteille - Pt de la coordination rurale 47source : France 3 Aquitaine
Ils dénonce une "décision arbitraire du gouvernement et lourde de conséquences".
La coordination rurale organise une manifestation ce mercredi 19 octobre devant la préfecture d'Agen espérant faire pression sur les pouvoirs publics.
"Je vais expliquer tout ça au Préfet pour qu'il fasse remonter au ministère. Nous avons onze serristes concernés en Lot-et-Garonne par les menaces de coupure de gaz" précise Pascal Béteille.
Il demande une levée des taxes sur l'énergie pour les agriculteurs, "qui représentent parfois 50% des factures" souligne t-il. "Il faut que l'Etat nous aide pour que l'on puisse continuer à produire. On fournit l'alimentation, c'est essentiel".
La manifestation est prévue dans la matinée.
Voir le reportage de Léa Wolber et José Souza :