Une veuve de 75 ans a envoyé des dizaines de milliers d'euros à un correspondant étranger qu'elle n'a jamais rencontré. Mais qui a réussi à gagner sa confiance. Elle a emprunté 100 000 euros pour l'aider et n'a aujourd'hui plus rien pour vivre.
"Elle pensait avoir trouvé l'âme sœur via internet. Elle entretenait une relation à distance avec cet individu en envoyant et en recevant des e-mails. Au fil du temps, la personne a commencé à lui demander de l'argent prétextant qu'elle en avait besoin" nous rapporte Frédéric Bonte, le commandant de la compagnie de gendarmerie de Marmande, chargée d'enquêter sur cette affaire d'escroquerie.
Elle avait des sentiments pour lui et elle a accepté de lui envoyer de l'argent.
Ce sont plusieurs dizaines de milliers d'euros que la septuagénaire, veuve de gendarme installée à Tonneins, accepte de donner à son amant virtuel. Un homme qu'elle n'a jamais rencontré.
Cet argent, elle ne l'a pas sur son compte en banque. Elle a dû emprunter. Près de 100 000 euros "auprès d'organismes de crédits peu regardants" explique Frédéric Bonte. Nombreux sont en effet les organismes financiers qui prêtent en quelques clics sans vraiment vérifier les capacités d'endettement de leurs clients.
"Toute la pension de retraite de cette dame passe dans le remboursement de ces prêts" assure le commandant.
Elle s'est retrouvée à manger pour seul repas 2 biscottes par jour et envisageait le pire pour mettre un terme à ses souffrances.
C'est une salariée d'un bureau de tabac que fréquente la victime, elle aussi femme de gendarme, qui a donné l'alerte. Elle a raconté l'état de détresse et la situation désespérée de la retraitée "ruinée, sans ressource et rongée par le remord".
Remonter la source
Ils ont décidé de se saisir de l'affaire mais l'enquête, en cours, s'avère compliquée. "Tout est faux dans ce que donne ces gens comme information personnelle. Il n'est pas si facile de les retrouver d'autant qu'ils savent comment ne pas se faire repérer". Homme, femme, groupe de malfaiteurs ? D'origine africaine, asiatique, européenne ? Les gendarmes vont devoir explorer toutes les pistes possibles pour découvrir qui se cache derrière cette escroquerie lourde de conséquences.
Les retrouver en général, on y arrive, mais si c'est à l'étranger, ça peut être compliqué de donner suite sauf s'il s'agit d'un pays avec lequel la France a des accords.
Un cas loin d'être isolé
Ces abus de faiblesse visant des personnes âgées vulnérables sont assez fréquents. "Les malfaiteurs profitent de la faiblesse psychologique de ces personnes et arrivent à établir un lien de confiance" explique Frédéric Bonte. "Elles se retrouvent sous leur emprise".
"Le meilleur conseil qu'on peut donner c'est de ne pas aller trop vite dans les décisions, notamment quand on nous demande de l'argent" ajoute le commandant.
"Dans certains cas, comme dans celui de Tonneins, un lien de confiance a été établi donc la victime ne trouvera rien de suspicieux mais tant qu'on n'a pas rencontré la personne, on n'est jamais sûr de qui on a à faire".
Ainsi ne pas hésiter à demander conseil à des proches ou même à la gendarmerie si la personne est isolée.
Les escroqueries via internet ne sont d'ailleurs pas les seules qui fonctionnent. Les victimes peuvent aussi se faire avoir à leur domicile par de faux fonctionnaires ou des entrepreneurs véreux à l'image de ces "bitumeurs irlandais" repérés en Lot-et-Garonne.
La retraitée lot-et-garonnaise a, pour sa part, pu être prise en charge par l'assistante sociale qui intervient auprès des victimes en gendarmerie. Elle reçoit désormais des paniers repas livrés par le centre communal d'action sociale.
L'enquêteur en charge de l'affaire a également sollicité pour elle un avocat et une mesure de protection auprès du procureur de la République d'Agen.