Privés de leur clientèle, les patrons de boîte de nuit craignent que les clients ne prennent "de nouvelles habitudes"

Commet garder un lien avec sa clientèle quand on ne l'a pas vue depuis neuf mois? C'est le défi que tentent de relever les patrons de discothèques, entre réseaux sociaux et anticipation de l'après-crise.

Garder le contact avec la clientèle,un impératif. C'est le défi que veut relever Sébastien Labeyrie. "Sans eux, et sans mes employés, je ne suis rien", rappelle-t-il.  Pourtant, depuis neuf mois, le patron du Monseigneur, emblématique discothèque de Bordeaux, ne voit plus personne franchir le seuil de son établissement. Ses quatorze employés se retrouvent au chômage partiel.

C'est donc pour entretenir cette relation qu'il a décidé d'organiser un live sur les réseaux sociaux, ce jeudi soir à 19 heures. Sont annoncés : un DJ, un atelier cocktail à suivre en direct pour réaliser ses propres boissons à la maison, et des échanges avec le patron de la discothèque bordelaise.

"Ca permet de maintenir un lien, on en avait déjà fait pendant le premier confinement, précise  Sébastien Labeyrie. On n'y gagne rien financièrement, mais on a de bons retours, ça fait chaud au cœur. On ne baisse pas les bras, on continue de se battre".
 

"Nous demandons la suppression totale des charges"

Cette chaleur et ces encouragements, Sébastien Labeyrie en a bien besoin. Depuis le 17 mars, le Monseigneur, tout comme les 1 600  boîtes de nuit françaises, reste désespérément fermé. Si les bars et restaurants ont pu rouvrir quelques semainesdurant l'été, aucune réouverture des pistes de danse n'a été accordée.
"La situation est catastrophique, confie-t-il. Depuis le départ, nous n'avons aucune visibilité sur une possible réouverture. Et les premières aides ne sont tombées qu'au bout de sept mois".

J'avais de la trésorerie accumulée sur cinq ans d'activité, j'ai tout perdu. Aujourd'hui, je vis grâce au Prêt garanti par l'Etat, mais je vais devoir le rembourser.

Sébastien Labeyrie, dirigeant du Monseigneur à Bordeaux, adhérent UMIH



"Aujourd'hui, il faut que nous soyons accompagnés. Nous demandons la suppression totale des charges et une assurance que les aides promises par l'Etat soit réellement versées".

Des aides, pouvant aller jusqu'à 15 000 euros mensuels afin de prendre en charge les frais fixes, dont les loyers, ont été allouées par l'Etat. Initialement prévues sur trois mois, elles ont été reconduites jusqu'à la fin de l'année et viennent compléter les 1 500 euros alloués aux commerces et établissements faisant l'objet d'une fermeture administrative en raison de la crise sanitaire.
La somme correspondant aux mois de juin, juillet et août a été versée en octobre. Le reste se fait encore attendre.

"Cent mille euros sur six mois"

A l'échelle nationale, une centaine de boîtes de nuit a mis, ou est en train de mettre, la clé sous la porte, que ce soit volontairement ou contraints par les difficultés économiques.
Pourtant, "il faut raison garder", estime de son côté Patrick Malvaës, président du Syndicat national des discothèques et lieux de loisirs. "Si on calcule 15 000 euros sur six mois, plus l'aide de base de 1 500 euros mensuels, cela fait presque 100 000 euros sur six mois !  Beaucoup de patrons d'établissements peuvent se satisfaire de ces mesures d'accompagnement".

Les grosses structures en difficulté

La priorité, estime le syndicaliste, est désormais d'aider les plus grosses structures. Parmi les établissements toujours en activité,  on en dénombre "entre 150 et 200 qui ne peuvent se contenter du niveau d'indemnisation proposé", estime Patrick Malvaës.

"Il s'agir de discothèques qui ont beaucoup d'employés et qui ont des loyers et des charges très importants. Nous axons désormais les discussions sur la survie de ce segment-là, qui est un gros pourvoyeur d'emploi".
Selon Patrick Malvaës, en Gironde, quatre grosses discothèques seraient ainsi menacées, ce qui représenterait entre 150 et 200 emplois directs.

"Les clients ont pris de nouvelles habitudes"

A quand la réouverture alors ? Impossible de le prévoir. Les bars et restaurants ne devraient pas accueillir de clients avant 2021. Patrick Malvaës, lui, envisage un retour sur les pistes, au plus tôt à la fin du printemps. Mais là aussi se pose la question du lien avec le client.
"A partir du déconfinement, la France est devenue une énorme discothèque. Les restaurants, les bars, les clubs de plage… cet été tous les sites étaient devenus dansants. Les clients ont pris de nouvelles habitudes de consommations, dans d'autres lieux", note-t-il, tout en gardant une touche d'optimisme.

Il y aura certainement une crise après la crise. Mais c'est peut-être le bon moment pour accélérer la mutation du secteur. Celles des établissements, mais aussi du personnel. A nous d'anticiper, de les accompagner et d'explorer toutes les possibilités

Patrick Malvaës, président du Syndicat national des discothèques et lieux de loisirs


 
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