Une cinquantaine de manifestants s'est rassemblée ce jeudi 1er octobre à Pau, en Béarn. Des apiculteurs ou élus qui s'opposent à la réintroduction des néonicotinoïdes, qu'ils considèrent comme "tueurs d'abeilles". Interdits depuis 2018, le gouvernement voudrait les réintroduire.
"Ça peut être l’ultime coup de grâce, le coup de pétard derrière la nuque pour achever la bête qui souffre" avertit Patrice Bartoloméo. apiculteur et conseiller municipal d'opposition à Pau.
La profession est à l'agonie, meurtrie par les frelons asiatiques et la pollution. Elle redoute aujourd'hui le projet de loi permettant la réintroduction de semences de betteraves enrobées avec des néonicotinoïdes. Il a été présenté en conseil des ministre le 3 septembre et l'Assemblée nationale procédera à son vote solennel le 6 octobre.
"Il n’y aura pas un effet immédiat et visible mais clairement c’est une reculade de trente ans. Pour l’apiculture, pour la santé publique et pour l’autonomie vivrière du pays" insiste Patrice Bartoloméo.
Les néonicotinoïdes est un type de pesticides interdit depuis le 1e septembre 2018. A l'époque, la France était allée plus loin que l'Europe qui en avait fortement limité l'utilisation. Aujourd'hui, le gouvernement veut les ré-autoriser temporairement jusqu'en 2023. Seule la filière betterave, touchée par la jaunisse, serait concernée mais le maïs a demandé aussi à en bénéficier. Or, cette culture est très présente en Béarn rappelle Johann Pavia, de l'Union Nationale de l'Apiculture Française.
Depuis leur mise sur le marché dans les années 90, des pays européens et des spécialistes de l'environnement s'inquiétaient de l'impact des néonicotinoïdes sur les abeilles. Impact démontré en 2013 et confirmé en 2018 par l'Efsa, l'agence européenne en charge de la sécurité sanitaire des aliments. Trois pesticides néonicotinoïdes (la clothianidine, l'imidaclopride et le thiaméthoxame) présentent des risques. Ces substances neurotoxiques touchent le système nerveux des insectes. Elles diminuent leur espèrance de vie et perturbent leur navigation.On sait qu'on est une terre de maïs. Et le retour des graines enrobées de néonicotinoïdes serait une grosse difficulté pour la filière apicole. On n'imagine pas qu'on puisse faire un retour en arrière comme ça pour des produits sur lesquels on avait légiféré. C'est incompréhensible à nos yeux.
"Imaginez une abeille qui pèse un gramme. Ca touche surtout leur système nerveux. Elle ne reviennent pas à la ruche elle meurent sur la plante" témoigne un autre apiculteur.
Selon l'Union Nationale de l'Apiculture Française, depuis leur apparition en France, "300 000 ruches périssent chaque année et doivent être reconstituées par les apiculteurs afin de maintenir le cheptel français. Les mortalités sont passées de 5 à 30%". L'UNAF ajoute sur son site : "Les néonicotinoïdes sont extrêmement persistants et contaminent tout notre environnement. Les rendements de miel par ruche ont été significativement réduits divisant la production de miel français par deux en 25 ans. Dans le même temps, les importations françaises de miel ont explosé".
Ce jeudi 1er octobre, ils étaient une cinquantaine à se rassembler devant la préfecture des Pyrénées-Atlantiques à l'appel national de l'UNAF. Des associations environnementales, des élus et des apiculteurs bien décidés à ne pas rester invisibles.
"On est les premiers de cordées de l’agriculture. Nous sommes des paysans sans terre. Ca ne nous donne pas la visibilité qui nous permet d’agir. Mais on est là, on est bien là" martèle Patrice Patrice Bartoloméo.
Les apiculteurs qui rappellent les députés à leurs responsabilités et leur demandent de voter contre le projet de loi. Un appel partagé par Jean-François Blanco. Le conseiller régional EELV des Pyrénées-Atlantiques présentera une motion en ce sens ce lundi en séance plénière.
"Je demande aux députés et surtout aux députés des Pyrénées-Atlantiques d'empêcher le retour de ces pesticides qui sont mortifères" explique l'élu régional.
Des députés qui, pour l'instant, n'ont pas répondu aux apiculteurs.
Le miel en Nouvelle-Aquitaine
En 2018, la Nouvelle-Aquitaine était la troisième région en nombre de colonies.Elle comptait 600 apiculteurs professionnels qui ont produit 2000 tonnes de miel cette année-là.
La France importe plus du double de sa production de miel.