Leur rémunération tourne autour du Smic et leurs missions sont multiples. Les secrétaires de mairie demandent une revalorisation de leur métier, qui manque d'attractivité et peine à recruter. Il y a urgence : d'ici à 2030, 30 % des secrétaires partiront à la retraite.
Droit, urbanisme, budget, relation avec les élus et les administrés, comptabilité, veille juridique... "On a 1 000 choses à traiter. Les élus sont très demandeurs, les administrés, on n'en parle pas", explique Fanny Dupouy. Cette fonctionnaire travaille 30 heures par semaine, réparties sur les mairies de Garos et Castetner en Béarn.
Quand les gens me parlent de mon métier, ils pensent qu'on fait le secrétariat du maire. Puis lorsque je décris toutes mes fonctions, ils n'en reviennent pas.
Fanny Dupouysecrétaire de mairies en Béarn
Faible rémunération
Un métier qu'elle adore et avait déjà exercé "il y a vingt-cinq ans", avant d'être embauchée dans une entreprise. C'est en 2017 que Fanny a renoué avec la fonction publique, et l'accompagnement des élus. "Pour rien au monde, je ne retournerai dans le privé", assure la quinquagénaire.
Pourtant, tout n'est pas rose dans le métier. Pendant sa longue absence, la dématérialisation a fait son entrée dans les mairies. "Il nous faut tout imprimer, signer, scanner, et entrer sur les plateformes, quand elles marchent. Ça nous fait perdre un temps fou", soupire-t-elle.
Et son temps, au vu des tâches à accomplir, est précieux. Fanny subit au quotidien la baisse de moyens alloués aux collectivités. "L'État recrute moins de fonctionnaires, et on nous demande de faire le travail de plusieurs personnes. Mais ce n'est pas pour autant que nous sommes mieux payées".
Agent administratif principal de 2e classe, Fanny a débuté au Smic. Elle est désormais au 6e échelon, ce qui équivaut à 1 770,26 euros bruts pour un temps complet. La hausse de leur rémunération, c'est une des demandes phares des secrétaires de mairie qui militent pour une revalorisation de leur métier.
Jeudi 6 avril, le sénat a voté une proposition de loi en ce sens, mais sans modifier leur salaire.
Des politiques de plus en plus à l'écoute
Le combat de ces secrétaires de mairie passe forcément par la sensibilisation des politiques. Fanny Dupuy avait écrit une lettre puis rencontré le député des Pyrénées-Atlantiques David Habib. Dans son courrier, elle décrit son quotidien et celui de ses collègues, entre pannes Internet, exercices de comptabilité, réception des administrés, échanges avec des entrepreneurs, ou encore rédaction d'une déclaration préalable de travaux. "Il a été très réceptif", assure-t-elle.
Dans le Gers, Sylvie Gibel, 57 ans, dont vingt-sept années d'ancienneté, a pris le problème à bras le corps, en créant une association dans son département, puis un groupe Facebook pour réunir des collègues de toute la France. Sa page "Revalorisons le métier de secrétaire de mairie", recense désormais plus de 2 000 personnes, qui échangent et commentent sous chaque prise de parole sur le sujet.
Son métier, Sylvie Gibel, le qualifie de "passionnant, évolutif, et mal payé". "Avec le maire, nous formons un duo. Notre bonne entente est primordiale au bon fonctionnement de la collectivité, décrit-elle. Eux ont un mandat de six ans, nous, on reste. On doit donc s'adapter en permanence. Et quand ça ne marche pas, on s'en va."
Employée sur quatre communes de son département, Sylvie Gibel a pu rencontrer Stanislas Guerini en octobre 2022. Le ministre de la Transformation et de la Fonction publique s'est montré "à l'écoute" des revendications portées. "À chaque fois qu'on perd une secrétaire de mairie, on perd des services publics. C'est comme si on fermait une maison France Service", répétait-il encore ce 11 avril, invité de Public Sénat. Le ministre a également affirmé vouloir "travailler à un parcours de carrière et de rémunération" qui soit plus adapté à ces fonctionnaires, avec des "traductions concrètes dans le projet de loi de Finances".
Départs en retraite
Beaucoup reste pourtant à faire. D'ici 2030, un tiers de secrétaires de mairie, à très grande majorité des femmes, prendra sa retraite. Et le poste n'attire plus. "Les filles viennent en stage, elles voient le boulot que ça demande, la veille juridique, les responsabilités... Ça fait fuir tout le monde", regrette Sylvie Gibel.
La Gersoise se refuse pour autant à verser dans le pessimisme. Même si la proposition de loi adoptée au Sénat ne la satisfait pas dans son intégralité, elle estime que "les premiers jalons sont posés". "Je vois que ça bouge, tout le monde s'est emparé du sujet, se réjouit-elle.