Triple champion olympique de canoë-kayak, le Béarnais est l'un des plus grands champions du sport français. Sidney, Athènes, Londres, une trilogie pour l'éternité.
Son palmarès est aussi long qu'un confinement. On a tout dit, tout écrit, tout montré de l'extraordinaire carrière du Palois. Le président du Comité d'Organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 a tout gagné. Et avec lui, ce n'est pas une expression galvaudée: trois titres de champion olympique, trois de champion du monde (plus 3 médailles d'argent), et encore trois championnats d'Europe (plus deux médailles d'argent) et neuf sacres nationaux (plus huit médailles d'argent et sept de bronze). Le boss du slalom monoplace c'est lui.
S'il n'en reste qu'un
Tony Estanguet est issu d'une famille de kayakiste. Son père Henri fut trois fois vice-champion de France et quatrième mondial en 1981. L'un de ses grands frères Patrice a été médaillé de bronze aux Jeux Olympiques d'Atlanta en 1996.
Les deux frangins avaient l'habitude de se défier depuis leur enfance et plus tard en compétition au haut niveau. Mais rien ne pouvait les préparer à ce terrible duel qualificatif pour le deuxième billet français pour les Jeux de Sidney en 2000.
Un duel fratricide
Tout va se jouer dans l'Ariège à Foix. Patrice et Tony ont trois manches pour se départager. Malgré une tension extrême, ils ne commettent pas la moindre faute.
Mais Tony est le plus rapide et décroche la timbale. Il est heureux oui forcément, mais il vient de briser pour toujours le rêve d'or olympique de son aîné... Tony n'a rien oublié :
"c'était un moment très particulier dont on se souviendra toute notre vie. Le scénario est terrible. C'est vrai, nous avions l'habitude de nous affronter. Mais là, ce sont les Jeux et c'est mon frangin".
Sidney, acte I
Le kayakiste ne pagaiera pas seul en Australie. Chaque effort sera aussi un peu pour Patrice, resté en Béarn. Tony arrive gonflé à bloc pour les Jeux de l'an 2000.
Il vient de remporter son premier grand titre, les championnats d'Europe.
Le 18 septembre, après deux manches de haute volée, son nom s'affiche sur la première place du tableau. A vingt-et-un, le "petit" Tony est champion olympique.
sa victoire aura un énorme retentissement dans l'hexagone:
"c'est un rêve de gamin qui se réalise. Ce titre m'a fait basculer dans une autre vie".
Athènes, acte II
Quatre ans plus tard, Tony Estanguet est toujours en haut de la rivière.
Son incroyable rivalité avec le Slovaque Martikan pousse les deux champions à repousser sans cesse leurs limites. La pression sur les épaules du Béarnais est terrible. Car il est le tenant du titre. Lors d'une finale d'anthologie, il devance son adversaire préféré de douze centièmes. Mais l'attente du verdict est interminable. Les juges visionnent et revisionnent la course de Martikan avant de lui infliger une pénalité pour avoir heurté une des vingt-trois portes du parcours.
Tony Estanguet est champion olympique pour la deuxième fois.
Pékin, l'acte III manqué
Au sommet de son art, le Palois se présente aux Jeux de Beejing, Pékin pour la France, en position de grand favori. Mais il sait que dans une discipline aussi exigeante que le slalom où le moindre remou peut vous faire tout perdre, tout peut arriver.
Pression supplémentaire. Il a l'immense honneur d'être désigné porte drapeaux de la délégation française pour ces Jeux Olympiques de 2008.
Il aura la suprême élégance de ne jamais en faire une excuse. Mais dans la capitale chinoise, le Béarnais est méconnaissable.
Il ne trouve pas la solution dans un bassin tumultueux et est éliminé dès les demi-finales. Tony termine neuvième, c'est un échec. Le camp français a la gueule de bois.
La perspective d'être le premier sportif tricolore triple champion olympique dans trois Jeux consécutifs s'est envolée.
Touché mais pas coulé
Les grands champions ont un mental de fer.
et Tony Estanguet va le prouver une nouvelle fois.
Il analyse son échec, en tire les leçons et repart au combat, plus fort que jamais.
Il a montré qu'il est loin d'être fini.
La preuve, il se qualifie pour Londres, ses quatrièmes et probables derniers Jeux Olympiques. Et le Béarnais sait ce qu'il veut pour réussir sa sortie: une troisième médaille d'or.
Londres, peut-être le plus beau
Au bord du bassin, l'ambiance est exceptionnelle. Les Anglais, passionnés de sport, sont enthousiastes sur tous les sites.
La France, elle, se prépare au traditionnel chassé-croisé des vacances d'été.
Mais ce 31 juillet 2012, tous les regards sont tournés Londres.
Le duel n'a pas pris une ride. Face à l'eau les Federer et Nadal du canoë-kayak monoplace : Martikan et Estanguet. Ils règnent sur les J.O où ils se partagent l'or. Quand ce n'est pas l'un, c'est l'autre. Leur rivalité atteint encore une fois les sommets.
Tony Estanguet est tout simplement parfait et il prend la tête de la compétition.
Avant de regagner le bord du bassin pour attendre le passage de son rival.
Puis le verdict tombe. Martikan est battu.
Tony Estanguet, mitraillé par les objectifs des photographes, peut lever les bras sous
une ènorme ovation de tout le camp français.
Le Béarnais est champion olympique pour la troisième fois, huit ans après Athènes.
"C'est l'apothéose après seize ans au haut niveau", dira-t-il.
Il vient d'écrire en lettres d'or une nouvelle page de sa légende.
Il est triple champion olympique.
Fin 2012, il met un terme à sa carrière, pour en commencer une deuxième, de dirigeant olympique. Le Béarnais est aujourd'hui à la tête de l'organisation de Paris 2024.
Tony Estanguet, le maître des Jeux.