TEMOIGNAGE. À Poitiers, une jeune femme affirme avoir été victime d'une piqûre malveillante lors d'une soirée

À la suite d'une soirée dans une salle de spectacle pictave, une jeune femme explique avoir constaté une trace de piqûre malveillante sur sa peau. Face à la crainte d'avoir été droguée et au risque d'une contamination au VIH, elle explique avoir consulté. Elle ne comprend pas que le corps médical lui ait refusé un traitement post exposition.

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La piqûre constatée sur sa peau par Simone à la fin de la soirée queer du samedi 22 mai au Confort Moderne de Poitiers, est-elle due à une piqûre de seringue ? Un produit lui a-t-il été injecté de manière intentionnelle ? A-t-elle pu être exposée à un risque de contamination au VIH, le virus responsable du Sida ?

À ces questions, Simone aimerait des réponses. La jeune femme trans a bien tenté de demander à bénéficier du traitement post exposition au VIH, risque auquel elle estime avoir pu être exposée, ne sachant pas si la seringue avait déjà servi à piquer d'autres personnes, mais le médecin qu'elle a consulté au CHU de Poitiers ne le lui a pas accordé.

La jeune femme explique avoir vécu une soirée très difficile, qu'elle qualifie aisément de "soirée de merde", piquée à son insu et peut-être droguée par une substance chimique. Elle prend la parole "pour témoigner" et inciter les autres participants à cette soirée à vérifier si ils et elles, aussi, ont pu être victimes de piqûres malveillantes.

En arrivant chez moi, j'ai regardé avec un petit miroir et j'ai constaté ce que je pense être une piqûre. Il y avait un point rouge et une petite marque de sang dans le short.

Simone, victime d'une piqûre malveillante

Risque infime

Simone raconte être arrivée à la soirée queer du Confort Moderne vers 22h avec des amis. "À un moment dans la soirée, je ne me souviens plus vraiment à quelle heure, j'ai commencé à avoir des nausées, des étourdissements et des bouffées de chaleur, raconte-t-elle ; chose que j'ai du mal à expliquer puisque je n'avais rien consommé et que j'avais bien mangé et fait une bonne nuit avant. Mais je ne me sentais pas très bien. J'ai quitté la soirée vers minuit-1h. Je sentais que quelque chose me démangeait à la fesse gauche. En arrivant chez moi, j'ai regardé avec un petit miroir et j'ai constaté ce que je pense être une piqûre. Il y avait un point rouge et une petite marque de sang dans le short." 

Un peu en panique, elle contacte par forum de discussions l'association Ekinox, présente au Confort Moderne. "On m'a conseillé de me faire prescrire le plus rapidement un traitement de post exposition par rapport aux risques de contamination au VIH, aux hépatites..." Sa voix se fait alors hésitante. "On m'a conseillé d'aller aux Urgences pour voir si j'avais été droguée au GHB (le drogue du violeur, ndlr). Je ne suis pas allée aux Urgences parce que j'ai eu de mauvaises expériences avec le corps médical par rapport à la transidentité. (...) J'ai déjà subi de la transphobie médicale."

Nous considérons que le très faible risque de transmission du VIH ne justifie pas de la mise en place d’un traitement post exposition du VIH dans cette situation de piqûre malveillante.

Société française de lutte contre le Sida

À la place, elle se rend au centre de dépistage anonyme dès le lundi matin. Elle obtient un rendez-vous pour l'après-midi où elle apprend qu'elle ne pourra pas bénéficier du traitement post exposition. Le médecin qui la reçoit lui explique que le risque est jugé infime et que dans ce genre de situation, ce type de traitement n'est désormais plus prescrit.

Dans une récente note, la Société française de lutte contre le Sida (SFLS) explique à ce sujet que "nous considérons que le très faible risque de transmission du VIH ne justifie pas de la mise en place d’un traitement post exposition du VIH dans cette situation de piqûre malveillante"

La SFLS motive ce choix par la "faible prévalence du VIH en France (estimée à 0,4 % chez les adultes de 15 à 49 ans)", par le fait "que la quasi-totalité (> 90%) des adultes connus comme vivant avec le VIH sont sous traitement antirétroviral efficace sans risque de transmission", par le "nombre limité de personnes vivant avec le VIH ne connaissant pas leur infection, estimé à moins de 24.000 personnes en 2018", par "la faible survie du VIH en milieu externe" et par le "fait qu’aucune contamination par le VIH n’a été observée après une piqûre accidentelle en dehors du soin".

Transphobie

La mésaventure de Simone lors de cette soirée ne s'arrête pas là. Elle se poursuit le lundi lorsqu'elle se présente au centre de dépistage anonyme. "J'ai été mal reçue. J'ai été mégenrée dès que la secrétaire a vu ma carte vitale, sur laquelle il y a encore mon ancien prénom." La jeune femme parle d'infantilisation. "On m'a dit plusieurs fois que j'aurais dû aller aux Urgences. On m'a demandé plusieurs fois pourquoi je n'y étais pas allée directement. J'ai expliqué que j'avais peur de la transphobie médicale et j'avais manifestement raison d'en avoir peur parce que j'en ai subie tout au long de l'après-midi, au centre de dépistage et ensuite avec l'interne. Alors, ce n'est pas toujours malveillant, mais souvent maladroit. Et, c'est triste, parce que ça veut dire que le personnel soignant n'est pas formé." 

Je pense, mais je n'en aurais jamais la preuve, et je n'en suis pas certaine, je pense que j'ai été droguée au GHB.

Simone, victime d'une piqûre malveillante

Informé de la suspicion de piqûre malveillante lors de la soirée accueillie dans ses locaux, le Confort Moderne à Poitiers dit tout mettre en place pour que les lieux de culture la nuit restent des espaces sûrs pour les spectateurs. "C'est un phénomène préoccupant dont on doit s'emparer pour faire de nos espaces des espaces 'safes', des espaces de sécurité, de liberté et de création mais où on est en sécurité", explique Yann Chevallier, directeur du Confort Moderne. La salle de musiques actuelles travaille avec Ekinox dont l'action se focalise sur la prévention. Pour le collectif, "effectivement, il y a des conduites qui dérivent. Mais c'est peut-être un prétexte pour nous dire qu'il faut être solidaire et prendre soin de nous et des autres. Être donc vigilants en soirée et ne pas rentrer dans la paranoïa." 

De son côté, Simone estime sa crainte légitime. "Comme tout le monde, j'ai vu les vidéos, les témoignages sur les réseaux sociaux, donc je sais que ça existe. Quelques semaines auparavant j'avais entendu parler de piqûres dans des boîtes de Poitiers." Elle fait donc rapidement le lien samedi soir. "Je pense, mais je n'en aurais jamais la preuve, et je n'en suis pas certaine, je pense que j'ai été droguée au GHB à ce moment-là. Malheureusement, ce n'est détectable que dans les six heures..."

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