Peu à peu, les vieux compteurs électriques sont remplacés par des Linky. Dans la Vienne, ce furent 135 000 compteurs à remplacer pour l'entreprise SOREGIES. Des compteurs qui ont trouvé de nouvelles vies, parfois en pichet, parfois en dalles de jardin.
Ils sont de moins en moins nombreux, mais on en trouve encore dans les coffrets électriques. De vieux compteurs d’autrefois, de couleur noire avec la roue métallique qui tourne. Dans la Vienne, la SRD, la filière « distribution » de la SOREGIES, fournisseur local d’électricité, les remplace progressivement depuis cinq ans pour installer à la place des compteurs Linky. 135 000 compteurs ancienne génération ont ainsi été démontés et sont partis vers une nouvelle vie.
En 2020, la SOREGIES a signé un partenariat avec un ESAT, un établissement d’aide par le travail et lui envoie tous ces compteurs. « Nous avons traité entre 20 et 25 tonnes de matériel », se réjouit Jean-François Guillon, responsable des approvisionnements à la SOREGIES. Autrement, les compteurs auraient fini en centre d’enfouissement.
À Smarves, au sud de Poitiers, les boîtiers - noirs ou blancs selon la génération - sont démontés pièce par pièce par des travailleurs handicapés. « On peut en faire 4 à 5 dans la journée, les compteurs les vieux sont les plus difficiles », indique Yannick Delage, travailleur à l’ESAT « Les flotteurs poitevins ». Un compteur désossé, ce sont plus 100 pièces différentes.
Et chacune est orientée vers un bac en fonction de sa matière. « Les opérateurs commencent par démonter tous les capots en plastique et après, ils trient le fer, le bobinage, l’aluminium, le cuivre, les fils gainés et tout ce qui est en laiton », explique Daniel Bodin, moniteur d’atelier. Un recycleur de métaux les récupérera à son tour pour les envoyer dans des filières de recyclage spécifiques.
Vers une vie éternelle
Il reste les capots en plastique. « Les noirs sont les moins recyclables, mais ils auront une seconde vie en servant de combustible dans les cimenteries », détaille Daniel Bodin. Les mieux, ce sont les blancs, les plus récents : « Ils auront une vie éternelle, car ils finiront en plastique injecté pour refaire des pièces à l’infini. »
Seuls les fusibles de compteurs restent sans solution. « Nous arrivons à presque 100 % de réemploi », ajoute Jean-François Guillon de la SOREGIES. « La qualité du démantèlement est telle qu’elle couvre 65 % des coûts qu’il suscite. »
À l’autre bout de la chaîne, il est un autre industriel satisfait : Ne-Auplast à l’Isle-Jourdain, dans le sud de la Vienne. Une PME de plasturgie qui emploie trois personnes. Elle s’est associée avec l’ESAT « André Rideau » à Adriers qui vient accomplir une des étapes du recyclage des compteurs au sein même des locaux de l’entreprise. C’est ici que se trouve la broyeuse qui va transformer les coques blanches en plastique en paillettes réutilisables. Une équipe de trois travailleurs handicapés vient régulièrement renforcer les effectifs de Ne-Auplast.
Et le plasturgiste ensuite n’a plus qu’à refabriquer de nouveaux objets : « On peut faire des pichets, il y a même des seaux et voici des dalles à gazon synthétique », égrène Philippe Colin, moniteur d’atelier à l’ESAT.
Ne-Auplast fabrique même avec ce plastique la clé avec laquelle la SRD, le distributeur d’électricité, ouvre les coffrets pour accéder aux compteurs. L’exemple parfait de l’économie circulaire.
« Nous avons plein d’idées », annonce Philippe Chaulier, le directeur de Ne-Auplast. « Pour un cache alimentation testé en laboratoire, nous avons eu de bons résultats. Même avec une matière 100 % recyclée, on peut garder des propriétés techniques très intéressantes. Nous pouvons faire beaucoup de choses avec un polymère recyclé. »
Il n’y a que pour le domaine alimentaire que ce plastique est déconseillé.
Des compteurs aux poubelles
Ne-Auplast a fait ses premiers essais il y a deux ans. Maintenant que le filon des compteurs est à deux doigts d’être épuisée, l’entreprise regarde du côté des conteneurs poubelles. « Le gisement de plastique sur le Sud Vienne ne manque pas », assure Denis Auché, le directeur général de Ne-Auplast. « De la matière à recycler, on en trouve. Ce que nous recherchons surtout, ce sont des produits à injecter. »
De leurs côtés, les deux ESAT, qui ont œuvré au recyclage des compteurs électriques, font actuellement des tests sur les luminaires et le matériel informatique. Le contrat des compteurs électriques se terminera en 2025. La campagne de renouvellement des compteurs par des Linky arrive à son terme.