Grand Poitiers s’oppose à la révision des objectifs de fréquentation imposés à l’exploitant de l’aéroport. Pour les élus, cette décision prise par le syndicat mixte de l’aéroport de Poitiers risque de les contraindre à financer jusqu'en 2032 un aéroport déficitaire.
Le syndicat mixte de l’aéroport de Poitiers-Biard (SMAPB), constitué d’élus de Grand Poitiers et du département de la Vienne, traverse une énième zone de turbulence. Sept de ses membres ont déposé lundi 17 mai un recours contentieux devant le Tribunal administratif de Poitiers. Les élus de Grand Poitiers, ainsi que Sandrine Martin, conseillère départementale de l’opposition, contestent un avenant adopté en mars dernier au contrat signé avec Sealar, société exploitant l’aéroport. Cet avenant prévoit la révision à la baisse des objectifs de fréquentation fixés au gestionnaire.
Alors qu’à la signature du contrat avec le syndicat en 2019, Sealar s’était engagé réussir à attirer 892.000 passagers au cumulé après six années d’exploitation, ce chiffre a dégringolé… à 309.000, soit une diminution de plus de 65% des objectifs. Une révision à la baisse concédée à l’exploitant pour pallier la dégringolade de la fréquentation de Poitiers-Biard et du trafic aérien en raison de la crise sanitaire du Covid-19.
Mise à mal de la clause de revoyure
Problème : à l’époque, Grand Poitiers a accepté de maintenir ses 740.000 euros de financement annuel au syndicat de l’aéroport, et ce uniquement après l’ajout d’une clause de revoyure au contrat de délégation de service public à Sealar jusqu’en 2032. En clair, si en 2026 les performances commerciales fixées par le SMAPB étaient inférieur de 25% aux prévisions, Grand Poitiers se réservait le droit de couper le robinet des aides.
Pour eux, l’avenant voté à majorité simple au sein du SMAPB avec 10 voix sur 17, vide de sa substance la clause de revoyure, et risque également de les engager financièrement jusqu’en 2032. Sans porte de sortie. Un point sur lequel Grand Poitiers s’appuie pour remettre en cause sa validité. "Une telle modification du contrat doit faire consensus entre les parties prenantes, avec un vote à majorité qualifié", déclare Gilles Morisseau, vice-président de Grand Poitiers et maire de Biard. "Il est aberrant de voir une collectivité [le SMAPB, ndlr] décider toute seule d’engager les deniers d’une autre collectivité [Grand Poitiers, ndlr], sans que nous ayons notre mot à dire."
Des visions opposées
Et dans cette instance formée aux deux tiers par les élus du département de la Vienne d’un côté, et à un tiers par les membres de Grand Poitiers, ce sont deux visions de l’aéroport qui s’opposent. Les premiers y voient un atout d’attractivité pour la Vienne. Les seconds, un gouffre financier soutenu par les collectivités où plus de 7 millions d’euros d’argent public menacent de tomber si l’avenant est maintenu.
"Je ne peux que regretter la position de Grand Poitiers, alors que je mets tout en œuvre pour remettre l’aéroport sur pied après cette crise sanitaire sans précédent", déplore Pascale Moreau, présidente du syndicat mixte et vice-présidente du Conseil départemental de la Vienne. "Ces actions mettent à mal ce qui est entrepris pour faire face aux difficultés du moment". A l’amertume se mêle également de la déception pour Pascale Moreau de ne pas réussir à rallier Grand Poitiers à son projet. "Quand on adhère à un syndicat, il faut ensuite respecter les règles sur les modalités de vote et les questions financières. Ce sont des points qui ont été approuvés par chacune des parties, Grand Poitiers a des obligations".
Reste maintenant au Tribunal administratif de Poitiers de trancher sur l’épineuse question de la validité de l’avenant, sur lequel la survie de l’aéroport Poitiers-Biard se joue.