Loudun : sélectionné au Renaudot des Lycéens, "Le rapport chinois" de Pierre Darkanian est une satire hilarante du monde contemporain et de la finance

"Le rapport chinois" de Pierre Darkanian est une farce tragique sur l'absurdité du monde actuel. Le héro, recruté par un cabinet de conseil, se voit confier la tâche de rédiger un rapport sur la Chine. À pleurer de rire! Le roman est en sélection au prix Renaudot des Lycéens remis le 18 novembre à Loudun, dans la Vienne. SERIE 6/6

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Et si c'était lui le lauréat du prix Renaudot des Lycéens 2021 ? Simple hypothèse mais, au vu de l'originalité du roman et les vifs éclats de rire qui ont fusé tout au long de sa lecture, elle nous parait aujourd'hui tout à fait plausible. 

Dans la vie, Pierre Darkanian est avocat pénaliste. Mais il "a toujours voulu écrire". "Il m’importe d'écrire et j’ai fini par écrire un manuscrit complet, explique-t-il. C’est comme ça qu’est né Le rapport chinois", l'un des six livres en lice pour le prix des Lycéens remis le 18 novembre à Loudun, dans la Vienne. 

Le héro du roman de Pierre Darkanian est un imbécile, puérile, imbu de lui-même, à l'égo surdimensionné, et qui, de manière immuable, érige l'autosatisfaction en philosophie de vie, comme d'autres le goût du travail bien fait. Recruté par un cabinet de conseil à un salaire mirobolant, il passe les trois premières années dans l'entreprise à ne strictement rien faire...! On ne lui offre, d'ailleurs, aucune mission. L'oisiveté du bonhomme donne lieu à de réjouissantes pages sur le vide de nos vies. Jusqu'au jour où, enfin, on lui confie une tâche : un rapport sur les pistes d'investissement de la Chine en France. L'objet de 1084 pages est un alignement de poncifs plus hilarants les uns que les autres, copiés-collés d'articles en ligne, mais qui, au fil des pages, va se révéler capable d'anéantir chacun de ses lecteurs par ce qu'il pourrait bien révéler de la vacuité du monde contemporain.

Qu'en pensent les lycéens de Loudun ? Éléments de réponse avec le reportage d'Élodie Gérard, Thomas Chapuzot et Bénédicte Biraud.

Entretien avec Pierre Darkanian

Comment est né Le rapport chinois ? De quelle histoire ? Qu’est-ce qui a interpellé votre imagination ?

Je me souvenais avoir été marqué par ma découverte du monde professionnel et par des rapports sociaux qui étaient guidés par la hiérarchie et c’est quelque chose qui m’avait profondément marqué. C'est quelque chose qui était assez différent de ce que j’avais connu dans le cadre de l’école ou de mes études universitaires. C’était parti un peu de ça, de gens qui communiquent beaucoup sur le fait qu’ils travaillent énormément, ce qui n’est pas toujours très vrai. Dans ma vie, le vide est un concept qui m’obsède un peu : le vide de nos vies, le vide de nos journées que l’on essaie de combler. C’était ça mon point de départ.

Ce roman est une satire, dans le sens britannique du nonsense. C’est un genre assez peu publié en France. Est-ce que ça a été compliqué de convaincre un éditeur avec cette histoire ?

Ça a été compliqué, oui. Comme c’est compliqué pour un peu tous les auteurs en herbe de convaincre un éditeur car ils reçoivent beaucoup de manuscrits. C’est vrai qu'il y a un côté assez absurde dans la tonalité du roman qui n’est pas forcément beaucoup présent en littérature française, la veine de la dérision, la ligne humoristique qui est souvent présenté comme pas vraiment de la littérature, ce qui à mon sens n’est pas du tout justifié. Ça a été d’autant plus difficile pour cette raison là mais, d’un autre côté, c’est une tonalité que l’on ne retrouve pas dans beaucoup de roman. Je ne dis pas que je suis le seul mais c’est différent de ce qui se fait habituellement.

Y a-t-il peut-être une volonté de votre part de ridiculiser tout ce qui se prend trop au sérieux?

Oui car j’ai toujours cette conception du vide qui est assez marquée. J’ai toujours ce sentiment que rien n’est vraiment sérieux. Ce qui ne veut pas dire que l’on ne doit pas être sérieux lorsque l’on travaille ou dans les rapports sociaux, ou dans les rapports hiérarchiques au travail… J’essaye de combattre cette impression que l’on essaye de donner parfois que ce que l’on fait a forcément de l’importance. Je force le trait à dessein et je me suis intéressé à un métier en particulier dans lequel les personnes ne se posent pas vraiment la question du sens de ce qu’ils font.

Le milieu de la finance…  

Effectivement, ce milieu de la finance avec pour toile de fond la crise financière dont on ne parle plus beaucoup aujourd’hui. C’était à une époque, dans les années 2007-2008, où on a commencé à se rendre compte que le monde ne reposait pas sur grand-chose de palpable. Ça permettait de faire une déclinaison du vide depuis la vie de mon personnage et un peu plus largement sur le monde du travail et le monde de la finance.  

Est-ce qu’il y avait aussi de votre part une volonté de réinventer les codes de ce type de récit ?  

C’est vrai que j’aime beaucoup cela. Je ne crois pas qu’un roman doive se cantonner dans un seul type littéraire. J’aime bien effectivement mélanger les genres, les fausses pistes. Parfois, au risque de déboussoler le lecteur. C’est un peu la volonté que j’avais en écrivant ce roman.  

Le fait que votre roman soit sélectionné au Renaudot des lycéens, un prix des lycéens, est-ce que ça revêt une importance particulière pour vous ?  

Tout à fait, parce que la toile de fond du livre est un monde que par définition les lycéens ne connaissent pas, celui du travail. Mais qu’ils vont découvrir. L’idée à l’origine de ce roman était bien sûr la découverte de ce monde-là. J’ai toujours conservé ma conception de lycéens sur ce qu'allait être ma vie. Et lorsque j’ai été confronté à la réalité du travail, c’est quelque chose qui a été assez violent, si j’ose dire. Donc ça m’intéresse beaucoup de savoir si ces lycéens vont comprendre cette sorte de décalage que je décris entre ce à quoi on peut aspirer, ou l’idée que l’on peut se faire du monde, et la réalité de ce monde, lorsque l’on est en train de mettre un pied dedans.

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