Trouver un ophtalmologue qui accepte les nouveaux patients en Poitou-Charentes est devenu un véritable parcours du combattant. Les habitants se tournent donc vers de nouveaux types de cabinets qui permettent une prise en charge plus rapide que les professionnels libéraux.
Seul les patients ayant déjà un dossier pourront obtenir un rendez-vous." Cette phrase est celle que tous les nouveaux patients entendent lorsqu'ils tentent de prendre rendez-vous chez un ophtalmologue à Poitiers (86). Dans la ville on compte près de 40 spécialistes dont une quinzaine de cabinets indépendants en secteur 1. Alors, pour avoir un rendez-vous le plus rapidement possible, les Pictaviens sont prêts à tout.
Dans un centre médical situé en périphérie de Poitiers, le délai est moins long mais le secrétariat n'est ouvert qu'une fois par mois et pendant deux heures seulement... Qu'à cela ne tienne, les habitants appellent dès 8h et patientent parfois une heure avant d'avoir une réponse. "Il faut appeler à des heures bien précises et des jours bien précis, notamment en début de mois, car sinon, il faut attendre encore trois ou quatre mois pour demander un rendez-vous", raconte une vieille dame.
La télémédecine, l'avenir de l'ophtalmologie ?
Pour expliquer ces délais, beaucoup de spécialistes dénoncent le fameux "numérus clausus" à l'entrée des études médicales ainsi que le trop faible nombre de jeunes spécialistes formés par rapport aux départs en retraite. Mais pour le docteur Franck Duclos, membre du Conseil départemental de la Vienne de l'Ordre national des médecins, le problème ne vient pas de là.
Si on prend les chiffres globalement, il n'y a jamais eu autant de médecins en France. Mais les médecins qui exercent ne veulent plus, en majorité, le faire en tant que libéral et encore moins en étant isolé. Ce n'est pas en augmentant le nombre de médecins qui vont sortir de la faculté qu'il va il y avoir plus de médecins qui vont s'installer en libéral. Les médecins qui sortent de la faculté veulent avant tout une activité salariée, ne pas terminer trop tard, ne pas effectuer de gardes, etc...
Face à la pénurie d'ophtalmologiste, des cabinets d'un nouveau genre se développent. Ils permettent une prise de rendez-vous en ligne plus rapide et les examens sont généralement réalisés par des orthoptistes. Une fois ces deux étapes accomplies, les patients effectuent une consultation accélérée avec un médecin. "Ici, j'ai eu un rendez-vous en deux semaines alors qu'avec mon ophtalmologiste habituel, j'aurai dû attendre près d'un an", explique un Pictavien.
D'après le docteur François Pelen, fondateur de ces centres, ce nouveau mode d'exercice est l'avenir de l'ophtalmologie. "Je pense que c'est un système qui fonctionne : on a vu un million de patients en 2017 sur toute la France avec 300 professionnels, précise-t-il. Après il y a d'autres initiatives sur lesquelles nous travaillons comme la télémédecine. L'idée serait par exemple d'avoir un orthoptiste dans une ville un peu défavorisée qui ferait tout le bilan avec le patient et l'enverrait ensuite à l'ophtalmologue qui le validerait électroniquement."
Les spécialistes libéraux ne restent pas les bras croisés face aux risques de la désertification médicale et tentent d'améliorer les conditions d'exercice de leurs professions. Mais le chemin est encore long avant de retrouver des délais raisonnables pour tous les patients.
► Retrouvez l'enquête de région dont est extrait le reportage dans son intégralité