D'ici à 2050, les communes françaises ne pourront plus artificialiser de nouveaux espaces sans en redonner autant à la nature. Dans l'objectif d'atteindre zéro artificialisation des sols, pour lutter contre le changement climatique, la réutilisation des friches industrielles se présente comme une alternative majeure, notamment dans le Seuil du Poitou.
Au bord de la route nationale 10, qui traverse la Vienne, des dizaines d'enseignes sont en sommeil depuis une dizaine d'années. La nature commence à reprendre ses droits, sur les parkings et à l'intérieur des bâtiments. À Dissay, un magasin de meubles de 4 900 m², fermée en 2005, fait partie de ces belles endormies.
Objectif "zéro artificialisation" d'ici à 2050
Aujourd'hui friche industrielle, cette ancienne boutique fait partie des 143 friches identifiées par le Smasp (Syndicat mixte pour l’aménagement du Seuil du Poitou). 81 d'entre elles ont été diagnostiquées aptes à la réhabilitation. Une aubaine pour cet organisme, qui vise à réduire drastiquement ses zones industrielles et commerciales.
"C'est mieux pour l'image du territoire, pour ses habitants, pour ses acteurs économiques. C'est aussi de la sobriété foncière" ajoute Michel François, maire de Dissay et vice-président de Grand Poitiers.
Les communes doivent ne plus artificialiser leurs espaces d'ici à 2050. Elles appliquent un des principaux objectifs de la loi Climat et résilience, promulguée en 2021, nommé "zéro artificialisation nette".
Pour réhabiliter ces friches, il faut connaître leur degré de pollution. L'ancien magasin de meubles est scanné de fond en comble par des spécialistes des sites et des sols pollués. Pierrick Maura, président du cabinet nantais Nextim, "cherche des polluants en plomb et de l'amiante, qui sont dangereux pour la santé".
À l'intérieur aussi, certains revêtements de sols de ce bâtiment interrogent Claire Bacquet, chargée d'études des sites et sols pollués pour la société SCE Aménagement & Environnement. "Des sondages et des prélèvements vont être faits pour analyser la terre, afin de déterminer s'il y a eu un impact ou non".
Plus de 8 000 friches en France métropolitaine
À Chasseneuil-du-Poitou, tout près de Poitiers, une ancienne friche a récemment été réhabilitée. La société Forsee Power occupe les lieux depuis cinq ans, et y fabrique des batteries pour véhicules lourds. "Aucune démolition n'a eu lieu sur ce site, précise Olivier Boussais, directeur général de la Sep (Société d'équipement du Poitou). À part le bâtiment construit de 2 000 m², le reste est entièrement réhabilité".
Un peu plus loin, sur une seconde parcelle du même site, une partie de l'usine précédente est encore en friche. Elle doit faire l'objet de travaux de dépollution, car certains gaz sont restés emprisonnés dans les sols. Afin de les réintégrer dans la terre, des techniciens vont mélanger ces déchets à de la chaux. À la fin de cette opération, ce hangar sera considéré comme sain et prêt à l'emploi.
Sur le territoire national, plus de 8 500 friches industrielles ont été recensées par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cérema), à la demande du ministère de la Transition écologique.
Reportage d'Anne-Marie Baillargé, Stéphane Hamon, Marcel Dubois et Philippe Ritaine (paru le 25/09/2023) :