Nathalie Kosciusko-Morizet souhaite changer le mode de scrutin à Paris en instaurant un suffrage universel direct. Manoeuvre tactique à dix mois des éléctions municipales ou volonté de simplifier une procédure complexe ? Decryptage.
Comme New York ou Londres.
C'est l'argument avancé par Nathalie Kosciusko-Morizet pour changer le mode de scrutin à Paris. Celui de la modernité. Elle propose l'instauration du suffrage universel direct pour désigner le maire de Paris. En clair que les partis présentent une liste pour l'ensemble de la capitale au lieu d'avoir seulement des listes dans chacun des 20 arrondissements de la capitale comme c'est le cas actuellement dans le cadre de la loi PLM. (voir encadré)
Dans l'absolu, la question mérite d'être posée. Il suffit de discuter autour de soi pour réaliser que tout le monde n'est pas à 100% au point sur le mode électoral à Paris, même si les grandes lignes sont comprises.
Pour Pascal Cherki, maire PS du XIV ème, les habitants restent attachés à leurs arrondissements
Mais à 9 mois du scrutin, un telle proposition n'est pas dénuée d'arrières-pensées politiques.
L'UMP est persuadée, non sans fondement, que le scrutin par arrondissement avantage la majorité en place et donc la gauche qui en dirige 12 contre 8 à la droite. Les arrondissements seraient autant de petites baronnies où se développeraient le clientélisme. L'avantage au maire sortant, réel lors des municipales, joueraient à plein.
Suffisamment en tout cas pour amoindrir un éventuel vote sanction contre la politique de François Hollande surtout que dans la capitale les positions dans les arrondissements pourvoyeurs de conseillers de Paris sont très tranchées.
A contrario, Nathalie Kosciusko-Morizet estime qu' en cas de duel direct face à Anne Hidalgo sa campagne aurait plus d'impact en raison de sa personnalité et de sa notoriété. Ce qui fait dire à Ian Brossat, président du groupe Front de gauche, "qu'elle se trompe d'élections en voulant calquer le scrutin municipal sur celui de la présidentielle".
NKM sait pertinement que le proposition de loi déposée n'a aucune chance d'aboutir. Mais, cela lui permet d'insinuer qu' Anne Hidalgo a peur des élections, argument déjà développé à l'occasion de la primaire UMP alors que la gauche n'en a pas organisé. Une façon de rappeler en filigrane que la première adjointe à la mairie de Paris a toujours perdu dans le XV ème, même si elle a réduit progressivement l'écart dans cet arrondissement ancré à droite.
C'était aussi une façon de mettre la pression sur le gouvernement alors qu'il doit présenter une nouvelle loi d'içi juillet sur la répartition des sièges de conseillers de Paris. Le conseil constitutionel a jugé recevable le recours déposé par l'UMP en avril. Le parti de Jean-François Copé estimait que le nouveau découpage enlevant 3 conseillers de Paris aux arrondissements de droite lui était défavorable. Le ministre de l'intérieur Manuel Valls "a pris acte de la décision et s'est engagé à légiférer dans les plus brefs délais pour proposer une nouvelle répartition".
En attendant, Anne Hidalgo et Nathalie Kosciusko-Morizet s'accusent mutuellement de "tripatouillages" et de "manoeuvres tacticiennes". 2lement de langage chez les socialistes parisiens: "après avoir changé les règles du jeu pour la primaire UMP, NKM veut changer celles du scrutin parisien".
Reste que la répartition des conseillers de Paris va changer. Le conseil constitutionnel estime que les arrondissements du centre sont trop représentés par rapport à leur population. Une hypothèse de travail préconisait de fusionner les 1,2, 3 et 4 ème arrondissements. Une solution qui n'a eu l' assentiment de personne parmi les élus parisiens.
A cette vision malthusienne, David Alphand, élu UMP préférerait qu'on augmente le nombre de conseillers de Paris d'une dizaine d'unités pour correspondre à l'accroissement de la population de la capitale.
Ce débat est stratégique et très politique, car en cas de scores très serrés l'an prochain, la répartition géographique des conseillers de Paris aura un rôle à jouer.
Lors des élections de 2001, la droite était majoritaire en voix dans la capitale mais c'est la gauche qui avait la majorité des sièges ayant fait de bons scores dans les gros arrondissements.
Et c'est Bertrand Delanoë qui avait été élu, vérifiant l'adage de tout bon spécialiste de la carte parisienne : "mieux vaut faire 50,1% dans le 15 ème que 100% dans le 1er"
Quel est le mode de scrutin en vigueur à Paris ?
Le système électoral de Paris est régi par la loi PLM de 1982.
L'échelon territorial n'est pas la commune mais l'arrondissement. Les élections municipales se déclinent au pluriel dans la capitale, car en fait il s'agit de vingt élections concomitantes dans chacun des arrondissements.
Les partis présentent des listes dans chaque arrondissement (on n'est pas obligé de présenter des listes dans tous les arrondissements). Et en fonction du score dans l'arrondissement, les listes se répartissent le nombre de conseillers de Paris. Ceux-çi au nombre de 163, élisent ensuite lors de la première réunion du conseil municipal le maire de Paris.
Le nombre d'habitants de l'arrondissement détermine le nombre de conseillers de Paris. Ainsi le 2 ème arrdt envoie seulement 3 conseillers de Paris à l'Hôtel de Ville, alors que le 15 ème, le plus peuplé de la capitale, en fournit 17.
Cette règle mathématique explique qu'en 2001, alors que la droite était majoritaire en voix dans la capitale, c'est la gauche qui avait emporté la mairie de Paris parce qu'elle avait fait de bons scores dans les arrondissements les plus peuplés.
Aujourd'hui la répartition est la suivante.
La gauche détient 12 arrondissements: 2e, 3e, 4e, 9e, 10e, 11e, 12e, 13e, 14e, 18e, 19e, 20e
La droite détient huit arrondissements: 1 er, 5e, 6e, 7e, 8e, 15e, 16e, 17e