Convoqué ce mardi matin à Evry par les juges d'instruction chargés d'enquêter sur la catastrophe ferroviaire de Brétigny, Réseau ferré de France (RFF) a été mis en examen pour "homicides involontaires", en attendant la comparution de la SNCF jeudi.
Cette mise en examen, étape "logique" de la procédure selon une source judiciaire, intervient un peu plus de quatorze mois après le déraillement d'un train Paris-Limoges qui avait fait sept morts et des dizaines de blessés, le 12 juillet 2013.
Comme le soulignent les deux entreprises, les convocations, reçues fin juillet, s'adressent aux sociétés en tant que personnes morales, et non à leurs dirigeants.
Dès l'ouverture de l'instruction par le parquet d'Evry, les deux sociétés avaient prévu ces mises en examen et elles ne devraient pas faire appel. Selon Jacques Rapoport, l'étape, "évidemment pénible" mais "importante et logique", permettra à RFF d'avoir "accès au dossier" pour "mieux comprendre ce qui s'est passé". "Dans tous les grands accidents, l'entreprise est mise en examen, c'est une étape classique de la procédure", assure-t-il. "Ce n'est pas une surprise."
La SNCF doit comparaître jeudi
Une fois mis en examen, RFF et la SNCF auront notamment accès au fameux rapport des experts judiciaires, qui avait sévèrement mis en cause les règles de maintenance. Les experts avaient conclu que le basculement d'une éclisse était à l'origine du déraillement du train. Le 12 juillet 2013, cette sorte d'agrafe métallique reliant deux rails était allée se loger dans l'aiguillage au passage du train Intercités n°3657.
Anticipant les mises en examen, la principale association de victimes a exprimé ses regrets que la qualification de "mise en danger de la vie d'autrui" ne soit pas retenue. "Pour nous, ce n'est pas une maladresse, c'est un déficit de maintenance qui a causé le déraillement. On va voir comment ils vont s'expliquer", déclare Thierry Gomes, président de l'association "Entraide et défense des victimes de la catastrophe de Brétigny", qui a perdu ses parents dans l'accident.
L'enjeu est maintenant de savoir si RFF et la SNCF vont demander une contre-expertise. "S'ils la demandent, on repart de zéro et cela pourrait prolonger l'instruction de 18 mois", estime Stéphane Gicquel, président de la Fenvac, la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs.
La mise en examen des personnes morales est courante après les accidents impliquant des véhicules de transport. Dans la collision entre un car scolaire et un TER à Allinges (Haute-Savoie) qui avait tué sept collégiens âgés de 11 à 13 ans en 2008, la SNCF et RFF avaient également été mis en examen et condamnés à des peines d'amende pour homicides et blessures involontaires.
Depuis le drame, les deux entreprises, qui seront réunies à partir de janvier dans un groupe public, jouent la carte de la transparence et assurent avoir placé la sécurité ferroviaire en tête de leurs priorités.
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