École normale supérieure, Polytechnique, CentraleSupélec… Des enquêtes ont récemment été ouvertes dans plusieurs établissements prestigieux situés sur le campus en Essonne.
Quatre grandes écoles sont concernées : CentraleSupélec, l'École Normale Supérieure (ENS), l'École Polytechnique (souvent surnommée "l'X") et l'Institut d'optique. Le parquet d'Évry a annoncé vendredi avoir ouvert plusieurs enquêtes pour viol dans des établissements du plateau de Saclay, après avoir reçu "plusieurs plaintes".
"La parole s'est libérée" dans "des lieux clos où il était difficile de parler et de se faire entendre car il fallait préserver la réputation des établissements", se félicite Caroline Nisand, la procureure de la République. Parmi ces affaires, trois ont été confiées à des juges : une à CentraleSupélec et deux à l'ENS.
Pour ce qui est des plaignantes, qui dénoncent des faits récents ayant eu lieu au cours des dernières années, elles sont toutes étudiantes. Les soupçons portent sur d'autres étudiants : il n'y a pas, "à cette heure, de rapport d'autorité" entre les plaignantes et les suspects, indique la magistrate.
La procureure souligne "une dynamique" de libération de la parole qui a contribué à "briser l'autocensure" et à "lever l'omerta qui régnait sur le campus" de Saclay. "Il est encourageant que les victimes osent parler et porter plainte. C'est à la justice de faire son travail", réagit de son côté l’École Polytechnique.
Une libération de la parole liée à la diffusion de questionnaires internes
Caroline Nisand estime que la parole a pu se libérer à partir de la diffusion d'un questionnaire interne de l'école d'ingénieurs CentraleSupélec, qui avait révélé une centaine de faits de harcèlement sexuel, d'agression sexuelle et viol sur l'année universitaire. Les résultats de cette enquête interne avaient été signalés par la direction de l'école à la procureure d'Évry, qui avait alors ouvert une enquête préliminaire en octobre 2021.
Accompagnée des gendarmes, la magistrate s'était rendue dans l'établissement pour un échange avec les étudiants, réunis dans un amphithéâtre comble. "Les résultats de cette enquête nous ont sidérés", avait expliqué le directeur de l'école. "Si nous sommes engagés de longue date dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, nous étions loin d'en prendre l'exacte mesure", avait-il ajouté.
Deux enquêtes sont désormais en cours à CentraleSupélec, suite à deux plaintes pour viol. L’une est dirigée par le parquet, l'autre a été confiée à un juge d'instruction.
A Polytechnique, une étudiante sondée sur quatre dit avoir été victime d'agression sexuelle dans sa scolarité
Des révélations similaires avaient marqué Polytechnique, où la direction, "sous le choc", avait signalé à la justice les résultats d'un questionnaire interne. Selon ce questionnaire, une étudiante sondée sur quatre disait avoir été victime d'agression sexuelle dans sa scolarité et onze élèves disaient avoir été victimes de viol ou tentative de viol.
En avril, le parquet avait ouvert une enquête. Le parquet d'Évry compte à ce jour trois enquêtes préliminaires en cours, à la suite de deux plaintes pour viol à Polytechnique et d'un signalement.
Deux enquêtes à l'École normale supérieure (ENS) ont également été confiées, début juin, à des juges pour viol et agression sexuelle, à la suite de deux plaintes. Quant à l'Institut d'Optique, une enquête préliminaire est en cours à pour viol et agression sexuelle.