Il n'y avait pas eu de recherches dans cette zone des Hauts-de-Seine depuis le XIXe siècle. Les archéologues ont trouvé des silex taillés par l'Homme de Néandertal ainsi que des restes d'une défense d'un éléphantidé qui pourrait être un mammouth.
Il y a longtemps, des dizaines de milliers d'années, l'Homme de Néandertal et des animaux s'abreuvaient dans la Seine. Difficile d'imaginer cela aujourd'hui, mais c'est ce que viennent confirmer des fouilles effectuées par des archéologues de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) à Clichy-la-Garenne dans les Hauts-de-Seine.
"Les anciennes carrières de Clichy-Levallois n'avaient jamais été revisitées depuis le XIXe siècle, c'est assez important pour la préhistoire", explique ainsi Sophie Clément, responsable des recherches archéologiques à l'Inrap.
Un site prometteur dans lequel les chercheurs espéraient trouver des éléments. Ils ont été récompensés puisque les restes d'une défense d'un éléphantidé ont été retrouvés, il pourrait s'agir d'un mammouth ou d'un éléphant préhistorique mais l'état de la défense ne permettra pas forcément de répondre à la question.
Des objets très bien conservés de Néandertal
Sur le lieu de recherche (où doivent être construits des immeubles d'habitation) qui mesure 80 mètres de long sur 15 mètres de large, 21 pièces de silex ont aussi été retrouvées attestant de la fréquentation des lieux par l'Homme de Néandertal. "Ils sont en très bon état, c'est étonnant. Cela veut dire que l'on pourra faire des analyses dessus pour savoir à quoi ils ont servi. Sur les outils préhistoriques, ce que l'on cherche en premier, c'est le tranchant : couper, racler, scier. À Clichy, ils sont particuliers, ils ont été taillés selon la 'méthode Levallois'", indique cette archéologue.Cette méthode a été définie au XIXe siècle à Levallois, lors des précédentes fouilles du XIXe siècle. Elle montre que Néandertal prédéterminait l'éclat selon la taille et la forme de l'outil. "Le fait qu'ils aient une certaine standardisation, et pour eux des critères incontournables, montrent une maitrise de la technologie plus évoluée que ceux qui étaient là avant. En résumé, ils vont prendre un bloc pour le sculpter dans un certain volume pour à la fin, détacher un seul et unique éclat, qui aura une forme qu'ils ont prédéterminé à l'avance, liée au volume qu'ils ont sculpté", raconte Sophie Clément.
Des périodes où la calotte glacière atteignait la Belgique
Trois ensembles ont été repérés sur le site. Sous 4 mètres de remblais contemporains, elles permettent d'avoir un aperçu de l'environnement du XIXe siècle à la préhistoire.La période étudiée est, à ce stade des recherches, très large. Elle va de 40 000 ans à 350 000 avant notre ère : "Dans des niveaux plus anciens, nous avons trouvé des os de bisons et de chevaux, mais sans vraiment d'éléments anthropiques, c'est-à-dire transformés par l'Homme. Nous allons voir s'il y a des traces de boucherie, si ces animaux ont été amenés par eux. Dans des niveaux plus anciens, il y a les objets en silex et de la faune que l'on n'a pas réussi à identifier encore", poursuit l'archéologue.
Il faut ainsi imaginer différentes phases glacières et interglacières qui se succèdent durant ces millénaires. Les premières font descendre la calotte glaciaire jusqu'en Belgique et les paysages ressemblent à des steppes froides alors que durant les secondes, ils ressemblent à celui d'aujourd'hui avec un climat tempéré.
Malheureusement pour les archéologues, aucun fragment d'os de Néandertal n'a été retrouvé. "On sait que c'est rare mais cela faisait partie des potentiels. Il y a des ossements humains qui avaient été trouvés à quelques centaines de mètres", conclu Sophie Clément. Deux ans seront nécessaires pour tirer toutes les enseignements de ces fouilles.