Le tribunal de grande instance de Paris examine un référé à l'encontre du fournisseur d'accès de Copwatch
Le site internet Copwatch doit-il être interdit?
Le tribunal de grande instance de Paris examine un référé à l'encontre du fournisseur d'accès de Copwatch
Le tribunal de grande instance de Paris examine aujourd'hui la plainte déposée par le ministre de l'Intérieur contre le site Copwatch qui dit "lutter contre les violences policières".
Claude Guéant réclame le retrait de certaines pages jugées diffamatoires et même dangereuses de ce site. Le tribunal, statuant en référé, rendra sa décision vendredi à 17 heures.
Les explications de Patrick Ferrante et Frédérique Bobin
Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, et le syndicat de police Alliance ont demandé mercredi à la justice d'interdire l'accès à une dizaine de pages du site Copwatch, qui selon eux représente "une menace potentielle immense" pour les policiers et les gendarmes qui y sont fichés.
Oeuvre d'un "collectif de citoyens souhaitant lutter par la transparence et l'information contre les violences policières", le site internet Copwatch-Nord-Ile-de-France publie des photos de policiers et de gendarmes, parfois leurs noms, à qui il attribue des propos et auxquels il donne des appréciations.
Pour le ministère de l'Intérieur et Alliance, qui s'est ému le premier de cette pratique, l'heure est grave, car l'un des 450 policiers rendus identifiables grâce à Copwatch a reçu récemment "une cartouche de chasse dans sa boîte aux lettres".
Selon Me Delphine des Villettes, qui défend le deuxième syndicat des gardiens de la paix, "les policiers sont extrêmement inquiets de ce type de site et de ces pratiques qui tendent à se développer alors qu'une frange de la population est animée d'une haine anti-flic."
A ses yeux, "c'est faire peser sur eux une menace potentielle immense", car "il y a implicitement presque un appel à aller commettre des violences contre des policiers".
Mercredi, seuls les fournisseurs d'accès (France Télécom, Free, SFR, Bouygues Télécom, Numericable et Darty Télécom) étaient assignés en référé devant le tribunal de grande instance de Paris.
Pourquoi? Tout simplement, ont expliqué les avocats du ministre, Mes Benoît Chabert et Franck Thevenin, car il est "impossible d'identifier de façon certaine l'hébergeur de ce site", qui a multiplié les précautions pour s'assurer la discrétion.
"En aucun cas, le ministre ne demande la censure" du site, a assuré Me Chabert, il n'y a aucune volonté de "museler", mais quand "brusquement, on voit apparaître des liens, avec le nom, l'adresse et éventuellement le numéro de matricule du policier, que fait le ministre? Quelle que soit sa couleur politique, il se lève pour défendre ses troupes."
Concrètement, l'avocat demande "la suppression des pages où mention est faite des liens internet permettant d'avoir accès aux données personnelles".
Face à lui, les fournisseurs d'accès ont tous assuré que de telles mesures étaient techniquement impossibles. Le ministère se tromperait surtout de cible.
Car les fournisseurs d'accès ne sont ni hébergeurs de contenu, ni éditeurs, ont-ils rappelé. "Nous ne sommes qu'un intermédiaire technique", a ainsi martelé Me Alexandre
Limbour pour France Télécom. "Nous ne sommes pas les pollueurs. Nous sommes des sociétés qui via un réseau donnent accès à un monde dont on ne connaît pas les limites", a-t-il ajouté, rappelant être "aussi éloigné que le ministère de l'Intérieur du site Copwatch".
Les fournisseurs d'accès considèrent en outre qu'il ne leur revient pas d'assumer le coût d'un éventuel blocage.
"Si on demande au ministre de payer le coût d'une telle opération, ça veut dire qu'elle est possible", n'a pas manqué de relever Me Chabert. Le ministère public, représenté par Pauline Caby, est pourtant venu en soutien aux fournisseurs d'accès, jugeant "inconcevable que la charge financière soit supportée" par eux. En effet, a-t-elle pointé, "ils n'ont évidemment commis aucune faute et ne tirent aucun bénéfice du site incriminé".
C'est "légitimement que le ministre a dirigé son action envers les fournisseurs d'accès", a-t-elle reconnu en invoquant la loi de 2004 sur l'économie numérique, seulement a-t-elle mis en garde, "les difficultés (techniques, ndlr) ne doivent pas être rejetées d'un revers de manche".
Réponse du tribunal, vendredi à 17H00.