Comment réagir quand on est témoin ou victime de harcèlement de rue ? Le programme Stand-Up, soutenu et déployé par la Fondation des Femmes, propose sur internet des formations gratuites pour faire face à ces situations.
Un regard un peu trop appuyé, un clin d’œil, un sifflement ou un geste déplacé dans un métro bondé... Selon un sondage* 81% des femmes en France ont déjà été victimes de harcèlement sexuel dans les lieux publics et 100 % dans les transports en commun. (*Enquête internationale sur le harcèlement sexuel dans l'espace public mené par L’Oréal Paris et Ipsos en mars 2019)
Témoins et victimes
"Toutes les femmes quels que soient leur âge, leurs origines, leur milieu social ont été victimes de harcèlement de rue", explique Clémence Garnier-Juste, Responsable du programme Stand-up à la Fondation des Femmes, organisme qui lutte contre les violences faites aux femmes et qui apporte un soutien financier et juridique aux associations féministes.
"Partout, dans la rue, dans le métro, dans l’espace public", témoigne Angela âgée de 31 ans. "J’ai été victime de harcèlement de rue plein de fois. Pendant très longtemps et avant le mouvement Metoo, j’ai accepté ces situations. On ne réagit pas, sidérée. Je me faisais embêter dans la rue ou alors on se collait à moi dans le bus et je me disais, c’est normal, il faut juste attendre que le moment passe. On se dit que c’est cela l’espace public pour une jeune femme," poursuit Angela.
Témoin ou victime, difficile de savoir comment répondre. Ne rien dire, détourner le regard, faire comme s’il ne se passait rien, attendre que cela passe. Réagir violemment au risque d'envenimer la situation ? En jeu : beaucoup, son intégrité physique, sa dignité ou son estime de soi.
86 % d’entre nous ne savent pas quoi faire face à une situation de harcèlement sexuel dans les lieux publics. Et 87 % d’entre nous trouvent risqué d’intervenir, confirme le sondage.
Déléguer, diriger, documenter, distraire, dialoguer : les 5 D du programme Stand-Up
A l'occasion de la semaine internationale contre le harcèlement de rue, la Fondation des Femmes a décidé de s'attaquer à ces actes sexistes en déployant en France le programme Stand-UP créé par l’ONG américaine Hollaback et l'Oréal Paris. Elle propose sur son site deux formations en ligne gratuites l’une de 10 minutes, l’autre d’un heure sur inscription.
Les formations sont basées sur la méthodologie des 5 D : déléguer, diriger, documenter, distraire, dialoguer. Des modules vidéo décryptent des situations concrètes de harcèlement et proposent différents comportements et réactions à adopter pour y faire face, en tant que témoin ou victime.
"Distraire, par exemple quand on est témoin d'un comportement de harcèlement, c’est faire semblant de connaître la personne qui se fait harceler. Tiens Laura ! Ca fait longtemps que je t’ai pas vue ! Comment vas-tu ? Ainsi on casse la dynamique d’emprise sur la victime et cela permet bien souvent de désamorcer la situation. Le harceleur décontenancé stoppe ou alors la victime, se sentant soutenue retrouve l’énergie nécessaire pour répondre à l’agresseur et lui dire laissez-moi tranquille", détaille Clémence Garnier-Juste.
"La formation permet d’adopter des comportements pour se sortir de ces situations sans se mettre en danger. Elle donne des clés pour se protéger et pour pouvoir aider d’autres personnes. C’est une boîte à d’outils", atteste Angela qui a suivi le module de formation d'une heure.
"J’ai souvent été victime de harcèlement de rue et je voulais apprendre à mieux réagir. J’y suis allée en pensant savoir pas mal de choses. J'avais tendance à répondre à mon agresseur et cela ne m’a pas toujours aidée. Le fait de répondre comme je le faisais pouvait m’attirer plein de problèmes. J'ai découvert qu’il y avait d’autres alternatives en restant en sécurité," explique Emma, une jeune francilienne qui prend souvent les transports en commun. Et de poursuivre : "A la suite de cette formation, je suis ressortie avec beaucoup de clés pour appréhender ces situations aussi bien en tant que témoin que victime. Et puis parler, poser des mots, éviter les tabous, déconstruire, c’est nécessaire et ça fait du bien", conclut-elle.
Depuis le lancement du programme, plus de 45 000 personnes ont été formées. Des créneaux de formations sont mis en ligne chaque semaine. Inscription sur le site de la Fondation des Femmes.
#regardemoiBien
Jeudi 15 avril, ce hastag pourrait bien devenir viral. La Fondation des Femmes lance une campagne sur Instagram avec pour mot-dièse : #regardemoiBien. Elle invite des femmes, des influenceuses et tout un chacun à poster ce jeudi des photos de tenue vestimentaire de leur choix. Objectif : assumer et revendiquer la liberté de s'habiller à sa guise sans être harcelé. "Ce n’est pas à nous de changer de tenue mais aux autres de changer de regard" , pourra-t-on lire dans un texte.
Un sondage* plus récent montre que 61% des femmes préfèrent adapter leur tenue vestimentaire pour se sentir en sécurité dans l'espace public et que 71% d'entre elles disent éviter certains lieux (*Sondage mené par L’Oréal Paris et Ipsos en mars 2019).
"Nous voulons mettre en lumière cette notion de culpabilité des femmes qui ne portent plus tel ou tel vêtement, qui s'interdisent d’aller dans tel ou tel endroit. Non, Ce n’est pas aux femmes de changer de tenue ou de culpabiliser. Aux harceleurs d’arrêter de harceler et aux témoins de réagir", affirme la Responsable du programme Stand-up à la Fondation des Femmes.