Les policiers entendus au procès d'un homme de 25 ans jugé pour une rixe mortelle près de la gare de Lyon à Paris en avril 2009 ont confirmé lundi que le jeune de 17 ans qui a perdu la vie avait eu un rôle de "pacificateur".
Entendu par la cour d'assises de Paris, le directeur d'enquête a expliqué que la victime, un lycéen, n'était pas connu des services de police, décrit comme "plutôt sympa", "calme". "Voyant que ça tournait au massacre, il a essayé d'écarter" l'accusé "de ses agresseurs", qui étaient en supériorité numérique.
La bagarre avait éclaté pour une raison futile : les moqueries subies par un des copains de l'accusé après une chute à Vélib. Les deux groupes, celui de l'accusé venant d'Athis-Mons, et l'autre, plusieurs dizaines de jeunes venant d'Aulnay-sous-Bois, s'étaient croisés fortuitement aux abords de la gare, chacun attendant un car ce 14 avril 2009 peu avant 4H00 du matin.
Un autre policier a confirmé que la victime, Mahmadou, était "l'un des seuls jeunes d'Aulnay qui tentait de mettre fin à la bagarre" et de séparer les protagonistes. "Pour tout le monde, c'est quelqu'un qui a essayé de s'interposer et de calmer le jeu entre les deux groupes", a poursuivi l'enquêteur.
L'un des amis de la victime, Moussa, lui-même blessé au dos par un coup de couteau, a livré une version inédite, affirmant que Mahmadou avait ceinturé l'accusé dans la première phase de la rixe "pour éviter qu'il se prenne des coups". "Je me suis défendu", "je me suis enfui", a assuré ce dernier, prénommé Kamel.
D'allure fluette et sage, les cheveux plaqués avec du gel, il a assuré qu'il ne voulait "pas toucher qui que ce soit". Blessé, le nez cassé, alors que l'on tentait de lui voler les écouteurs qu'il avait sur les oreilles, il a affirmé pendant l'enquête avoir sorti son couteau à cran d'arrêt pour faire peur à ses agresseurs alors qu'il se sentait acculé, rattrapé dans sa fuite, en faisant de grands gestes circulaires. Son avocat invoque la légitime défense.
Le médecin légiste qui a autopsié Mahmadou, atteint d'un coup de couteau en plein coeur, a expliqué devant la cour que le récit de l'accusé est compatible avec ses constatations.
Le mouvement de balayage décrit par l'accusé laisserait supposer que la victime se trouvait perpendiculairement à lui, selon l'expert. Témoignant entre deux gendarmes car il est détenu dans une autre affaire, Steevy, le deuxième jeune à avoir été blessé à coup de couteau, bien plus costaud que l'accusé, a affirmé que celui-ci a "dit qu'il voulait poignarder quelqu'un". Questionné par l'avocat de l'accusé, Me Frank Natali, il n'a pas su expliquer pourquoi le groupe d'Aulnay n'avait pas laissé partir le groupe d'Athis-Mons. Répondant à l'avocate générale, il a concédé que le groupe d'Aulnay, qui avait
voulu se rendre à une soirée finalement annulée à Juvisy-sur-Orge (Essonne) et s'était fait chasser par d'autres jeunes, sans lien avec ceux d'Athis-Mons, avec qui ils avaient eu maille à partir, avait été échaudé par cet incident. Ce qui pourrait expliquer selon lui que la situation ait dégénéré plus tard près de la gare de Lyon. Le verdict, initialement prévu vendredi, pourrait intervenir jeudi.
