Dernier jour de tranquillité pour des milliers de familles menacées d'expulsion de leur logement. La trêve hivernale prend fin ce dimanche 31 mars au soir, après cinq mois d'interruption.
Pendant cette "trêve" qui courait depuis le 1er novembre, un locataire ne pouvait pas être expulsé de son logement, sauf si un relogement décent était prévu pour lui et sa famille ou si les locaux faisaient l'objet d'un arrêté de péril. Des procédures d'éviction ont toutefois pu être lancées.
A 81 ans, Monique a déjà reçu la visite des huissiers dans son appartement parisien qu'elle ne peut plus payer. Avec une dette locative de 50.000 euros, cette retraitée qui vit avec 1.200 euros par mois pour un loyer de 900 euros avoue "ne plus dormir". "Je m'enfonce", dit-elle, en racontant son "angoisse" de se retrouver à la rue. "Je me mettrais sur un banc et j'attendrais", imagine-t-elle.#FRATERNITÉ
— FondationAbbéPierre (@Abbe_Pierre) 31 mars 2019
Plus de 30 000 personnes expulsées en 2017, combien cette année ? ?
Pour dénoncer cette situation inacceptable et présenter ses propositions, la Fondation a organisé ce matin une action coup de poing devant le ministère du Logement.
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Record d'expulsions
En 2017, 126.000 décisions d'expulsion ont été prononcées, dont plus de 120.000 pour impayés locatifs (+49% depuis 2001), selon le dernier bilan annuel de la Fondation Abbé Pierre (FAP).La même année, 15.547 ménages ont été expulsés avec le concours de la force publique, dernière étape si aucune solution n'est trouvée. "Un record historique", déplore la FAP. "La multiplication des expulsions entre en contradiction avec la politique du 'Logement d'abord' affichée par le gouvernement", estime la Fondation, en référence au plan de l'exécutif qui vise à favoriser l'accès direct au logement très social.
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Trouver des solutions de relogement
Samedi, des personnes menacées d'expulsion ou qui ont subi une expulsion ont manifesté à Paris à l'appel de "gilets jaunes" et de l'association Droit au logement (DAL).Dénonçant "la flambée de loyers", "la spéculation immobilière", "la précarité énergétique", cumulées à "une baisse du pouvoir d'achat des classes populaires et moyennes", les associations exigent que plus aucune expulsion ne se fasse sans solution de relogement.
Elles insistent également sur la nécessité de construire massivement des logements sociaux accessibles aux petits revenus et demandent l'encadrement des loyers dans les grandes métropoles.
Des hébergements d'urgence fermés
La fin du mois de mars marque aussi la fermeture des places d'hébergement ouvertes pendant les mois d'hiver. Les associations estiment à au moins 8.000 le nombre de personnes risquant de se retrouver à la rue à partir de dimanche soir.Elles s'inquiètent aussi cette année de voir le phénomène amplifié par la possible remise à la rue de centaines de migrants en Île-de-France, si la transformation administrative de leurs centres d'hébergement d'urgence (CHUM) aboutit à les priver d'un lit.
Mercredi, le ministère du Logement a annoncé que 6.000 places supplémentaires ouvertes pendant l'hiver, dont 1.400 à Paris, seraient pérennisées, portant à 145.000 le nombre de places d'hébergement pour les sans-abri ouvertes toute l'année.