À l'occasion de la Marche des fiertés, focus sur le "A" de LGBTQIA+ : l'asexualité avec Anna Mangeot alias anna_inparis qui possède une chaîne dédiée à ce sujet sur TikTok.
Pour la première fois depuis sa création en 1977, la Marche des fiertés parisienne s'est élancée hors de Paris : de Pantin en Seine-Saint-Denis pour symboliser "un trait d'union qui se fait entre Paris et sa banlieue", rapporte Erwan Passey, président de Queer Pantin.
À cette occasion, France 3 Paris Ile-de-France pose 3 questions à Anna Mangeot, 22 ans, qui a créé sa chaîne TikTok anna_inparis et qui porte le combat de faire connaître l'asexualité avec ses 22 000 abonnés.
Pourquoi parler de l'asexualité et comment la définir ?
Cela fait six mois que je parle de l'asexualité, j'ai commencé en faisant mon coming out. Petit à petit, on a commencé à me poser des questions pour en savoir plus à ce sujet. J'y explique les différentes variations de la sexualité : ce qu'est être asexuel et comment on se construit en l'étant. Être asexuel, c'est une orientation sexuelle comme toutes celles que l'on connaît beaucoup plus sauf que ce n'est être attiré par personne, d'aucune façon. Sous ce mot d'asexualité, on peut ranger beaucoup de variations comme des personnes ayant un rapport au désir différent de la norme. Par exemple, les demi-sexuels ne seront jamais attirés par les personnes qu'ils ne connaissent pas et ne ressentiront pas de désir envers quelqu'un avec qui ils n'ont pas de relation émotionnelle. En somme, on va différencier l'attirance amoureuse de celle sexuelle, on peut tomber amoureux d'une personne mais on ne sera attiré sexuellement par personne.
Nous sommes une minorité sexuelle et il y a une lutte à faire pour nous donner de la visibilité. C'est une sexualité très peu connue, je pense que 99% des personnes qui sont asexuelles ne le savent pas et vivent en se forçant, en multipliant les rendez-vous chez les sexologues, les psychothérapeutes.
Pourquoi est-ce important pour les asexuels de participer aux Marche des fiertés ?
C'est important pour nous car les personnes asexuelles n'y sont pas représentées. Malheureusement au sein des communautés LGBTQIA+, les asexuels n'ont pas toujours leur place, n'y sont pas toujours acceptés. Il y a beaucoup de travail de pédagogie à faire, d'une part auprès des personnes sensibilisées LGBTQIA+ pour être mieux compris et d'autre part, pour se montrer aux yeux du monde.
Je m'en suis d'ailleurs rendue compte à la dernière pride (Une Marche des Fiertés Radicale "antiraciste et anticapitaliste" a eu lieu le 20 juin dernier, ndlr). La lettre "A" était très peu mise sur les slogans. Certains considèrent qu'étant donné que nous n'avons pas de vie sexuelle, nous n'avons pas notre place au sein des communautés. Puis il y a ce que l'on appelle l'acephobie. Beaucoup pensent que l'on n'a pas forcément notre place et que l'on ne souffre pas de discriminations contrairement à eux, ce qui est faux.
Par exemple, quand j'ai fait mon coming-out auprès de quelqu'un que je connaissais, elle m'a dit : "mais tu es en couple, je trouve cela très égoïste de ta part parce que forcément il est malheureux". C'est très violent. Une autre discrimination est que cela peut créer des situations très compliquées en couple. Car ne pas vouloir de relation sexuelle ou en vouloir peu n'est absolument pas banalisé. Généralement, on finit par se forcer et cela se rapproche plus ou moins d'un abus sexuel.
Quelle place ont eu les réseaux sociaux dans ce combat ?
TikTok est construit de façon à ce que l'on peut rapidement être vu par des centaines de milliers de personnes sans avoir de visibilité médiatique. En cela, c'est assez unique. Instagram ou Facebook ne sont pas faits pour cela. Puis il faut être préparé, certains ne sont bienveillants.
Cela a un impact que je n'aurais jamais cru possible. Quand j'ai fait mon coming-out, j'avais 500 abonnés sur Instagram. Très rapidement, j'ai été contacté par un média, on a fait un million de vues. Ensuite, j'ai été contactée par des centaines de personnes qui me remerciaient, qui me posaient des questions. J'ai commencé à prendre la parole sur TikTok et je reçois désormais une quinzaine de messages par semaines de personnes ayant entre 14 et 50 ans qui me disent que j'ai participé à un changement dans leur vie.
Aux personnes qui ne sont pas asexuelles, j'aimerais leur dire que je comprends tout à fait que l'on ne comprenne pas, que ce soit difficile d'imaginer une vie sans désir. On ne demande pas forcément à être compris mais surtout à être acceptés.