Ce jeudi, le Parquet de Paris a classé "sans suite" l'enquête ouverte pour "injures non publiques" visant un policier accusé d'avoir insulté une plaignante pour agression sexuelle. Une décision que l'avocat de la plaignante juge comme une démonstration de "l'indifférence du Parquet" face aux femmes victimes de violences.
Le parquet de Paris a classé sans suite l'enquête ouverte pour "injures non publiques" visant un policier accusé d'avoir traité de "pute" une plaignante pour agression sexuelle, a indiqué ce jeudi l'instance judiciaire. "La procédure ouverte du chef d'injures non publiques à caractère sexiste a été classée sans suite le 25 février", a précisé le parquet, confirmant une information de Mediapart. (Edition abonnés)
L'avis de classement que nous avons consulté précise que cette décision a été prise car "les faits ou les circonstances des faits de la procédure n'ont pas pu être clairement établies par l'enquête. Les preuves ne sont donc pas suffisantes pour que l'infraction soit constituée et que des poursuites pénales puissent être engagés ", a justifié le ministère public.
Selon Maître Arié Alimi, la plaignante est "sidérée par cette décision, mais reste déterminée à porter cette affaire devant un juge d'instruction".
La plaignante traitée de "pute" par le policier à plusieurs reprises
Début février, Mediapart avait révélé l'histoire de cette jeune femme de 34 ans qui avait déposé une première plainte dans la nuit du 4 au 5 février auprès de policiers du commissariat des Ve et VIe arrondissements de Paris pour "agression sexuelle en état d'ivresse".
Un policier de ce commissariat l'avait rappelée à la mi-journée et lui avait laissé un message vocal sur son répondeur pour lui demander de venir compléter sa plainte. Croyant avoir raccroché, on entend le fonctionnaire plaisanter avec une de ses collègues.
Il avait ironisé au sujet de la plainte en indiquant qu'elle n'avait "pas de sens". Il avait ensuite traité la plaignante de "pute" à plusieurs reprises.
"Cette décision révèle que le Parquet a pour objectif de protéger les puissants"
L'avocat de la plaignante Me Arié Alimi annonce qu'il déposera une plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction. "Nous saisissons cette entité qui est impartiale" a-t-il précisé.
À propos du classement sans suite de l'affaire, il a indiqué que celui-ci révélait "l'intention du Parquet de protéger les puissants". Il ajoute en outre que cette décision démontre "que cette instance n'a aucune volonté de protéger les femmes victimes de violences sexuelles, policières ou d'injures".
Concernant le manque de preuves avancé par le Parquet dans l'avis de classement, l'avocat réfute cet argument en arguant que les preuves dans ce dossier sont accablantes. "Il y a un enregistrement vocal de ce fonctionnaire qui insulte ma cliente devant des témoins.", s'indigne-t-il
Suite à cette affaire, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait estimé que ce policier n'avait "plus sa place" au sein de la police nationale.
Le préfet de police Didier Lallement avait lui aussi condamné "des propos inadmissibles" et annoncé avoir saisi la "police des polices" (IGPN) d'une enquête administrative et avait demandé la suspension du policier à titre conservatoire.
Cette affaire a également suscité de nombreuses critiques, notamment au sein des milieux féministes qui dénoncent régulièrement la mauvaise prise en compte par la police des victimes de violences sexuelles.
Dans un tweet publiée ce matin, l'association Osez le féminisme ! s'indigne également du traitement judiciaire.