Dans le 13e arrondissement de Paris, des citoyens suivent une formation en premiers secours en santé mentale. En France, 75 000 personnes ont déjà suivi ce programme d'enseignement qui leur permet d'adopter les bons gestes face à des personnes souffrant de troubles mentaux.
"On n'a pas su comment réagir ! On n'a pas su trouver des mots ! On n'a pas trouvé où aller !", Philippe, père de famille a vécu, confie-t-il, "des moments très compliqués (... ) des membres de ma famille ont été touchés par des troubles psychiques". Le stage de premier secours en santé mentale qu'il suit va lui apprendre, espère-t-il, à mieux aider à l'avenir ses proches.
Dans cette petite salle du centre de Paris Anim' VictoireTinayre, dans le13e arrondissement, onze personnes suivent durant deux jours, cette formation ponctuée d'enseignements théoriques, d'ateliers en petits groupes ou de jeux de rôles. Séverine Fix-Lemaire, formatrice et psychanalyste à Paris décrypte, décode les symptômes de comportements souvent très déroutants voire traumatisants. Attaque de panique, troubles psychotiques, de l'anxiété, de la dépression qui peuvent amener au suicide.
"Il faut déstigmatiser les troubles mentaux"
Premier objectif pour la formatrice Severine Fix-Lemaire : "déstigmatiser les troubles mentaux". Il y a vraiment "de la déconstruction à faire ( .. ) il faut que l'on arrête de dire : les fous, les malades ou celui-là, c'est un schizo. Il faut cesser d'utiliser des termes à la fois approximatifs, méprisants et condescendants", alerte-t-elle.
Comment approcher une personne, souffrante, évaluer son trouble, la réconforter, l'encourager à consulter un professionnel. La formation propose un plan d'intervention, une méthode d'accompagnement de personnes en état de souffrance mentale. "L'objectif pour les stagiaires n'est pas de poser des diagnostics et n'est pas non plus de remplacer les personnels de santé. Mais c'est de se dire : qu'est-ce que je peux faire moi en tant que citoyen", précise Sevérine Fix-Lemaire.
64% des Français ont déjà ressenti une souffrance psychique
En 2021, les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie organisées par les pouvoirs publics dressaient un constat édifiant de la santé mentale des Français. Selon un rapport du ministère de la Santé, 64% des Français ont déjà ressenti un trouble ou une souffrance psychique, 15% des jeunes en France ont connu un épisode dépressif caractérisé entre 16 et 25 ans. Le suicide est la deuxième cause de mortalité pour les 10-25 ans (après les accidents de la route). Les Français sont les plus grands consommateurs au monde de psychotropes.
Pour le ministère de la Santé et de la prévention, la formation PSSM, premiers secours en santé mentale est l'une des mesures clefs pour répondre à l’augmentation des troubles psychiques au sein de la société. L'objectif affiché : "atteindre les 150 000 secouristes formés en France en 2025". D’ores et déjà, 100 000 personnes ont suivi le stage premier secours organisé sur le territoire national par l'association PSSM.
L'organisme dont le siège est à Lyon, a été créé il y a cinq ans et la formation qu'il dispense a été conçue en Australie. "On pense que plus les citoyens français auront connaissance de ce qu'est la santé mentale, comment on en prend soin, plus on pourra proposer quelque chose d'utile en termes de prévention primaire", explique Stéphanie Rochedix, membre de PSM France. "On va bientôt déployer un module qui va s'appeler PSSM ado à destination des collégiens et des lycéens pour qu'ils puissent agir en premier secours dans leur entourage dans leurs établissements", annonce Stéphanie Rochedix.
"Ça casse les a priori !"
"Parfois on est pétri de bonnes intentions. Mais en réalité, on ne fait pas du bien forcément aux personnes." Selon Paméla, participer à ce stage permet "d'adopter une démarche citoyenne". Cette stagiaire est la recherche d'"une méthodologie", pour accompagner les personnes souffrantes.
"Bien comprendre les symptômes de troubles anxieux", c'est ce que souhaite également Lousia, sophrologue à Rueil-Malmaison dans les Hauts-de-Seine qui reçoit, dit-elle, beaucoup de clients anxieux ou dépressifs. "C'est intéressant de connaître les signes pour savoir comment faire baisser cette angoisse avant qu'elle ne monte en attaque de panique. J'arrive à faire comprendre à mes clients qu'ils doivent se faire suivre par un psychologue ou un psychiatre."
Avoir cette formation, c'est hyperassurant et ça casse les a priori !", assure un autre stagiaire. Ça change la perception sur notre entourage, constate Pamela. "Déjà hier, en rentrant en métro, je me suis dit en regardant un voyageur : 'cette personne n'est-elle pas en train de faire une attaque de panique ?' Je pense que cette formation va me changer, je vais porter une attention un peu plus intensive aux personnes qui m'entourent au travail et dans la vie de tous les jours."