Juger les étrangers au pied des pistes ? Le projet fait débat depuis des années, mais malgré la vive opposition d'avocats et d'associations qui dénoncent une "justice d'exception", une salle d'audience du tribunal de Bobigny délocalisée près de l'aéroport de Roissy, ouvre ce jeudi.
Au coeur de la zone de fret du deuxième aéroport d'Europe et à quelques mètres du tarmac, se dresse un petit bâtiment flambant neuf. A l'intérieur, deux salles d'audience : c'est là, dans cette annexe du tribunal de Bobigny, que sera désormais tranché le sort des étrangers arrivant d'un vol international et non-autorisés à entrer sur le territoire.
Les étrangers peuvent maintenus durant 20 jours
L'annexe est attenante à la plus grande zone d'attente (Zapi) de France, un vaste complexe entouré de grilles où sont conduits les étrangers non-admis. Absence de visa, de papiers en règles ou demandeurs d'asile, ils peuvent y être maintenus jusqu'à 20 jours dans l'attente d'une décision d'admission ou de refus. Quelques 5.500 étrangers sont concernés chaque année.
Un reportage d'Abdel Joudi et Gilles Bezou
Association et avocats en robes noires ont manifesté devant l'annexe en mai et octobre, dénonçant l'instauration d'une "justice d'exception", rendue "loin des regards" dans un bâtiment difficile d'accès, ce qui porterait atteinte aux grands principes: publicité des débats et droits de la défense.
Les opposants craignent aussi une atteinte à "l'impartialité" de la juridiction, du fait de la proximité entre salle d'audience et lieu d'hébergement, dans une enceinte placée sous l'autorité des policiers.