Police : la CSI 93 démantelée après une quinzaine d'enquêtes préliminaires

Six policiers de la Compagnie de sécurité et d’intervention de Seine-Saint-Denis ont été placés en garde à vue lundi pour violences, falsification de PV et détention de stupéfiants. Ils sont soupçonnés d'avoir racketté des dealers. Nous sommes allés les interroger. Reportage à Saint-Ouen. 

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Dans la cité Emile-Cordon de Saint-Ouen, haut lieu du trafic de drogue en Seine-Saint-Denis, tous les dealers ont déjà eu affaire à la compagnie de sécurité et d’intervention de Seine-Saint-Denis (CSI 93). Et à l’un de ses policiers en particulier, surnommé le "cancéreux". "On connaît tous le cancéreux, explique un jeune rencontré au pied d’un immeuble. Il frappe, il prend tout ce qu’il y a dans nos poches, 500, 1000, 2000 euros et il pense pas aux familles qu’il y a derrière. Tous ses collègues sont dans la sauce (NDLR : complices). Mais c’est lui le chef du camion." Un témoignage corroboré par un autre dealer du quartier. "Quand ils viennent, ils frappent tout le monde et prennent tout ce que tu as sur toi. Aulnay, Saint-Ouen, Saint-Denis, dans toutes les vraies villes du 93, ils sont connus. Un jour, le cancéreux est venu et il a attrapé plusieurs guetteurs de la cité. Il les a ramenés dans un bâtiment, il les a contrôlés et il a trouvé des pochettes de beuh. Il a dit à un guetteur, "tiens manges la pochette de beuh". L’autre a dit "non". Il a été roué de coups. Le guetteur, il a fini par manger sa pochette et après, il l’a recraché. Tout ça c’est réel mais si on va porter plainte, on va pas en tenir compte parce que c’est la police. Combien de fois les gens du quartier sont allés au commissariat et sont revenus gonflés (NDLR : avec des ecchymoses). C’est la police. On peut faire quoi ? Rien."

Une quinzaine d'enquêtes préliminaires ouvertes

Le 9 août dernier, un dealer a pourtant porté plainte pour acte de torture et de barbarie après son interpellation. Une intervention filmée par un riverain. Sur la vidéo, on y voit un policier lui donner des coups de poing au visage puis lui décocher un coup de pied dans la tête alors qu’il est à terre et maîtrisé. Une fois embarqué, l’homme d’une vingtaine d’années a ensuite affirmé avoir subi des décharges de pistolet à impulsion électrique sur ses parties génitales."Mon client a également porté plainte pour vol car l’argent qu’il avait sur lui a été dérobé", explique Maître Yassine Bouzrou qui regrette que l'enquête n'ait pas été confiée à un juge d’instruction mais à l’IGPN. "Les policiers étaient à plusieurs or un seul d’entre eux a été placé en garde à vue et est renvoyé le 5 novembre devant la justice. Il va être jugé en correctionnelle alors que cela relève de la cour d’assises. Car on parle de torture, de faux en écriture et d’extorsion… Le parquet de Bobigny protège ces policiers. Moi ce que je demande, c’est le dépaysement de cette affaire et l’ouverture d’une information judiciaire obligatoire en matière de crime." D’après cet avocat, aucun des policiers sur place ce jour-là n’a été suspendu. Pourtant, cette affaire n’est pas isolée.

Depuis un an, une quinzaine d’enquêtes préliminaires ont été ouvertes par l’IGPN concernant les agissements de certains fonctionnaires de cette compagnie, comme nous le confirme le parquet de Bobigny. "Il s'agit d'enquêtes pour violences, vols, falsification de PV et détention et transport de stupéfiants." Lundi, six policiers de la compagnie de sécurité et d’intervention de Seine-Saint-Denis (CSI 93) ont été placés en garde à vue dans les locaux de l’IGPN. Ils sont notamment soupçonnés d’avoir racketté des trafiquants de drogue contre lesquels ils auraient monté de fausses procédures. Leurs appartements ont été perquisitionnés lundi, tout comme les locaux de la CSI 93 à Aulnay-sous-Bois. D'après nos sources, leurs comptes bancaires auraient fait apparaître des rentrées d'argent suspectes.  
 

Il y a 150 policiers et malheureusement quelques brebis galeuses

Face à ces révélations qui écornent un peu plus l’image de l’institution policière déjà visée depuis des mois par des accusations de violences, le préfet de Paris Didier Lallement a fait savoir mardi qu’il engageait "une réflexion sur la réorganisation des unités de police de la CSI 93 à laquelle appartiennent ces 6 fonctionnaires mis en cause"
Deux des trois groupes de la compagnie ainsi que le Groupe de soutien opérationnel (GSO) et les officiers de l’unité devraient être mutés dans d’autres commissariats de la région. La partie des effectifs non concernée par cette dissolution devrait par ailleurs être rattachée à la CSI 75, elle aussi sous l'autorité de la Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP). Une décision que regrettent les policiers de la CSI 93 à Aulnay-sous-Bois, qui se disent "abattus". "Il y a 150 policiers et malheureusement quelques brebis galeuses. Mais c'est un service où ça bosse bien," nous a confié un responsable sous couvert d'anonymat. Ni Unité SGP ni Alliance, les syndicats majoritaires chez les policiers, n’ont souhaité répondre à nos questions. Ils doivent être reçus par le Préfet cet après-midi. 

 
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