Le rallye Dakar débute ce vendredi 5 janvier et se déroule cette année encore, en Arabie saoudite. Parmi les participants, Jean-Pierre Strugo, pilote yvelinois. A 77 ans, il est le doyen, et la mémoire vivante de la course, à laquelle il va participer pour la 32ème fois au volant de son buggy.
Le tout premier Dakar de Jean-Pierre Strugo c’était en 1985, avec le numéro 251, au volant d’une petite Citroën Visa 1000 Pistes. Cette année, il arborera le numéro 244 et pilotera un buggy deux roues motrices. Au total, 32 participations à cette course mythique séparent ces deux dates. Le pilote, originaire de Chatou dans les Yvelines, est désormais le doyen du Dakar, mais son amour pour ce rallye est resté intact. "Presque tous les ans, je me dis que ça sera mon dernier… Mais le virus me reprend à chaque fois. Tant que je peux repartir, je ne m’en prive pas !", raconte-t-il.
Pourtant, rien ne le prédestinait à la course automobile. À son entrée en école de commerce, il se fait offrir une voiture avec laquelle il va participer à plusieurs rallyes en France, seulement équipé d’un casque de ski et d’un simple arceau fixé à l’habitacle. Puis, le déclic pour le Dakar a lieu grâce aux retransmissions télévisées. "J’ai vu les six premiers à la télévision. Ça m’a tellement tenté, que pour le septième, j’étais au départ avec un copain", précise-t-il.
"L’objectif était déjà d’arriver"
Il se lance dans la fameuse course alors baptisée Paris-Alger-Dakar, en 1985, sous la direction d'un certain Thierry Sabine et un départ depuis Versailles. "C’était très difficile, à l’époque c’était vraiment la folie. Je n’ai pas terminé, parce que je n’avais pas fait les bons choix de voiture et d’équipe… ", se souvient le septuagénaire. "D’ailleurs, je n’ai pas non plus fini mon deuxième Dakar, ni le troisième, ni le quatrième. Il fallait quand même une bonne dose de persévérance ! Mais à partir de ma cinquième participation, je les ai pratiquement tous terminés."
De sa toute première participation, il garde le goût de l’aventure et de la compétition. "L’objectif c’était déjà d’arriver", se remémore-t-il.
On se repérait à la boussole, si on n’arrivait pas le soir le rallye repartait sans nous, on se retrouvait abandonnés au milieu de l’Afrique ! On partait sans assistance, les plus privilégiés avaient un mécanicien et une cantine dans un camion.
Jean-Pierre Strugo
Au fil des années, l’Yvelinois a vu le rallye évoluer : "Aujourd’hui on est très suivi, c’est très sécurisé. La course n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était les premières années, la vitesse et la compétition ont pris le dessus. Ce qui subsiste en revanche, c’est le dépassement de soi et le partage, avec mon copilote, mon équipe, avec tous les participants."
Des tempêtes de sable en Afrique, aux paysages montagneux d’Amérique du Sud, jusqu’aux dunes d’Arabie saoudite, Jean-Pierre Strugo a expérimenté tous les terrains où le rallye Dakar est allé. "Les pays sont très différents, mais les paysages, les pistes, les dunes se ressemblent beaucoup. En Amérique du Sud, les dunes c’était plutôt du sable gris. La couleur changeait des dunes Africaines, mais pas la consistance, ni les ensablements !", s’amuse le doyen de la course.
Un amoureux des rallyes, dans le monde entier
Jean-Pierre a participé à de nombreuses courses à travers le monde et croisé de nombreux visages connus. D'abord sur le Dakar, Thierry Sabine, évidemment mais également René Metge, triple vainqueur de la course, qui vient de déceder à 82 ans. "Je suis le seul participant cette année à avoir couru sous la direction de Thierry Sabine. Je l’ai connu via des amis communs, il m’a entrainé dans cette aventure. Quant à René, je l'ai côtoyé en tant que compétiteur et en tant qu'organisateur, je l'appréciais beaucoup".
Et au-delà du Dakar, il y a eu les rallyes du Maroc et d’Argentine, de Tunisie sur lequel il a croisé Johnny Hallyday, et celui des Émirats arabes unis… Il a même remporté en 2002 les 24 Heures tout-terrain de France et en 2019, l’Africa Eco Race. Des expériences qui lui permettent de continuer à concourir, même à 77 ans. "Je n’ai plus les capacités physiques que j’avais il y a 20 ans, mais j’ai plus d’expérience. Je sais mieux doser ma course, je sais mieux lire le terrain, je sais mieux gérer les problèmes – et on a forcément des problèmes !", souligne le pilote.
Arrivé il y a quelques jours en Arabie saoudite avec Christophe Crespo, son copilote, Jean-Pierre Strugo attend désormais avec impatience les 30 kilomètres du prologue de ce 5 janvier, qui détermineront l’ordre de départ pour la première étape le lendemain. "Je veux avant tout me faire plaisir, en roulant dans ma zone de confort. L’an dernier, cela m’a permis de terminer à la 26ème place, juste derrière la vingtaine de pilotes professionnels et leurs voitures d’usine."
Un Dakar qui sera peut-être le dernier (encore une fois !) pour Jean-Pierre Strugo. Depuis 2021, en parallèle, un rallye Classic avec uniquement des véhicules historiques est aussi proposé. Un format séduisant pour l’Yvelinois, qui précise, non sans malice : "J'y participerai peut-être… Sûrement quand je serai vieux !"