Lucie, Manon, Laurence, Anthony et Émilie ont, un jour, pensé quitter le métier qu’ils ont pourtant toujours voulu exercer. Certains ont jeté l’éponge, lâchés par l’institution. Ils sont tous professeurs des écoles et racontent la trajectoire de leur désenchantement, jusqu'à la rupture.
C'est un documentaire d’une force émotionnelle rare.
Son point de départ ? Christine Renon. Vous vous rappelez ? Cette femme de 58 ans s’était donné la mort en septembre 2019, trois semaines après la rentrée scolaire, dans l’école de Pantin dont elle était la directrice.
Deux jours plus tôt, elle dénonçait ses conditions de travail, dans une lettre bouleversante envoyée à ses pairs et à sa hiérarchie. Sa lettre, son geste avaient créé une onde de choc à travers toute la France, et réuni une partie des enseignants sous le slogan : "Je suis Christine !".
Mais qui sont-elles et qui sont-ils, en réalité, ces "Christine" ? On entend souvent parler d’eux, mais on les entend rarement parler d’eux-mêmes. Ce documentaire part à leur rencontre.
Lucie a démissionné du métier qu’elle rêvait d’exercer. Manon tient bon, mais ne sait pas jusqu’à quand. Laurence part à la retraite avec soulagement. Anthony et Émilie quittent l’éducation nationale pour poursuivre ailleurs leur mission auprès des enfants.
Ils sont tous professeurs des écoles. Ils exercent depuis plus ou moins longtemps (de 9 à 39 ans) et racontent la passion de leur métier, de l’enthousiasme des débuts jusqu’à la crise finale et à la difficile reconstruction.
Une traversée pudique et poignante d’une vocation désenchantée.
Le malaise enseignant en quelques chiffres
Depuis 2012, le nombre d’enseignants et de stagiaires démissionnaires dans le premier degré a quasiment triplé, selon des chiffres publiés dans un rapport du Sénat. Le nombre de démissions a bondi dans certaines régions : +850% dans les Pyrénées-Orientales en 2 ans, + 400% en Ille-et-Vilaine.
Une enquête menée en 2019 par le Snes-FSU sur 8700 enseignants révèle que 93% des personnels interrogés estiment que leur charge de travail s’intensifie et 73% que leur travail a dégradé leur santé ces derniers mois.
Le salaire brut d’un professeur des écoles débutant, n’est aujourd’hui supérieur au SMIC que d’un tiers, alors qu’il représentait environ deux fois le salaire minimum en 1990. Une rémunération très basse pour un niveau bac+5.
L’Éducation nationale emploie un million cent mille agents, dont environ 900 000 enseignants, avec un ratio d’un médecin du travail pour 16 000 agents.
La réalisatrice
Depuis 2009, Julie Chauvin évolue dans le domaine de la création documentaire, aussi bien dans l’écriture, la réalisation que la production de films.
Sa volonté : donner la parole à ceux et celles que l’on n’entend habituellement pas.
L’école est un lieu essentiel à la démocratie
Julie ChauvinRéalisatrice
Pour Julie Chauvin, le but est de recueillir les voix des premières victimes du malaise qui ronge le corps enseignant afin de participer à la réflexion sur la place de l’éducation dans notre société : "Les enseignants sont les ouvriers et les architectes de la construction d’un espace collectif vivable, au sein duquel s’écrit notre avenir commun. S’ils chancellent, nous serons tous impactés, et c’est notre société qui en paiera le prix."
Elle a réalisé, entre autres "À nos aïeux", tourné pendant six mois dans une maison de retraite, "Les Débatteurs" (lauréat Infracourts et nommé aux Lauriers de l’audiovisuel) pour lequel elle a fait une immersion de deux ans dans un collège, ou "Là où tout se joue", tourné sur plus d’un an, chez des habitants de Sevran.
Un article co-écrit avec France 3 Normandie, Marie du Mesnil-Adelée
Le documentaire "L'école est finie" réalisé par Julie Chauvin, produit par Keren Production est à voir jeudi 9 février à 22h40 sur France 3 Pays de la Loire
► À voir en replay sur france.tv dans notre collection La France en Vrai
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