Les policiers d'Angers, de Vendée ont manifesté hier. A Nantes également, place Graslin après l'avoir fait la veille. Malaise, ras-le-bol, sont les mots qui résument la situation.Témoignage d'un policier à visage caché, car la fonction est assortie d'un droit de réserve.
Ils ont manifesté hier, place Graslin à Nantes. Pour les mêmes raisons que dans toute la France. Un ras-le-bol assez général et ce sentiment persistent de ne pas pouvoir exercer leur métier, et d'en avoir assez de prendre des coups.
Dans les récentes manifestations des forces de l'ordre, tous ne sont pas des représentants syndicaux et choisissent de manifester. L'un d'entre eux à témoigné hier soir devant notre caméra. Son visage est caché.
►VIDÉO. Le reportage à Nantes de Clément Massé, Boris Vioche et Daniel Le Floch
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©France 3
Rejoints par les syndicats, ils obtiennent des gages mais maintiennent la pression
Appels à des rassemblements devant les palais de justice, réunion la semaine prochaine avec François Hollande: les syndicats de policiers tentent de reprendre la main sur un mouvement de grogne qui les a dépassés et mis le gouvernement sur la défensive. Les syndicats, qui réclamaient d'être reçus par François Hollande, ont obtenu gain de cause. En marge d'un sommet européen, le président de la République a annoncé dans la nuit de jeudi à vendredi qu'il les recevrait "en début de semaine".
Les syndicats comptent "exposer en urgence les préoccupations et attentes des agents", expliquent-ils dans une lettre adressée à François Hollande. Ils ont également appelé à des "rassemblements silencieux devant les palais de justice" tous les mardis de 13H00 à 13H00, pour demander la "révision du cadre juridique d'emploi des armes" afin d'assouplir les règles de la légitime défense et la "mise en place de peines plancher pour les agresseurs de membres des forces de l'ordre et services de secours", créées sous la droite et abrogées sous François Hollande.
Le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas, accusé par le syndicat de la magistrature de se comporter en "ministre de la police", a promis "la plus grande fermeté" pour les agresseurs et refusé de rétablir les peines planchers. Les critiques des policiers contre la justice relèvent d'un "manque d'informations" a estimé M. Urvoas, qui s'est engagé à les informer des suites judiciaires de leurs enquêtes.
Face à une grogne qui fait tache d'huile depuis lundi, tout le gouvernement a tenté ces derniers jours d'endiguer le mouvement. Jeudi, Manuel Valls a exhorté les policiers à "continuer le dialogue", le gouvernement condamnant par ailleurs l'"utilisation politique" du mouvement par l'opposition.
La pédagogie plutôt que la sanction
Mercredi, Bernard Cazeneuve avait annoncé le lancement en novembre d'un plan "de sécurité publique" et des concertations "en profondeur" dès lundi dans chaque département entre les préfets, les directeurs départementaux de la sécurité publique et les personnels de la police nationale et leurs représentants syndicaux. Les conclusions de ces concertations sur les moyens doivent être remises "en décembre pour mise en oeuvre immédiate dès 2017".
Mais la colère n'est pas retombée. Jeudi soir, les manifestants parisiens ont scandé "Cazeneuve, démission" et "Falcone, démission", réclamant davantage de moyens et dénonçant les attaques dont ils sont victimes, douze jours après l'attaque aux
cocktails Molotov contre quatre agents à Viry-Châtillon dans l'Essonne, qui a mis le feu aux poudres. Vendredi matin, le patron des policiers Jean-Marc Falcone a affirmé qu'il ferait des propositions "la semaine prochaine" à Bernard Cazeneuve, sur les moyens matériels.
Un vaste plan de moyens matériels supplémentaires (fusils d'assaut, voitures, gilets pare-balles) avait été décidé à la suite des attentats de 2015 mais ils ont essentiellement bénéficié aux unités spécialisés au détriment des effectifs de sécurité publique.
"L'expression de la colère des policiers peut être considérée comme légitime", a estimé le directeur général de la police nationale, rappelant que les forces de l'ordre sont soumises à "une forte pression liée aux attentats, liées à l'Euro-2016, liées à la Cop21, aux conflits sociaux". Interrogé sur d'éventuelles sanctions à l'encontre des policiers qui manifestent, M. Falcone a répondu que l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) aurait un "rôle pédagogique (...) pour dire à ces fonctionnaires qu'on comprend leur colère, leur désarroi, leur émotion".
"L'expression de cette colère pendant les heures de service, avec les moyens de l'administration, (est) assez loin de leur siège et de leur circonscription de police, ne doit pas s'exprimer de cette manière-là", a-t-il cependant estimé.