Malades, médecins, psychologues, leur avis est unanime, l'activité physique fait partie intégrante du traitement contre le cancer. Elle permet de réduire la fatigue, limiter les douleurs et retrouver de la confiance en soi.
"Je bouge, je n'ai pas envie de rester chez moi à attendre que la maladie devienne plus invalidante et ne me permette plus de faire cette activité", racontait Yannick Sourisseau, en juin dernier, à la veille de son départ pour une randonnée à pied de 270 km de Saint-Melaine-sur-Aubance au Mont Saint-Michel.
"La marche, c'est un excellent compromis, ça fait fonctionner tous les muscles du corps", expliquait cet homme de 67 ans, atteint d’un cancer de la prostate, bien décidé à combattre la maladie.
Comme de nombreux malades du cancer, Yannick suit les recommandations de ses médecins, car l’activité physique fait désormais partie intégrante des traitements des malades tout comme l’alimentation. Et ce, dès l’annonce des traitements à venir, la chimiothérapie, la chirurgie ou la radiothérapie.
Quel que soit le traitement, l’activité physique est bénéfique
Emmanuelle Bourbouloux, oncologue à l’Institut de Cancérologie de l’Ouest
Selon plusieurs études, "il pourrait y avoir un bénéfice sur la diminution du risque de récidive à long terme, associé à une alimentation saine, et un impact sur la tolérance des traitements, l’amélioration de la fatigue et la réduction des douleurs notamment articulaires et musculaire", confirme l'oncologue, spécialiste du cancer du sein.
Une victoire sur soi-même
Pour Alexandra Husta, atteinte d’un cancer du sein à trente ans, le sport est devenu une vraie thérapie de vie. Après un tour de France en vélo en 2020, elle a achevé cet automne un tour d’Europe, un périple de 8 000 kms. "C’est une victoire sur moi-même, sur mon manque de confiance, sur le cancer aussi, parce que les douleurs sont toujours là", confiait-elle en août alors qu’elle venait d’atteindre la mer Noire.
Alexandra s’est lancée dans la pratique assidue du vélo durant son parcours de soins, après les séances de chimiothérapie et avant la mastectomie d’un sein. "C’est important de ne pas être soumis totalement au médical, explique Myriam Auger, psychologue à l’ICO, l’annonce d’un cancer est vraiment traumatique, elle bouleverse tout".
La blessure narcissique du cancer, la blessure de cette intégrité du corps face aux traitements, chacun va y répondre différemment et le sport est une voie possible.
Myriam Auger, psychologue à l'Institut de Cancérologie de l'Ouest
La pratique sportive permet aussi de détourner l’attention de la douleur, de l’anxiété et de réinvestir ce corps malmené par les traitements qui provoquent une fatigue extrême jusqu’alors inconnue.
"Ce qui est compliqué pour les patients, c’est qu’ils se retrouvent dans une espèce de machine où ils deviennent passifs", explique Emmanuelle Bourdouloux. Dans le cas du cancer du sein, les patientes vont bien, elles n’ont pas de symptômes. Les symptômes arrivent en raison des traitements, c’est d’autant plus difficile".
"On leur dit de continuer à faire du sport pendant les rayons et pendant l’hormonothérapie. Ce n’est pas nécessairement une activité intensive, c’est une activité régulière, comme la marche", précise l'oncologue.
Si les bienfaits de l'activité physique dans le traitement des cancers est sans conteste, sa pratique varie cependant selon les patients et selon l'appétence de chacun.
Une diminution des effets secondaires des traitements
Pour accompagner les malades, l’Institut de Cancérologie de l’Ouest travaille en étroite collaboration avec les praticiens en thérapie sportive de l’association CAMI Sport et Cancer, à travers un parcours individualisé et adapté à la pathologie du patient. L’accompagnement dure de six à douze mois, à raison de deux à trois heures de sport collectif par semaine.
Développé par un ancien sportif, la méthode du CAMI "permet de travailler en toute sécurité, avec des mouvements et des enchainements bien définis pour répondre à trois critères essentiels, la durée, la fréquence et l’intensité", explique Julie Devriendt, praticienne en thérapie sportive à Nantes.
"Quand les patients viennent dès l’annonce du diagnostic, on voit qu’ils sont moins fatigués durant les traitements", assure Julie Devriendt. "Quand des personnes arrivent au milieu de leur chimiothérapie ou après la radiothérapie, ces personnes ont déjà une fatigue ancrée, qu’il est plus difficile de réduire par la suite".
Grâce à ces séances de gymnastique douce, "il y a une diminution des effets secondaires des traitements, notamment la fatigue et la douleur", souligne la praticienne.
"Le sport permet de ramener de la confiance en ce corps synonyme de souffrance et de douleur, de ramener le corps du côté du plaisir et de la douceur", ajoute la psychologue. D'autres se tourneront vers la sophrologie, la musique, le chant, la peinture.