80 ans de la libération : le pont de Pruniers à Bouchemaine, l'une des clefs de la libération d'Angers le 10 août 1944

Ancien ouvrage ferroviaire du début du 20ᵉ, le pont de Pruniers a bien failli disparaître il y a 80 ans. Seul pont de franchissement possible en aout 1944 sur la Maine, il permit aux troupes américaines de rejoindre Angers.

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Dans la nuit du 4 au 5 aout 1944, deux mois après le débarquement en Normandie, les premières troupes américaines arrivent en Anjou, et le 8 août 1944, la 5ᵉ division d'infanterie reçoit l'ordre du général Patton de libérer Angers par trois axes.

L'un de ces bataillons doit prendre l'occupant allemand à revers en contournant la ville par le sud, et en traversant la Maine, l'un des affluents de la Loire. "Il y a une stratégie d'enveloppement de la défense allemande", explique Michel Letertre, membre de l'association des Amis de Pignerolle. 

"Une section est arrivée au contact des Allemands, au plus près du pont. Encerclés, les Allemands qui étaient là, se sont rendus pour la plupart d'entre eux. Et c'est comme ça qu'a commencé la prise du pont de Prunier".

Les troupes américaines sont renseignées par un résistant local, Louis Bordier, qu'un accès est possible par le pont de chemin de fer de Prunier, la dernière passerelle encore debout sur le secteur.

"Ils étaient une vingtaine à faire des travaux de terrassement, des tranchées, relate Guy Stefanini, historien. C'est vrai que les Allemands ont été surpris par l'avancée américaine, vraiment surpris. Pourquoi ils ne l'ont pas fait sauter ? Est-ce qu'ils l'ont gardé jusqu'au dernier moment pour le repli éventuel des troupes qui étaient sur Bouchemaine. C'est possible, mais on ne le sait pas avec certitude."

À la nuit tombée, des Américains envoyés en éclaireur désamorcent un wagon miné laissé sur la voie par les Allemands. Les forces alliées peuvent alors s'engager sur l'autre rive. Les premiers à traverser sont les 40 soldats de la compagnie L.

L'un des champs de bataille les plus sanglants

"Les Allemands, pendant toute la nuit, ont fait cinq contre-attaques parce qu'ils voulaient absolument reprendre le pont ou peut-être le faire sauter. On ne sait pas, on n'a pas de témoin pour ça", poursuit Guy Stefanini.

Mais un dernier verrou allemand fait obstacle aux soldats américains dans leur progression. Installés en surplomb, les hommes de Hitler ripostent par des tirs nourris.

"On n'imagine pas que ça a été l'un des champs de bataille les plus sanglants de la bataille pour la libération d'Angers, explique Michel Letertre. C'est une contre-offensive allemande désespérée en pleine nuit. On se tirait dessus, quasiment, on ne se voyait pas, on tirait sur les flammes des fusils ennemis. C'était vraiment certainement apocalyptique."

Aidés par un renfort d'artillerie, les Américains remportent cette confrontation au prix de lourdes pertes. De nombreux Allemands sont faits prisonniers.

Le 10 août, Angers est libérée

À quelques rails du pont de Prunier se joue une autre bataille politique, celle-là, pour la libération d'Angers. La gare du petit Anjou en sera le théâtre. C'est ici que Michel Debré, résistant et futur premier ministre, serait arrivé anonymement pour confier une valise. À l'intérieur, les consignes pour rétablir la République.

"Ils ont vraiment suivi les directives de de Gaulle, qui ne voulait pas que les Américains créent un système américain en France. Et donc, il a missionné un certain nombre de personnes comme ça pour aller prendre les préfectures. Et c'est ce qui s'est passé avec Michel Debré", explique Michel Raclin, fondateur des "Amis du Petit Anjou".

"Angers est l'une des premières villes libérées, avec Rennes et celles de Normandie. Ils ont vraiment fait ce qu'il fallait pour mettre la main sur l'administration française".

Dans l'après-midi du 10 août, après d'ultimes combats dans le centre-ville d'Angers, les troupes américaines remportent la victoire. Dans cette opération militaire, la prise du pont du petit Anjou sur la Maine aura été d'une aide précieuse.

► Le reportage d'Eric Aubron, Denis Leroy, Laurent Bellanger et Nathalie Saliou-Tendron

L'association des Amis du Petit Anjou, qui fait le lien entre histoire et patrimoine ferroviaire, organise un week-end de commémorations les 10 et 11 août avec exposition et reconstitution. Le 7 septembre, un circuit sur les traces de la 5ᵉ division d'infanterie américaine est proposé par l'historien Guy Stefanini.

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