Dans le secteur traditionnel de la bijouterie, Flora Chalopin fait figure d'exception. À Angers, la trentenaire élabore des créations adaptées au handicap et à la perte d'autonomie. Elle est la seule à fabriquer ce genre de bijoux en France.
Flora Chalopin est une joaillière singulière. Non contente d'avoir sa propre bijouterie à Angers, elle est aussi la seule artisane française concevoir des bijoux adaptés à différents handicaps et pathologies sous la marque Via Sibi.
Ces bijoux sur-mesure ont vocation à lier l'utile à l'agréable, et l'esthétique au pratique pour "soulager les douleurs et transformer la contrainte en plaisir".
Le bijou adapté intègre un détail technique qui le rend utile et qui résout un problème du quotidien lié au handicap.
Flora ChalopinBijoutière-joaillière créatrice de bijoux adaptés aux handicaps
Bagues, colliers et bracelets
Parmi les créations de Flora Chalopin, une "bague orthèse" constituée de plusieurs anneaux. Original, le bijou permet de "reposer le doigt, de corriger la déformation ou les tensions, et d'empêcher les douleurs" grâce à la barre rigide située sous le doigt.
Il y a un vrai effet thérapeutique.
Flora ChalopinBijoutière-joaillière créatrice de bijoux adaptés aux handicaps
La bague orthèse est une alternative plus jolie que les attèles, mais aussi plus coûteuse (150 € minimum), parce qu'il faut l'ajuster à chaque doigt.
La trentenaire a aussi mis au point un fermoir utilisable à une seule main à l'aide d'un système d'aimants. Une alternative aux fermoirs habituels, qui donnent souvent du fil à retordre même lorsqu'on les manie à deux mains.
"C'est un bijou qui s'adresse aux personnes qui ont de l'arthrose, une perte de sensibilité et de mobilité dans les doigts, ou aux gens qui n'ont qu'une seule main fonctionnelle. Ils peuvent mettre et enlever le bijou en toute autonomie", explique Flora Chalopin.
La jeune femme a déposé un brevet pour protéger ce fermoir, surprise de constater que "personne n'y avait pensé avant".
Quand la joaillerie rencontre l'ergothérapie
Ingénieuse, Flora Chalopin a trouvé l'inspiration pour se lancer dans les bijoux adaptés auprès de sa mère, ergothérapeute dans un centre de rééducation.
"Ma mère est passionnée de couture, et elle commençait à réfléchir à des vêtements adaptés pour les personnes en situation de handicap. En discutant avec elle que je me suis rendue compte que j'avais des choses à inventer et à apporter avec mes savoir-faire", raconte la bijoutière.
Ni une, ni deux, elle s'est lancée dans l'élaboration de prototypes testés puis approuvés par des personnes en situation de handicap ou souffrant de pathologies, et par des professionnels de santé.
Habiller son handicap
Mais le bien-être physique n'est pas le seul objectif des créations Via Sibi. Elles subliment aussi des conditions encore souvent stigmatisées.
Le collier Rivière se porte assez haut sur le cou pour habiller les cicatrices après une opération de la thyroïde ou une trachéotomie par exemple.
Flora ChalopinBijoutière-joaillière créatrice de bijoux adaptés aux handicaps
"Le scintillement des pierres et les couleurs va attirer l'œil sur le bijou et naturellement, ce qui est en-dessous disparaît", décrit Flora Chalopin en faisant jouer le collier sous la lumière.
"Le but est d'habiller joliment son cou ou ses doigts, mais pas de cacher comme on pourrait le faire avec un col roulé ou une écharpe", précise-t-elle.
Un avenir brillant
La mission de Via Sibi ("la route pour soi" en latin) séduit aussi bien les clients que les employés. Créée en 2017, l'entreprise compte aujourd'hui cinq salariés et son carnet de commandes ne désemplit pas. Une chance pour Noémie Roger, qui y apprend le métier de bijoutier-joaillier en alternance.
Il n'y a que cinq personnes dans le monde qui font ce type de bijoux. Et ce qu'on fait soulage les gens et leur apporte un plus énorme. C'est vraiment chouette que je sois tombée sur Flora.
Noémie RogerApprentie chez Via Sibi
Flora Chalopin ne manque pas d'idées pour la suite. Elle a déjà imaginé de nouveaux bijoux adaptés dont elle garde encore le secret, avec toujours ce même objectif : les rendre accessibles au plus grand nombre.