Les scientifiques de l’Ifremer déploient leur programme de science participative à l'échelle nationale. D'abord lancé en Bretagne et en Pays de la Loire, Phenomer 2.0 permet à tout le monde de recenser les proliférations de microalgues à partir d'une application.
Vous vous promenez sur les bords de la côté atlantique et la couleur de l'océan vous semble inhabituelle ?
Ce sont peut-être de blooms ! Parfois mousseux, tantôt bioluminescents, ce sont des efflorescences algales dues à une multiplication de phytoplancton, un type de microalgues, dans l'eau.
Certaines espèces de bloom peuvent traduire d’un déséquilibre des écosystèmes
Victor Pochicmembre du laboratoire nantais ISOMer
Leurs apparences colorées attirent l’œil des promeneurs et questionnent celui des scientifiques. “Ce phénomène est difficile à étudier, appuie Victor Pochic, membre du laboratoire nantais ISOMer et partenaire de l’Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer).
Il poursuit : “Certaines espèces de bloom peuvent traduire d’un déséquilibre des écosystèmes, mais on n’arrive pas à tous les détecter”. Pour optimiser leurs observations, les scientifiques de l’Ifremer sollicitent l’aide de la population en lançant Phenomer 2.0.
Le programme de science participative Phenomer, dédié à l'observation d’eaux colorées dues aux proliférations de microalgues, évolue et déploie son action à l'échelle nationale pour devenir Phenomer 2.0. pic.twitter.com/UGp98twWrb
— Ifremer 🌊 (@Ifremer_fr) July 5, 2024
Il s’agit de l’évolution de leur programme Phenomer. Coordonnée depuis 2013 par l’Ifremer, en Bretagne et en Pays de la Loire, il permet à tout un chacun de signaler la présence de bloom sur l’un de ces littoraux.
Fondé sur le même objectif, Phenomer 2.0 s’élargit à l’échelle de la France, incluant ainsi la façade Méditerranée, pour les régions Sud-PACA, Corse et Occitanie.“Cette évolution était indispensable, assure Victor Pochic. Ce programme nous permet d’observer des phénomènes que l’on n'aurait pas pu observer seuls.”
Une étude de 2020 a effectivement montré que 60 % des efflorescences signalées par Phenomer n’auraient pas été détectées autrement. Sans ce programme, les phytoplanctons sont recensés dans des stations fixes où un échantillonnage n’est fait que toutes les deux semaines.
“C’est peu, donc on passe à côté de nombreux phénomènes. L’élargissement du programme participatif va permettre d’affiner encore davantage notre grille d’observation”, détaille le chercheur.
Signaler en 4 étapes
Pour participer à cette chasse aux blooms, tout se passe sur l'application Phenomer à télécharger sur son smartphone.
Une fois installé, le signalement se fait en un temps record. Il suffit de suivre quatre étapes : décrire le phénomène observé, le photographier, le localiser sur une carte puis écrire des informations complémentaires si nécessaire.
Plus que de signaler, il est également possible de faire son propre prélèvement de bloom. “C’est très simple à réaliser, assure Victor Pochic. Il faut mettre l’eau colorée dans une bouteille et l’apporter dans un de nos relais, à savoir dans les structures locales des Sauveteurs en Mer.”
Phénomène naturel, effets néfastes
Toutes les mers et les océans du globe sont concernés par les phytoplanctons. À première vue, ils n’ont rien de dangereux et paraissent même essentiels au bon fonctionnement de l’écosystème marin. En effet, sous les eaux, ces microalgues sont le premier maillon de la chaîne alimentaire.
C’est lorsqu’il y a prolifération, c’est-à-dire formation de Blooms, qu’il faut être vigilant. ““À leur mort, les cellules de phytoplancton sont décomposées par des bactéries qui consomment une grosse quantité d’oxygène et en laissent peu pour les autres espèces encore en vie. Cela peut donc avoir un impact sur la biodiversité marine”, indique Victor Pochic.
Certaines espèces de phytoplancton sont toxiques
Victor Pochicmembre du laboratoire nantais ISOMer
Autre conséquence néfaste, la profusion de toxine : “Certaines espèces de phytoplancton créent des blooms toxiques et empoisonnent les moules et les huîtres.” Dans ce cas, il peut y avoir des risques d’intoxication pour l’homme.
La maximisation des observations des phytoplanctons aiderait ainsi la mer à faire moins bloom.
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