Seulement 1% des plongeurs scaphandriers sont des femmes. Marion Moriceau est l’une d’elles. Cette Vendéenne de 37 ans a fait de son rêve un métier mais a dû batailler pour y parvenir.
"J’ai de l’eau de mer qui coule dans mes veines" explique, dans un large sourire, Marion Moriceau. Issue d’une famille de marins-pêcheurs, la Sablaise a toujours voulu vivre sous l’eau. Ce métier de scaphandrière, elle en rêvait très jeune, mais la formation, trop chère à l’époque, lui était inaccessible. Son père lui parle alors des plongeurs au sein de la Marine Nationale.
Je me retrouve face à quelqu'un qui me dit : vous ne pouvez pas prétendre à devenir plongeur-démineur puisqu'il n'y a pas de femmes dans ce métier et il n'y en aura jamais
Marion MoriceauÀ 23 ans, lorsqu'elle se présente dans un bureau de recrutement...
Vexée, Marion repart, bien décidée à lui prouver le contraire. Elle s'entraîne, opte pour une prépa de maintenance en milieu subaquatique et se présente à l’école de la Marine à St-Mandrier, dans le Var. Après de difficiles épreuves de sélection, elle est engagée !
"Dans l'armée, on perd totalement son innocence, avoue Marion. On est repoussé dans nos limites tout le temps. Et ce n'est pas pour rien, puisque nous allons sur des terrains de guerre, ce qui a été mon cas".
Et d'ajouter : "Je suis partie au large de l'Afghanistan, puis en Somalie et en Libye". Une période traumatisante que la jeune femme préfère ne pas évoquer. À son retour, Marion ne renouvelle pas son contrat dans l’armée et accède enfin au métier de ses rêves : scaphandrière.
Le plongeur scaphandrier doit supporter un équipement d’une quarantaine de kilos pour travailler jusqu’à cinquante mètres de profondeur. "Je pense que c'est l'un des métiers les plus risqués puisqu'on a les risques maritimes : les vagues, la houle, le vent; les risques liés au bâtiment : on déplace des blocs de béton, donc il ne faut pas se faire écraser une main; et les dangers liés à la plongée comme la narcose à partir de trente mètres".
La narcose est aussi appelée l’ivresse des profondeurs. Les symptômes peuvent être des bouffées de chaleur, une envie de rire, une perte de repères. “Dès les premières sensations, explique Marion, c'est bien de remonter d’un mètre, sentir les sensations, et attendre que la narcose s’en aille pour pouvoir recommencer à travailler”.
La Vendéenne a participé à de nombreux chantiers remarquables comme celui de l’extension de la principauté de Monaco sur la mer ou, plus récemment, l’installation d’éoliennes offshore au large de Saint-Nazaire.
Et parmi les anecdotes qui jalonnent son parcours hors du commun, elle se souvient d’un jour en particulier. “On était sur une plongée peu profonde. Je descends pour faire une inspection. Arrivée au fond, j’aperçois un petit requin au-dessus de moi. Je me rassure car je sais que les requins n’attaquent pas quand on est en-dessous. Quand je me retourne de nouveau, je me rends compte qu’ils sont une vingtaine autour de moi. J'arrête de travailler. Et je me mets à les regarder avec amour. J’ai senti que je n'étais pas en danger et j'ai vraiment remercié la nature de m'offrir ce spectacle magnifique”.
Outre son métier, Marion est aussi passionnée par les algues. Elle en fait des cosmétiques bientôt certifiées bio à base de goémon noir. Une recette qu’elle tient de son arrière-grand-mère. Elle travaille au développement de sa marque et s’investit par ailleurs pour la défense de l’environnement à travers des associations comme Respect Ocean et Women for sea.
Son rêve désormais ? “Habiter une maison sous-marine avec un laboratoire pour y travailler mes algues”.
Ne lui dites surtout pas que c’est impossible !