Addiction, vie affective et sexuelle perturbées, troubles de l’estime de soi : à l’ère de l’accès illimité à internet, l’exposition grandissante des plus jeunes aux images pornographiques inquiète. Professionnels et associations tirent la sonnette d’alarme et dessinent des solutions.
53% des adolescents ont déjà été exposés accidentellement à un extrait ou une vidéo sexuellement explicite.
14 ans est l’âge moyen des adolescents qui surfent sur un site pornographique pour la 1ère fois. C’est ce que révèle une étude menée par l’IFOP en 2017, pour l’Observatoire de la Parentalité et de l’éducation Numérique (OPEN).
Selon une autre étude récente (1), 1 enfant sur 10 a déjà été exposé à des contenus pornographiques et 8 % des 14-15 ans en regardent plusieurs fois par jour.
Le téléphone portable offert lors de l'entrée en 6ème peut, dès lors, s'apparenter à un cadeau empoisonné : c’est aujourd’hui le 1er écran de visionnage d’images pornographiques. Conséquence : entre 15 et 17 ans, plus d’un garçon sur deux et plus d’une fille sur trois estiment que la pornographie a participé à l’apprentissage de leur sexualité.
Selon le pédopsychiatre Stéphane Clerget, cette exposition prématurée à la pornographie en ligne « peut bouleverser la vie sexuelle ». Et le porno serait « la principale porte d'entrée sur l’éducation sexuelle ». Il met en garde contre « le fantasme du prêt-à-porter ». Mais aussi sur les normes et les stéréotypes souvent dégradants qui mènent à une sexualité décentrée des rapports amoureux, et qui banalisent des pratiques autrefois plus marginales (sodomie, fellation, éjaculation faciale).
Le risque est que la sexualité des ados se construise sans sentiments, sans séduction ou jeux amoureux. La parade ? "Un enseignement parental sur les dangers d'internet", dans lequel les images explicites doivent être évoquées, préconise Stéphane Clerget.
Même approche chez le président l’Observatoire de la Parentalité et de l’éducation Numérique (OPEN), Thomas Rohmer. Ce dernier souligne "l’importance du dialogue avec les ados" et déplore une "absence d’espace de parole libre et bienveillant" sur la thématique de la sexualité. En juin dernier, l’OPEN a d’ailleurs mené une expérience pilote : des ateliers théâtre-thématiques dans un collège de Charente-Maritime.
Objectif affiché : « initier un espace libre d’expression » sur la thématique de la sexualité.
Pour cette jeunesse ultra-connectée, Thomas Rohmer voit aussi le web comme un possible allié dans l'éducation sexuelle. " Si le problème vient du numérique, la solution peut aussi en partie venir du web", précise-t-il. De nombreux formats courts, destinés aux réseaux sociaux, abordent la sexualité avec les codes des adolescents. "Ces formats web peuvent devenir des occasions de discuter du sujet entre les parents et les adolescents" ajoute-t-il.
Dès qu’un dialogue prend forme, reste la question des mots à employer.
Certains parents peinent à dire "pornographie" : « Dans ce cas, l'expression "images interdites" peut aider », explique le pédopsychiatre Stéphane Clerget. Il rappelle aussi que le dialogue reste "le principal outil", et que "chaque mot doit être pesé."
(1) Les addictions chez les jeunes : l’urgence d’une politique de santé et de sécurité publiques (IPSOS, Juin 2018)
Ecrit par Virginie Bétille et Nacer Boubekeur
Les craintes de Corinne, 47 ans "Il y a des jeunes qui vont sur des sites gratuits, des sites pornographiques, des sites d’échangisme, pendant que les parents cuisinent en bas ou sont dans le salon en train de regarder la télévision. Pour ces jeunes, il est assez facile d’entrer sur ces sites car il leur suffit de cliquer sur « Adulte ». Certains y font des webcam en se déshabillant . Et je trouve cela vraiment incroyable qu’il n’y ait pas de blocage pour cela. Il faut vraiment faire attention car maintenant tout est vraiment facile pour un jeune." |
Marie-Lyne Lassagne, Sexologue Beaucoup d’adolescents et de pré-adolescents visionnent des images pornographiques et leur nombre est croissant. Ils veulent apprendre, oui, mais ce qui se joue à l’adolescence est plus complexe. Par peur, les adultes tentent de freiner le phénomène. Mais quelle est l’efficacité d’une interdiction ? La solution est une éducation à la sexualité digne de ce nom. Une éducation au sens d’Edgar Morin : « apprendre à réfléchir sur la sexualité, sur tous ces aspects, aussi sur la pornographie, pour pouvoir faire des choix éclairés sur sa vie sexuelle ». |
A retenir -visionner des images sexuellement explicites n’est pas toujours volontaire. Les sites de streaming illégaux font apparaître des « pop-up » (fenêtres) aux contenus pornographiques - expliquer la notion de consentement est essentielle dans l’éducation à la sexualité - utiliser les logiciels de contrôle parental pour ordinateur et smartphone - laisser les écrans (smartphones, tablettes, ordinateurs) hors de la chambre des ados la nuit - du CP à la terminale, les établissements scolaires, ont l’obligation de dispenser au moins 3 séances par an d’éducation à la sexualité. |
ÉVÉNEMENT
Mercredi 9 octobre
Dès 10.45 sur tout le réseau France 3 des régions, l'émission "Ensemble c'est mieux" consacre son dossier principal au thème de la jeunesse et des contenus pornograhiques.
Puis, soirée continue sur France 2 : « Pornographie: jeunesse en danger »
à partir de 21h05
À 21.05 : Fiction « Connexion intime » (déconseillée au -12 ans) / Prix de la meilleure interprétation féminine (Ex aequo) pour Luna Carpiaux au Festival de la Fiction La Rochelle 2019
La fiction sera disponible dès 6 heures du matin sur france.tv
Avec : Luna Carpiaux (Chloé), Marilyn Lima (Luna), Jules Houplain (Félix), Armelle Deutsch (Aurélie), Marius Colucci (Cyril), Julien Pestel (Nicolas), Elodie Navarre (Jeanne), Stéphane Rideau (Marc), Mahia Zrouki (Mélanie), Bruni Makaya (Désiré), Julien Ledet (Enzo), Béatrice Facquer (Stéphanie)
Chloé, 15 ans, nouvelle venue au lycée, noue une amitié intense avec Luna, une fille charismatique et affranchie qui l’aide à s’intégrer rapidement. Chloé rencontre aussi Félix, l’ex de Luna, un bad boy à la beauté angélique, addict au porno, dont elle tombe amoureuse. Un triangle amical et amoureux se met alors en place, Luna devenant le mentor sentimental de son amie. Ainsi, quand Félix demande une fellation à Chloé à peine leur premier baiser échangé, Luna explique à son amie que c’est la nouvelle norme. La jeune fille se soumet à l’exercice, une première pour elle, mais peu satisfaite de cette relation sexuelle à sens unique, Chloé propose à son amoureux de passer une nuit ensemble pour créer une vraie intimité. Bien qu'il ait des sentiments pour elle, la dépendance de Félix au porno le rend difficile à exciter : coucher avec Chloé est une épreuve... qui tourne au fiasco. Cherchant une stimulation qui lui permettrait d’ "assurer", il tente plus tard d’entraîner Chloé dans un plan à trois avec Luna. La jeune fille, bouleversée, refuse et rompt avec eux. Cherchant à se réconcilier avec son amie, Luna stigmatise publiquement l’impuissance de Félix en présence de Chloé, qui enfonce le clou. Humilié, Félix se venge en postant sur les réseaux sociaux une vidéo de Chloé en train de lui faire une fellation. Jusqu'où ira la spirale de violence qui s'est enclenchée ?
À 22h40 - Documentaire - « Pornographie : un jeu d'enfant »
En France, c’est en moyenne à l’âge de 10 ans qu’un enfant est confronté pour la première fois à la pornographie en ligne, sans le moindre filtre. Les conséquences psychologiques et affectives de cette exposition sont dramatiques, les spécialistes parlent de « viol psychique ». A travers les témoignages d’adolescents et de jeunes adultes d’une authenticité rare, ce documentaire décrypte un phénomène nouveau qui prolifère sur la toile, en dehors de tout cadre légal.
Anne-Marie Avouac propose un film sensible, à la mise en scène cinématographique. La force des témoignages de Leila (10 ans), ou encore de Valentine ou Dino (15 ans) nous invite à une prise de conscience face à un danger sous-estimé. Le gynécologue Israël Nisand nous interpelle : « Moi je dis qu’une société qui laisse ses enfants en stabulation libre devant ces images-là, sans les accompagner d’une parole des adultes, c’est une véritable barbarie ».
Réalisé par : Anne-Marie Avouac
Produit par : Fabienne Servan Schreiber et Estelle Mauriac
Une production : Cinétévé avec la participation de France Télévisions de la RTBF et de la RTS.
Responsable Société & Géopolitique : Renaud Allilaire
Directrice de l’unité documentaires de France Télévisions : Catherine Alvaresse
À 23h35 - Débat "Pornographie: Jeunesse en danger" présenté par Julian Bugier
Après la diffusion de "Connexion intime", France 2 propose une nouvelle soirée continue animée par Julian Bugier.
Aujourd’hui il suffit d’un clic pour avoir accès gratuitement à un contenu pornographique, alors que la loi l’interdit aux moins de 18 ans. Alors à partir de quel âge et de quelle manière faut-il parler avec nos enfants des vidéos pornographiques sur lesquelles ils peuvent tomber ?
Julian Bugier donnera la parole à des jeunes qui témoigneront de leur rapport à la pornographie. Il accueillera aussi à des médecins, psychothérapeutes et professionnels de l’enfance qui alertent sur les dangers de l’exposition précoce à la pornographie et demandent aux pouvoirs publics de réagir face à l’accès de plus en plus banalisé à ces images illégales.
Sur FRANCE TV ÉDUCATION :
Dangers du porno : comment protéger les ados ?
Informer, décrypter, mettre en garde, libérer la parole, tels sont les objectifs de Dangers du porno : comment protéger les ados ?, 5 modules pédagogiques de 5 à 7 minutes réalisés par Anne-Marie Avouac en complément du documentaire de France 2 Pornographie : un jeu d’enfant et bientôt en ligne sur education.francetv.fr
Informer ? Oui, les parents et les communautés éducatives qui sous-estiment souvent la facilité avec laquelle les enfants peuvent accéder aux images pornographiques.
5 x 7 minutes Réalisation : Anne-Marie Avouac Production : Cinétévé / France tv éducation / Canopé, en partenariat avec La Ligue de l’enseignement et l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (Thomas Rohmer) Année : 2019