Une trentaine de psychologue est mobilisé pour recevoir les familles des victimes dans le gymnase de Seyne-les-Alpes. Venus d'Allemange, d'Espagne, elles sont attendues dans la journée. Les psychologues vont essayer de les sortir de la sidération, les aider à verbaliser.
Une équipe d'une trentaine de psychologues se prépare mercredi à accueillir les familles des victimes de l'accident de l'Airbus A320 de Germanwings. Une tâche délicate les attend: aider ces personnes à "sortir de la sidération pour les amener à verbaliser", disent deux d'entre elles. Le contraste est saisissant entre l'incessante agitation qui s'est emparée de la maison des jeunes de Seyne-les-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence), à la fois PC de crise et centre de presse où s'activent des dizaines de journalistes, et le gymnase qui la surplombe, à une volée d'escaliers.
D'abord l'écoute
C'est en effet dans cette petite salle des sports, où l'on n'entend que des chuchotements, que les familles seront conduites en premier lieu à leur arrivée.Occupant tout le terrain de basket, huit grandes tables ont été dressées, pourvues de huit chaises chacune. Les familles pourront y prendre place, et trouver le premier réconfort. D'abord, tout simplement, de quoi boire et manger. "Car dans ces situations, on fabrique beaucoup d'adrénaline et il est très important de s'hydrater et de manger", explique la psychologue Sylvie Lagier, 46 ans, membre de la cellule d'urgence médico-psychologique (CUMP). Il y a là à disposition des barres de céréales, des petits cakes, des jus de fruits, du café, du thé... Sur chacune des tables, aussi, des boîtes de mouchoirs, à la demande des psychologues.
"Sortir de la sidération"
Commencera ensuite leur mission essentielle: l'écoute.Car remettre les choses en mots, c'est déjà passer à une autre étape, c'est sortir de la sidération qui, si elle dure trop longtemps, peut générer un état de stress post-traumatique"
poursuivent Mme Lagier et sa collègue Claudine Ansieau, 40 ans, toutes deux psychologues en pédo-psychiatrie à l'hôpital de Digne et toutes deux bénévoles au SDIS des Alpes-de-Haute-Provence, "une grande famille", depuis 2002.
"Déchoquage "
Mettre des mots, c'est être acteur de quelque chose, cela aide à ritualiser, à commencer à faire ce chemin du deuil"
insistent ces deux femmes à la voix douce, qui rappellent que "ritualiser la mort, c'est ce qui nous différencie des animaux". Elles accompagneront peut-être les proches des victimes au petit village du Vernet d'où ils pourront voir, à distance, la montagne du drame: "et voir le lieu, cela a aussi valeur de rituel. C'est mettre une image sur les choses, et voir la dernière image que leurs proches ont peut-être vue".
On écoute, y compris la culpabilité qu'ils peuvent ressentir. Nous ne sommes pas dans le jugement, on ne tente pas non plus d'expliquer. Il s'agit d'accueillir la parole, quelle qu'elle soit. L'essentiel, c'est que quelque chose soit accueilli, et qu'ils ne demeurent pas isolés dans leur détresse"
soulignent-elles encore, parlant de "déchoquage".