BELLES HISTOIRES 2024. Nous l'avions rencontré fin septembre dernier. Quelques jours avant que son film La Quête soit projetée à Tourrettes-sur-Loup, son village des Alpes-Maritimes. Depuis, son histoire n’en finit plus de le faire rêver.
La quête est une comédie dramatique et fantastique, française. Jusque-là, rien de bien "hors du commun". La chose "pique" l’intérêt, c'est quand le réalisateur vous explique qu’il a tourné, en seulement 13 jours, premier défit, et avec un smartphone, second challenge !
Une véritable prouesse, en tout point de vue !
Le film La quête se veut "un conte moderne qui joue avec l'imaginaire et le réel" selon Jean-Baptiste Bagaria.
"Mon univers est plutôt barré, j'écris comme ça me vient, c'est souvent lié à la mythologie grecque. Parmi ses sources d'inspiration, Terry Gilliam (Bandits, bandits), ou encore l'univers d'Alexandre Astier (Kaamelott).
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Côté casting, le réalisateur est fin gourmet. Les rôles principaux sont tenus par des habitués des planches comme Samuel Nibaudeau et Pierre-Emmanuel Parlato ou encore Eric Khanthavixay, issu de l'univers du doublage. Christian Gonon de la Comédie française et Christophe Ntakabanyura, du petit écran avec la série de FranceTélévisions Candice Renoir, font également partie du casting.
Si le réalisateur a choisi de planter le décor, dans les Alpes-Maritimes à Tourrettes-sur-Loup pour son film, ce n'est pas un hasard.
Une partie de sa famille y vit et il y a passé la plupart de ses vacances. "Dans ce film, le village est un personnage en lui-même, je voulais qu'on sente son âme. Je voulais montrer des endroits atypiques comme les gorges du loup, une grotte, une carcasse d'avion. C'est aussi une déclaration d'amour au village" explique le cinéaste.
Liberté, liberté chérie
Voilà. L’essentiel est dit, sur le début de cette aventure, ou presque. Il manque juste quelques mots sur celui, par lequel tout a commencé. Journaliste de formation, Jean-Baptiste Bagaria, est, avant toute chose, un passionné de cinéma et de théâtre. Il a fait le conservatoire, où il a eu comme professeur, Christian Gonon de la Comédie française. Dans cette vie-là, il a donné la réplique à Mathieu Kassovitz, dans Le bureau des légendes, ou encore a joué un petit rôle dans la websérie Les ritals. C’est donc tout naturellement, sur les plateaux, qu’il a eu la révélation :
C’est là que je me suis rendu compte, qu’en fait, ce que je voulais, ce que je voulais vraiment, c’était écrire, réaliser et mettre en scène.
Jean-Baptiste Bagaria, réalisateur.
Une passion qui, selon lui, ne lui autorise aucun compromis : "J’ai vraiment envie de créer ce que je veux et ce que j’aime. C’est pour ça, je garde mon métier de journaliste. Pour être totalement libre et indépendant dans les films que je veux faire".
Voilà qui explique donc cette petite "excentricité" de tourner avec un smartphone et en 13 jours : "J’ai mis cinq ans à écrire "La quête". Je ne voulais faire aucune concession. Je voulais faire les choses comme je les avais pensées. Ça s’est imposé à moi. C’est quelque chose qui me traverse et je dois le faire. Réaliser "La quête", tel que je le voulais moi et non de la façon, qu’un producteur, ou un partenaire financier aurait voulu que ce soit. J’ai fait ça pour moi, mais aussi pour ceux qui m’ont fait confiance, qui m’ont aidé à réaliser ce projet et, plus encore, pour ceux qui y ont cru."
"La quête", c’est une quête, une odyssée. Même si ça n’a pas été facile.
Jean-Baptiste Bagaria
Une odyssée en quelque sorte, en effet !
Si ce n’est que cet Ulysse-là ne succombe pas aux charmes du chant des sirènes et que ses fidèles compagnons l’ont suivi jusqu’à la fin de l’aventure. " On a tout fait tout seul. Nous étions un groupe de vingt comédiens et huit techniciens. À 70 %, nous avons tourné toutes les scènes en extérieur ! En plus de mon travail de réalisateur, j'ai même aidé à faire les costumes, c’est pour vous dire ! J’ai fait le chauffeur aussi, le décorateur ! Chacun de nous a largement dépassé notre fonction de base."
Au lendemain de la projection, l'équipe du film espérait trouver des distributeurs pour multiplier les projections dans d'autres villes.
L’après de la première...
"La première chose positive, à la fin de la première projection, à l'espace Paul Ceuzin, de Tourrettes-sur-Loup, c’est que le maire, la chargée de communication de la mairie et les habitants ont adoré le film. La municipalité souhaiterait, d’ailleurs, organiser des projections en plein air, cet été".
J'étais identifié comme réalisateur. Pour moi c’est une véritable chance pour la suite.
Jean-Baptiste Bagaria
Un retour qui a conforté le réalisateur, dans le bien-fondé de sa création. Mais cela ne s’arrête pas là. Quelques semaines plus tard, le jeune cinéaste est invité à une réunion qui rassemble différentes personnes autour du projet "Les talents de la Côte d’Azur". "C’est génial, maintenant tous les deux mois, je suis invité à ces réunions où je peux rencontrer des professionnels. Je suis identifié comme réalisateur et je peux participer à des appels à projets où sont présentés différents scenarii à des producteurs et à des distributeurs. Me retrouver là pour moi, c'est une véritable chance pour la suite."
Bien, mais bon !
Il ne faut pas se voiler la face. Le milieu du cinéma n’est pas un monde facile. Jean-Baptiste Bagaria, en a bien conscience : "Sur 100 distributeurs que j’ai contactés, je n’ai eu que 10 retours. Et tous négatifs. Mais personne ne m’a dit, "bon écoutes, t’es gentil, mais ton film, il est pourri". Alors, je ne lâche rien."
Pas de quoi le décourager. Le jeune réalisateur compte bien persévérer : " Je pense que ce film a toute sa place dans une salle d’art et essai. Alors, dès début janvier, je vais attaquer tous cinémas d’art et essai en France. Il va bien y en avoir qui vont être intéressés. Mon idée, ce n’est pas forcément de faire de l’argent, c’est que le film soit vu. Je sais que c’est un log chemin, surtout quand on est en dehors du système".
Et pour être en dehors du système, il est en dehors du système. Ce jeune scénariste n’a sollicité aucune aide. Ni au Département, ni à la Région. Ni à une entreprise de production. Ni au CNC. Il y est allé seul : "J’y suis allé en mode guerrier. Libre et indépendant. Mais, je constate qu’il y a quand même des limites. Il ne faut pas se mentir".
La reconnaissance n’a pas de prix
Réaliste et déterminé à y arriver, il l’est. Et, si parfois, un infime doute peut s’immiscer, il lui suffit d’une anecdote racontée par sa mère pour lui redonner la foi : " Il y a quelques jours, ma mère a rencontré sur le marché de Noël à Tourrettes, l’artiste George. Elle lui a demandé de mes nouvelles et lui a dit de me dire : " son film m’a rappelé l’univers de Cocteau". On ne pouvait pas me faire plus beau compliment. Surtout venant d’une sculptrice, comme elle. Ça m’a redonné un coup de boost. Et ça m’a donné encore plus envie de ne pas lâcher".
Moi, je suis prêt à me prendre des portes en pleine tête. Et encore, quand la porte, elle s’ouvre ! Ça fait partie du jeu.
Et d’ajouter :"Mon film s’appelle "La quête" et je le vois comme une quête. Comme une odyssée. Je dois aller jusqu’au bout de ma quête et de ma démarche, même si parfois ce n’est pas facile. Et, à un moment, à force de travail et de persévérance, les choses aboutissent. J’en appelle à toutes les salles d’art et essai".
Et le jeune réalisateur de conclure : "La finalité, quand "La quête" aura été projetée au cinéma, est de mettre le film sur YouTube pour que les gens du village et de la région, qui sont intéressés, puissent regarder le film. Pour moi, en fait, c’est hyperimportant de pouvoir le donner, de l'offrir aux gens. Ça me tient à cœur. Je ne lâcherai rien".