En visite ce vendredi soir à Nice, Marion Maréchal n’a pas caché les grandes ambitions qu’elle avait pour la Côte d’Azur, cette « terre extrêmement prometteuse » selon la vice-présidente exécutive de Reconquête, le parti d’Eric Zemmour. Pour ne pas lui laisser le champ médiatique libre, une contre-manifestation était organisée dans le même temps par la gauche locale, qui entendait dénoncer la banalisation des idées d’extrême droite.
À l’opposé l’un de l’autre sur l’échiquier politique, mais à seulement 700 mètres de distance ce vendredi soir à Nice : d’un côté, le rassemblement du parti d’extrême droite Reconquête, square Durandy. De l’autre, une contre-manifestation de la gauche, place Garibaldi. Deux salles, deux ambiances, deux visions de la France.
Square Durandy, les organisateurs avaient invité les Niçois à « la fête de la droite niçoise ». La droite, pas l’extrême droite : un choix sémantique assumé pour tenter de normaliser le parti d’Eric Zemmour. En fait, de droite, il n’y aura aucun membre des Républicains présents, uniquement des soutiens d’Eric Zemmour, au premier rang desquels Philippe Vardon, ancien élu Rassemblement national, chef du premier groupe d’opposition à Nice. Mais celle que les militants et les sympathisants sont venus voir, c’est Marion Maréchal. L’ancienne députée RN du Vaucluse sait qu’elle foule les terres de Christian Estrosi, celui qui l’a battue aux élections régionales de 2015, où elle était pourtant arrivée en tête à l’issue du premier tour.
Mais la vice-présidente de Reconquête est persuadée que son parti a une carte à jouer dans les Alpes-Maritimes, qu’elle imagine être le laboratoire de sa réussite électorale.
Transformer des victoires politiques et culturelles en victoire électorales
"Nous voulons faire des Alpes-Maritimes et plus largement de la région Provence-Alpes-Côte le bateau amiral de la reconquête et nous voulons à cette occasion reconstruire une nouvelle majorité au Parlement européen avec nos amis de droite dans les différents pays."
Marion Maréchal, vice-présidente exécutive de Reconquête
Consciente qu’elle doit « transformer ses victoires politiques et culturelles en victoire électorales », Marion Maréchal s’est adressée directement aux électeurs des Républicains :
"Nous voyons beaucoup de déçus de la droite de compromission venir vers la droite de conviction que nous représentons."
Marion Maréchal, vice-présidente exécutive de Reconquête
Et de s’en prendre aux deux figures tutélaires de la droite locale :
« Nous avons d’un côté Christian Estrosi qui d'ores et déjà fait partie de la majorité d’Emmanuel Macron, et de l’autre Eric Ciotti qui manifestement aspire à vouloir l’être ».
Marion Maréchal, vice-présidente exécutive de Reconquête
Reconquête veut séduire les déçus de la droite classique
La droite républicaine est morte, vive la droite nationale ? Dans le public, les sympathisants sont nombreux à le penser. « Monsieur Estrosi est quelqu’un de très bien, mais c’est plus Giscard que Chirac du RPR du bon vieux temps » estime l’un. « La droite n’est jamais où on l’attend, regrette un autre participant. Elle est macroniste, donc on n’y croit plus. La droite classique, c’est fini ».
Tous sont venus écouter avec attention les propositions de Marion Maréchal qui sait quels thèmes parleront à ses électeurs : l’identité, l’immigration, l’insécurité, mais aussi les prélèvements obligatoires, la théorie du genre et même, l’écriture inclusive.
La gauche locale dénonce une stratégie de stigmatisation propice à la violence
Des idées démagogiques et mortifères, assène-t-on à moins d’un kilomètre de là. Associations, syndicats, partis politiques : une trentaine d’organisations de gauche s’étaient donné rendez-vous place Garbaldi. Une contre-manifestation organisée à la dernière minute, pour contrer, au moins médiatiquement, le discours de Marion Maréchal.
« Nous refusons la banalisation des thèses d’extrême-droite, affirme David Nakache. Le président de l’association « Tous citoyens » estime que Reconquête partage les mêmes idées que les partis néofascistes italiens, polonais, hongrois ou suédois. Surtout il reproche au parti d’Eric Zemmour de désigner des cibles.
« Quand ils ont défilé à Saint-Brevin et qu’ils ont ciblé le maire, ils ont ensuite été débordés par des mouvements d’ultra droite (…) et on sait ce qui s’est passé pour le maire de Saint-Brevin : sa voiture et son domicile ont été incendiés »
David Nakache, président de l'association "Tous citoyens"
David Nakache accuse le leader local de Reconquête, Philippe Vardon, d’user des mêmes stratégies de stigmatisation lorsqu’il manifeste par exemple devant un gymnase réquisitionné à Menton pour héberger des mineurs isolés.
Mais quel écho trouveront ces propos dans l’électorat niçois? Au conseil municipal de Nice, et au conseil métropolitain de Nice Côte d’Azur, la gauche est essentiellement écologiste et s’empare peu des questions d’immigration, laissant le champ libre à la droite radicale et extrême, qui compte bien peser de tout son poids, lors des prochaines élections municipales, dans 3 ans.