Patrick Amoyel : "Quand les frères de sang sont aussi des frères de jihad "

Patrick Amoyel, psychanalyste et professeur de psychopathologie à Nice, travaille au sein d'une association baptisée " Entr'autres ", à la déradicalisation de jeunes séduits par les thèses jihadistes. Au contact des familles, il a remarqué la présence de nombreuses fratries.

Les frères Merah en 2012 à Toulouse dans le sud-est de la France, Kouachi lors de l'attaque contre Charlie Hebdo à Paris il y a un an, Abdeslam et Abaaoud en novembre également dans la capitale française, Tsarnaev qui ont monté l'attentat à la bombe contre le marathon de Boston en 2013 : au cours des dernières années, de nombreux frères de sang sont devenus frères d'armes pour semer la terreur chez ceux qu'ils considèrent être des "ennemis de l'islam".

Une bulle de radicalisation parfois à l'insu de la famille

Les cellules jihadistes comportent de nombreuses fratries, c'est ce que constate donc Patrick Amoyel, psychanalyste et professeur de psychopathologie à Nice. Il travaille, notamment au sein d'une association baptisée Entr'autres,
à la déradicalisation de jeunes séduits par les thèses jihadistes.
En leur sein, l'influence fonctionne dans les deux sens", explique t-il.

 

Ils s'enferment rapidement dans une sorte de confusion psychique. Il y a quelque chose d'un peu fou, d'un peu irrationnel dans ces processus. Une prise de risque un peu adolescente, même s'ils ne sont pas toujours adolescents.
 




Psychologue à l'association Entr'Autres, Amélie Boukhobza ajoute : "C'est souvent le plus jeune, qui a plus de choses à prouver, une place à trouver, qui influence l'aîné. L'aîné n'a pas nécessairement l'ascendant".
Une fois que cette bulle de radicalisation s'est mise en place, souvent à l'insu d'autres membres de la famille qui constatent simplement que deux ou trois frères se sont rapprochés et se voient souvent, murmurent à leur approche, elle acquiert une cohérence et une résistance à toute épreuve.  

Une consolidation affective difficile à briser

"Cela peut s'élargir aux cercles d'amis proches, avec par exemple le meilleur copain qui épouse religieusement la soeur, et ça crée des cellules très homogènes et confusionnelles du point de vue psychique et affectif", ajoute Patrick Amoyel.

A ce niveau intervient une consolidation affective mutuelle qui est très solide, difficile à briser. On l'a vu très souvent. Et ça ne relève pas du tout de la maladie mentale, c'est pas de l'ordre du psychotique ou du psycho-pathologique.
Ça tourne en boucle, l'un influence les autres et vice-versa, et ça peut partir en vrille


dit-il, évoquant "une envie de passer la limite, d'aller vers la rébellion absolue. Et ça peut finir en action terroriste".
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