Deux ans de prison requis contre le couple aux 271 oeuvres de Picasso

L'avocat général a requis lundi deux ans de prison avec sursis contre l'ex-électricien Pierre Le Guennec et son épouse Danielle poursuivis devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour le recel de 271 oeuvres de Picasso, refusant de croire à leur version d'un "don".

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L'avocat général ne croit pas à la version des époux Le Guennec, jugés en appel pour le recel de 271 oeuvres de Picasso. Il a requis à leur encontre  deux ans de prison avec sursis, les accusant d'avoir "menti" et refusant de croire à leur version d'un "don".
Ces réquisitions correspondent aux condamnations du couple en première instance, en mars 2015, par le tribunal correctionnel de Grasse. Les prévenus avaient fait appel du jugement, ainsi que le parquet. Ils encourent une peine maximale de cinq ans de prison et 375.000 euros d'amende ou la moitié de la valeur des biens recelés.
Leurs avocats ont demandé un complément d'information ou à défaut leur relaxe.
"Je ne crois pas à la version du don" soutenue par les prévenus, a affirmé lundi l'avocat général Christophe Raffin.

Je pense que c'est une soustraction à un Pablo Picasso vieillissant et à Jacqueline, plus que jamais focalisée sur son mari


Jusqu'à cette audience, les époux Le Guennec avaient affirmé avoir obtenu le sac qui contenait un carton avec les oeuvres, des mains des époux Picasso en 1971 ou 1972, avant la mort du peintre en 1973. Lundi, ils ont soutenu que Jacqueline Picasso, dernière épouse de l'artiste, leur avait fait don de ces 271 oeuvres après la mort de l'artiste.

On peut se demander si ce qu'on nous a présenté comme vérité aujourd'hui n'est pas encore un mensonge


a lancé l'avocat général. "M et Mme Le Guennec, sur plusieurs points vous avez menti", a-t-il accusé.
En début d'audience, Pierre Le Guennec, la voix tremblante et l'expression maladroite, avait expliqué que "Madame Picasso Jacqueline avait des problèmes avec Claude Picasso", fils de l'artiste. Quelques mois après le décès du peintre,

elle m'a demandé de bien vouloir mettre chez moi en réserve des sacs poubelle


entre 15 et 17, a poursuivi l'ancien électricien.
Plus tard, elle lui aurait demandé de les lui rendre, et l'aurait invité à conserver le dernier en disant: "gardez-le, c'est pour vous".
Selon le prévenu, il s'agissait "peut-être" de faire échapper ces sacs à l'inventaire de succession. Il a affirmé ne pas avoir dit la vérité plus tôt par "peur qu'on (l)'accuse, ainsi que madame, d'avoir volé ces sacs".
Me Eric Dupond-Moretti, avocat des prévenus, a affirmé avoir obtenu "difficilement" cette version de son client il y a seulement quelques jours.

"J'ai la certitude absolue de leur innocence"


a-t-il plaidé.
"J'ai la certitude que Jacqueline a caché un certain nombre d'oeuvres, pas pour faire du recel".

"Vraie vénération de petites gens"


L'avocat a demandé un complément d'information pour "vérifier si d'autres oeuvres ont pu être mises de côté par Jacqueline Picasso, pas forcément à des fins marchandes", demande à laquelle s'est opposé l'avocat général.
Me Antoine Vey, autre avocat du couple, a plaidé la relaxe "à titre subsidiaire", si le supplément  d'information n'était pas accordé par la Cour.

"Il est assis sur une fortune et il va pas essayer d'écouler un ou deux trucs chez un galériste véreux ? (...)


Et ils sont allés chez Picasso amener les oeuvres, c'est rationnel ça ?


a encore lancé Me Dupond-Moretti.
Les oeuvres, non signées ni inventoriées au moment du décès du peintre en 1973, avaient refait surface lorsque Pierre Le Guennec s'était présenté à Claude Picasso afin d'en faire authentifier 180 ainsi qu'un carnet de 91 dessins. Les héritiers
avaient aussitôt porté plainte.

Insistant tout au long de l'audience sur les origines et l'éducation modestes du couple septuagénaire, Me Dupond-Moretti a souligné la "déférence" des époux Le Guennec pour celle que "des années après sa mort, ils appellent encore Madame".
Une "vraie vénération de petites gens", a-t-il observé.

"Blanchiment international d'oeuvres volées"


Jean-Jacques Neuer, avocat de Claude Ruiz-Picasso (fils du peintre et seul représentant des parties civiles présent à l'audience)  a dénoncé un "mensonge hallucinant", affirmant que cette affaire touchait aux "aspects les plus noirs et puissants du marché de l'art" et soutenant la thèse d'un "blanchiment international d'oeuvres volées".
Le jugement sera rendu le 16 décembre.
En première instance, le tribunal avait décidé de remettre les oeuvres au fils de l'artiste, Claude Ruiz-Picasso, représentant les six héritiers au procès. Le ministère public avait alors requis cinq ans de prison avec sursis à l'encontre du couple, estimant qu'il avait porté préjudice à "la confiance" et à "la mémoire" de Pablo Picasso.
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