"Cet été, il va y avoir des morts" : le cri d’alarme des soignants pour l’hôpital public

Les soignants se mobilisent partout en France, à l’appel de neuf organisations syndicales. Ils dénoncent un hôpital public à bout de souffle depuis des années. Témoignages de celles et ceux qui, une fois la crise Covid passée, se sentent toujours abandonnés.

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Cavaillon, Sisteron, Manosque, Draguignan… Les fermetures partielles de services d’urgence dans les hôpitaux publics continuent en région Paca.

En France, ce sont 67 établissements hospitaliers qui ont dû, faute de personnel, se résoudre à fermer partiellement leurs urgences.

Un cri d’alarme sans cesse renouvelé depuis des semaines. Et même des années.

"L’ espoir, cela fait bien longtemps que l’on en a plus", se désole Eric Audouy. Il est infirmier à l’hôpital Sainte Marguerite à Marseille.

On pourrait croire qu’une fois la crise Covid passée, il aurait pu retrouver une vie normale. C’est tout le contraire : "les conditions de travail ne se sont pas améliorées… on vit avec un sentiment de lassitude au fil des années".

Le Ségur a bien augmenté les salaires pour une partie des soignants de près de 180 euros par mois : "cela ne rattrape pas les vingt années de retard que nous subissons sur nos salaires", se désole l’infirmier.

Ce dernier dénonce aussi une "déshumanisation" dans la prise en charge des patients : "avec les tâches administratives, les actes qu’on enchaîne comme des machines sans prendre en compte l’accompagnement psychologique des patients, ou des familles, c’est insupportable".

A la fin de la journée, on se dit qu’on a mal fait notre travail. 

Eric Audouy

Syndicat Coordination Nationale Infirmière

A l'AP-HM, il manque 165 soignants

Les burn-out, les arrêts maladies, les réorientations vers le secteur libéral ou privé s’accumulent. Et il faut palier à l’absentéisme dans les services : "à l’AP-HM, il manque 165 soignants sur 8.000, dans des services exposés comme les urgences, la réanimation ou les blocs opératoires", constate le professeur Jean-Luc Jouve. Il est président de la commission médicale de l’AP-HM.

Une situation qui touche aussi les petits établissements de périphérie. Ces derniers ferment leurs services d’urgence la nuit, ou les week-ends : "par effet domino, les patients sont dirigés chez nous à Marseille".

Conséquence, c’est un véritable entonnoir qui se forme aux urgences. Les délais de prise en charge peuvent atteindre huit heures.

Christophe Combes est ambulancier, et membre du collectif Santé en Danger. Lui, dénonce "la fermeture programmée de l’hôpital public". Avec les fermetures de ligne de SMUR, comme à Aix ou à Manosque, les temps de transport et les kilomètres parcourus s’allongent.

"Si le SMUR d’Aix est fermé, il faut diriger les patients vers l’hôpital Nord ou Pertuis. Cela fait des délais d’intervention parfois d’une demi-heure. Pour un patient en arrêt cardiaque, cela peut être catastrophique", explique-t-il. En temps normal, ces délais sont de dix à quinze minutes. 

L'été, la fréquentation des urgences en hausse de 20%

"Cet été, il va y avoir des morts. Avec les délais d’intervention, les fermetures des SMUR, les ambulances de réa qui ne seront pas disponibles, c’est dangereux pour les patients", dénonce-t-il.

Une situation tendue constatée également par le professeur Jouve : "la population dans la région pendant les mois de juin, juillet et août aux urgences va augmenter de 20%".

La vague de touristes va avoir besoin de soin, et le personnel soignant de vacances.

Pr. Jean-Luc Jouve

Pdt de la commission médicale de l'AP-HM

"Une pénurie de soignants pourrait avoir encore de graves conséquences sur la prise en charge des patients".

Alors comment rendre attractif les métiers de la santé dans le secteur public ? Les syndicats demandent des postes, des formations, et une revalorisation salariale. En bref, une reconnaissance pour celles et ceux qui tiennent le navire de plus trois ans.

"Dans le public, on n’y va pas pour le salaire, mais par conviction, ou par vocation. Mais la situation n’est plus supportable par les personnels", explique Christophe.

C’est pourquoi ils attendent des réponses, et espèrent que la « mission flash » sur les urgences, annoncées par Emmanuel Macron ne sera pas qu’un "énième rapport" posé sur une table.    

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