Trois mois après le décès de sa mère, un habitant de Cassis, dans les Bouches-du-Rhône, a appris qu'une erreur d'identité s'est produite et qu'il n'a pas dispersé les cendres de sa parente, mais d'une inconnue . Deux corps ont été confondus à l'institut médico-légal. Il raconte.
Stéphane, patron pêcheur à Cassis a perdu sa mère le 3 août dernier. Conformément à ses dernières volontés, il a dispersé ses cendres dans la mer. C'est par un appel de la police criminelle de Marseille, que bien des mois plus tard, à la mi-novembre, il a découvert que la défunte incinérée n'était pas celle qu'il pensait. Une enquête a été ouverte, a indiqué à France 3 Provence-Alpes, le procureur de la République Nicolas Bessone ce mardi 10 décembre.
Un appel et des certitudes envolées
"Mon premier réflexe a été de penser que ma mère avait été assassinée", témoigne le Cassidain, encore un peu abasourdi, trois semaines après un coup de fil. "Ils m'ont demandé de venir, sans m'en dire plus, c'est quand ils m'ont présenté des objets qui appartenaient à ma mère que je ne suis posé des questions", se souvient-il. C'est avec un petit Bouddha entre les mains qu'il apprend la nouvelle : "elle les collectionnait, il y en avait beaucoup chez elle". Alors celui-ci a dû être pris avec elle par inadvertance.
Des noms de famille identiques et des prénoms très semblables
C'est une tout autre histoire qu'il découvre. "Au mois d’août 2024, à quelques jours d’intervalle, deux décès constatés à domicile ont donné lieu à l’ouverture par le parquet de Marseille d’enquêtes aux fins de recherche des causes de la mort des défuntes, dont les noms de famille étaient identiques et les prénoms très semblables, sans qu’il existe un lien entre elles", détaille le parquet dans un communiqué.
Les deux corps ont été confiés à l'IML pour vérifier les causes de leur mort, sur instruction du parquet, pour un examen de corps interne pour l'une des défuntes et une autopsie pour l'autre.
"En dépit d’une identification des défuntes conforme à la réglementation", l’autopsie est pratiquée sur la mère de Stéphane, alors que ce dernier se voit remettre l'autre corps par l’IML, confirme le parquet. Stéphane est autorisé à faire incinérer le corps. Le cercueil est déjà scellé, et consigne est donnée de ne pas présenter la dépouille aux proches, car trop endommagée, selon Stéphane.
"Un dysfonctionnement au sein de l'IML"
"C'est avec la différence entre l'ADN des lieux de la mort et celle du corps, qu'ils se sont rendu compte qu'ils n'avaient pas la bonne personne", détaille Stéphane. Par mesure de précaution, il subit lui-même des tests ADN. Deux semaines plus tard, tout le monde en est certain : c'est bien sa mère qui est restée de longs mois à l'IML.
"Lorsque l’erreur a été découverte par la direction de l’IML, celle-ci a informé le parquet de Marseille, qui a ouvert une enquête des chefs d’atteinte à l’intégrité d’un cadavre et d’organisation de funérailles ayant un caractère contraire à la volonté du défunt, afin de comprendre le mécanisme de dysfonctionnement survenu au sein de l’IML et de déterminer d’éventuelles responsabilités", précise le communiqué du parquet. De son côté, l'institut déplore cet "événement grave" dans un communiqué, précisant collaborer avec la police et la justice pour "déterminer les circonstances exactes qu'ont conduit à l'inversion de ces deux corps".
De nouvelles funérailles
Fils unique, Stéphane pensait avoir déjà dit "adieu" à sa mère. Il lui faut tout recommencer : "ça remue tout, on refait la même chose, avec les mêmes musiques, les mêmes textes". Une nouvelle cérémonie aura ainsi lieu ce mercredi 11 décembre. À ceci près qu'il ne pourra pas la faire habiller étant donné le temps passé.
Ils m'ont proposé de mettre la robe dans le cercueil, à côté d'elle, mais je ne vois pas l'intérêt.
Stéphane, le filsFrance 3 Provence-Alpes
Les deux familles ont été reçues ce mardi par le procureur de la République, qui indique que la dépouille conservée à l'IML sera remise à sa famille. Les frais des nouvelles funérailles seront pris en charge par l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM). Stéphane n'est pas vindicatif, il pense à l'autre famille, qui ne pourra jamais dire au revoir à sa propre défunte, "selon les souhaits de ma maman, j'ai dispersé ses cendres en mer", poursuit le pêcheur.
"Eux, ne pourront jamais dire au revoir".
L'homme a déjà informé ses interlocuteurs, auprès du parquet de Marseille et d'une association de victimes, qu'il se tenait à disposition de cette autre famille, pour les emmener en bateau, là où il a dispersé les cendres. "Je ne sais pas s'ils sont croyants, si l'incinération était la volonté de cette personne", regrette-t-il. "Pour nous, il faut tout recommencer, mais au moins, nous respectons les souhaits de ma mère. Eux, ne pourront jamais dire au revoir".
Pour cette nouvelle cérémonie, ce sont les services du parquet qui se sont occupés de tout. Notamment pour des questions légales. Officiellement, c'est la seconde fois qu'une demande d'incinération est faite, pour la même personne.