"Le MMA n'est pas un sport de voyou" : à Marseille, les pratiquants attendent sa légalisation officielle

C’est une révolution dans le monde du MMA (arts martiaux mixtes). Souvent décrié, ce sport de combat est désormais en voie de légalisation en France. Rencontre avec des passionnés dans la région PACA, deuxième plus gros foyer français de MMA.

Les cheveux rouges et flamboyants, les phalanges tatouées et le blanc de l’œil encore tacheté de sang. À 27 ans, Jennifer Trioreau, hôtesse d’accueil, a fait une entrée fracassante chez les professionnels de MMA le 19 janvier dernier, à Ljubljana en Slovénie.

Dix jours plus tard, nous la retrouvons dans son club FKA, à Marseille, où elle s’entraîne aux côté de 90 autres adhérents dont cinq femmes. Ici, tout le monde la surnomme Ariel, la petite sirène 2.0., ou encore Bulldozer.

Ses premiers pas dans la cage à l’étranger ? "Un vrai choc d’adrénaline" pour cet ancien membre de l’équipe de France de sport de combat pied-poing, le kick-boxing.

"Je me posais la question de ma légitimité dans cette nouvelle discipline. Mais je me suis sentie à ma place. Et après ce combat, je me dis que plus rien ne peut m’arriver dans la vie" sourit-elle, plus confiante.

Loin de l’image qu’on s’en fait,

Le MMA n’est ni un sport de voyou, ni un sport dangereux, ni un sport qui dégrade.

Pour Jean-Michel Foissard, son coach et "deuxième père", hors de question de nuire aux valeurs de ce sport de combat.

"C’est une passion certes un peu irrationnelle mais c’est comme le saut en parachute !" balance-t-il. Depuis 20 ans, il a déjà organisé une quarantaine de combats de MMA en Suisse et veut adoucir l’opinion publique, "trop souvent manipulée par les médias".
"Le MMA n'est pas un sport de voyou" : à Marseille, les pratiquants attendent sa légalisation officielle

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Publiée par France 3 Provence-Alpes sur Lundi 3 février 2020

Le MMA, derrière le rugby dans le classement des sports dangereux

"Pas plus dangereux que le rugby ou le football américain", rétorque Thibaut Ropp, en essuyant la sueur qui ruisselle sur son visage.

On sait ce qu’on fait, on est conscient du risque qu’on prend. C’est plus une pratique de respect que de violence à proprement dit.

Combattant professionnel depuis trois ans, il espère un changement de regard sur la discipline avec sa légalisation.

Le 21 janvier dernier, la ministre des sports Roxana Maracineanu a privilégié l'encadrement des premiers pas officiels du MMA par la fédération française de boxe anglaise. Après un "avis très réservé" mais seulement consultatif du CNOSF (Comité national olympique et sportif français), le ministère doit rendre sa décision finale dans les jours à venir.

"C'est grave comme on est trop peureux en France !", rétorque Jennifer Trioreau, combattante MMA. Et maintenant que c’est en voie de légalisation, il va falloir lifté tout ça.

Le MMA, arts martiaux mixtes en français, est un mélange de cinq sports de combat : le jujitsu brésilien, la boxe, la lutte, le muay-thaï et le grappling. Il est composé de 3 rounds de 5 minutes. Et bien qu’on puisse penser le contraire, il existe des règles ! On ne peut ni mordre, ni tirer les cheveux, ni mettre des doigts dans les yeux ou dans les parties intimes, par exemple.

"Le MMA, c’est un sport protégé. Au bout de trois percussions sans réaction de la part de l’adversaire, l’arbitre intervient. Les accidents sont très rares. Un combattant peut se retrouver avec des entorses mais pas avec des lésions au cerveau, comme ça peut être le cas dans la pratique de la boxe anglaise", estime Mongi Zetouni, arbitre depuis 2010.

Pour Jean-Michel Foissard, chirurgien cardiaque dans la vie professionnelle, il reste tout de même un travail à faire autour de la légalisation du MMA : "Il faut qu’on arrête avec les certificats médicaux qui datent de six mois !" 

"On devrait s’inspirer des pays anglo-saxons. Là-bas, il n’y a pas de fédération de MMA mais des commissions arbitrale et médicale. Sur place, les combattants font un examen clinique plus poussé avec un scanner cérébral avant le combat pour détecter la présence d’un œdème", ajoute le médecin.

"Ce risque lié aux percussions à la tête existe dans tous sports à choc, comme le rugby. Après le combat, des examens neurologiques sont réalisés si les combattants ont perdu connaissance."

Autre point de blocage avec la légalisation : la cage, soit l’enceinte grillagée sur les côtés et tapissée au sol dans laquelle s’illustrent les combattants.

Les détracteurs du MMA parlent de combats de coqs, d’animaux enfermés !

"Moi, en tant que pratiquant et arbitre, je considère qu’il n’y a pas mieux niveau sécurité, surtout par rapport à la lutte au sol et à la technique de projection, examine Mongi Zetouni. Sur un ring, un combattant pourrait passer à travers les cordes et faire une chute qui lui vaudrait trois côtes cassées."

Se retrousser les manches sur les aspects médicaux, réglementaires et arbitraux, voilà la mission désormais confiée à la fédération française de boxe anglaise.
Côté enseignement, Jean-Michel Foissard estime que lui et ses semblables font le nécessaire depuis plus de 25 ans : "Il n’y a pas de charlatans qui blessent ou qui font n’importe quoi avec leurs combattants de MMA. C’est un milieu où tout le monde se connaît et où dans 90% des cas tout est bien structuré. Donc à ce niveau-là, on ne part pas de zéro."

Lui se considère même investi d’une mission d’éducation sportive, celle d’inculquer les valeurs du MMA, summum des arts martiaux. 

Après IDF, PACA deuxième région plus influente de MMA

Aujourd’hui en France, il y aurait entre 30.000 et 50.000 pratiquants de MMA. Difficile d’estimer ce nombre avec précision tant les clubs déguisés de MMA se multiplient.

À Marseille, "sur 60 clubs de boxe, de sambo ou de pancrace, 40 pratiquent le MMA, voire plus ! C’était un peu leur couverture de camouflage jusqu’à aujourd’hui", estime Mongi Zetouni, arbitre. Si bien que Provence-Alpes Côte-d’Azur est devenue la deuxième plus grande région influente du MMA, après Ile-de-France.
 Une popularité régionale dont on peut attribuer le mérite à deux frères avignonnais. James et Sami Schiavo ont été les précurseurs du MMA dans le sud, les premiers à avoir fait des combats dans les années 90.

"On apprenait les techniques à l’étranger comme des autodidactes. Il n'y avait aucune structure dédiée, on louait nos locaux dans des zones industrielles. Un mélange entre l’aventure et la galère !" se souvient James Schiavo.

Depuis, ils ont créé la Bushido Academie, le seul club du sud de la France capable d’envoyer des combattants à l’UFC (Ultimate Fighting Championship). "Le graal", une organisation américaine de MMA, reconnue comme la plus importante ligue mondiale de ce sport. Avec comme image véhiculée dans les médias, celle de millions de dollars générés, d’une violence spectaculaire et forcément d’un show à l’américaine. "Combattre à l’étranger, ce sont des difficultés supplémentaires : un terrain plus hostile, une pratique différente, des frais liés au voyage. Au niveau européen, un bon combattant professionnel gagne aujourd’hui 1500 euros maximum par combat et s’il en fait trois par an, c’est le bout du monde !" lance l’ancien champion de MMA James Schiavo.

Entre carrière courte (4 ans en moyenne) et préparation intense (environ 8 semaines pour un combat), difficile de s’accrocher.

Mais que ces combattants patientent encore un peu… La rumeur court qu’à la rentrée en septembre prochain, on prévoit déjà d’organiser des compétitions de MMA en France et notamment à Marseille.
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