Y-a-t-il vraiment moins de policiers à Marseille ? Qu'en est-il trois ans après le lancement du plan "Marseille en grand" ?

Le député RN des Bouches-du-Rhône, Franck Allisio a interpellé le ministre de l'Intérieur ce mardi 22 octobre à l'Assemblée Nationale, soulignant la baisse du nombre de policiers affectés à Marseille depuis 2016. Nombreux départs, crise des vocations, nombre de postes : France 3 Provence-Alpes fait le point sur la réalité des chiffres.

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"Monsieur le Ministre, dans un rapport rendu public ce matin par la Cour des comptes, nous apprenons que la deuxième ville de France, Marseille, aux enjeux pourtant sécuritaires hors-norme, comme l'indiquent les magistrats, compte moins de policiers aujourd'hui qu'en 2016 à la veille de l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron". Le député RN des Bouches-du-Rhône Franck Allisio a interpellé, ce mardi 22 octobre, le ministre de l'Intérieur, soulignant une baisse d'effectifs de police importante jusqu'en 2020." Pire encore, les magistrats précisent que le différentiel entre entrées et sorties des effectifs marseillais fait apparaître une nette dégradation du nombre de policiers affectés à Marseille entre 2016 et 2020, toutes filières confondues. Les Marseillais et les Provençaux n'attendent plus des paroles, mais des actes. Alors, Monsieur le Ministre, agissez, agissez maintenant !", a insisté le député. 

Des policiers affectés à Marseille dès leur sortie d'école

Le Ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, en réponse à Franck Allisio, s'est engagé à affecter 75 fonctionnaires sortants d'école en 2024 pour permettre de remplacer des effectifs vacants, mutations et départs en retraite, et à "expertiser le rapport de la Cour des comptes chiffre après chiffre", afin d'en "tirer les leçons".

Le Préfet des Bouches-du-Rhône et de la région PACA, Christophe Mirmand nous confirme cette baisse jusqu'en 2020, et souligne que les choses ont évolué depuis l'annonce du plan Marseille en grand, lancé en septembre 2021. "Le président de la République et le ministre de l'Intérieur s'étaient engagés à renforcer les effectifs de la Police Nationale à Marseille : plus de 300 fonctionnaires de Police ont ainsi été affectés. Par ailleurs, trois unités de force mobile et une complémentaire, la CRS 81, ont été engagées également, a indiqué Christophe Mirmand. L'annonce du chef de l'État en septembre 2021 tablait sur 300 policiers en renfort à la compagnie de sécurité publique de Marseille.

"Comme à Paris, beaucoup de jeunes policiers démarrent à Marseille"

Le Préfet de Police des Bouches-du-Rhône précise ces données : "Jusqu'en 2020, nous étions dans une dynamique défavorable. Puis la dimension de l'affectation s'est modifiée, jusqu'à aujourd'hui", précise Pierre-Édouard Colliex. Dans les faits, depuis 2021, 436 gardiens de la paix sortis d’école ont été affectés à Marseille (100 en 2021, 200 en 2022, 136 en 2023). Compte tenu des départs à la même période, ces affectations aboutissent à un solde positif de 209 effectifs supplémentaires à Marseille depuis janvier 2021. 

75 renforts supplémentaires, sortis d’école, seront affectés à Marseille d’ici la fin de l’année 2024.

Pierre-Édouard Colliex, préfet de police des Bouches-du-Rhône

Plus d'affectation, même si cela ne va pas assez vite. "Comme à Paris, beaucoup de jeunes policiers démarrent à Marseille et demandent ensuite une mutation afin de se rapprocher de leur région", explique Pierre-Edouard Colliex. Un phénomène de turn-over important, qui amplifie le sentiment que ça ne va pas assez vite. "Côté CRS, des efforts ont aussi été fournis", précise le Préfet de Police.

380 CRS de plus déployés à Marseille

En plus des 2 unités de Compagnie Républicaine de sécurité dédiées dès mars 2021, une 3ᵉ a été pérennisée à compter de septembre 2022 "permettant, grâce également à une doctrine d’emploi plus souple, de couvrir jusqu’à six cités par jour, et d’assurer une présence quasi quotidienne dans le centre-ville de Marseille".

La CRS 81 (+200) est par ailleurs opérationnelle depuis novembre 2023 et très régulièrement déployée à Marseille et dans le département. Au total, selon la Préfecture de Police, ce sont donc 380 CRS de plus qui sont désormais déployés à Marseille.

Des chiffres repris par la Cour des comptes, qui n'a pas manqué de souligner un "détail" qui a déclenché la polémique :

Ces renforts n'ont pas comblé les départs

Rapport de la Cour des Comptes, 21 octobre 2024

Plus d'effectifs affectés à Marseille, oui, mais pas suffisamment pour combler des départs de plus en plus nombreux. Cette réalité, déjà connue, a été mise en lumière par publication du rapport, dans un contexte sécuritaire de plus en plus tendu.

Les magistrats de la Cour des comptes révèlent en effet une problématique réelle, mais difficile à régler, d'après les syndicats de police.

Le vrai problème : des conditions dégradées, et une crise des vocations

Rudy Manna, porte-parole national du syndicat Alliance

Rudy Manna, porte-parole national du syndicat Alliance, décrit une situation qui ne date pas d'hier. 

"En 2016, il y avait eu 365 policiers mutés à Marseille, un énorme renfort. À partir de là, en raison de cet important appel d'air, les candidats étaient moins nombreux, d'où les baisses d'effectif. Les ministres ne voulaient pas d'affectation en sortie d'école à Marseille. C'est cela qu'a modifié Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, au moment du lancement de Marseille en grand", explique le syndicaliste.

À partir de là, la balance s'est rééquilibrée, mais pas suffisamment.

Nous avons salué le renfort de 300 effectifs de plus à Marseille mais nous savions qu'il était pratiquement impossible de retrouver les effectifs manquants...

Bruno Bartocetti, secrétaire national délégué zone sud du syndicat Unité (ex SGP Police-FO)

Mettre des postes ciblés vers Marseille en sortie d'école garantit que ces postes seront pourvus. Indispensable, car la cité phocéenne attire de moins en moins de candidats à la mutation.

Travail difficile, pas de prime, difficultés de logement et de transport

"Lorsque Gérald Darmanin a décidé d'ouvrir les sorties d'école de police vers Marseille, on était descendus à 3850 policiers à Marseille. On est remontés progressivement grâce à ça. Mais depuis 2020, on a beaucoup plus de départs à la retraite ou de départs volontaires. Beaucoup de jeunes collègues décident de changer de métier, les affectations en sortie d'école ne suffisent pas", analyse Rudy Manna. 

Les effectifs ont considérablement augmenté à Marseille, mais les lourdes pertes depuis 2016 n'ont pas été compensées.

"Il y a une semaine, il y a eu 40 postes sortis d'école à Marseille. Retailleau ne peut pas faire mieux ! D'autant que les jeunes ne veulent plus descendre à Marseille. Le seul levier : créer une prime de fidélisation comme en région parisienne, débloquée après neuf ans au même poste", conclut le porte-parole.

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