Le coup de gueule des procureurs pour une justice indépendante

Le procureur, premier magistrat du parquet de Marseille (le 2e de France par le nombre de pôles de compétences) veut graver dans la Constitution l'indépendance du parquet.

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Le procureur de la République de Marseille Brice Robin a déclaré vendredi "partager les inquiétudes" du procureur général de la Cour de cassation à propos de l'état d'urgence, évoquant des "risques considérables pour l'Etat de droit" lors de l'audience solennelle de rentrée judiciaire.
Il a dit également espérer que le parlement profiterait de la réforme constitutionnelle pour graver dans la Constitution l'indépendance du parquet. Comprendre la garantie d'une nomination indépendante de l'exécutif des magistrats du ministère public. Il se dit être partisan d'une réforme, où "les magistrats du parquet seront nommés comme les magistrats du siège, et l'autorité de nomination, le ministre, ne pourra pas passer outre l'avis du Conseil de la magistrature".

Le président de la République a annoncé il y a 48 heures l'inscription de ce sujet à l'ordre du jour de la réforme constitutionnelle.

L'appel contre le manque de moyens

Le procureur est également revenu sur le manque de moyens des parquets français. Rappelant que la France dispose, par habitant, d'un budget pour la justice deux fois inférieur et de quatre fois moins de parquetiers que la moyenne des pays européens, et que 6,58% des postes de magistrats restent vacants au niveau national, il a donné l'exemple du parquet de Marseille où il manque 4 parquetiers sur 41, soit 10%. "Le 19 juin 2015, il y a eu 65 présentations tous services confondus, dans la journée", a-t-il expliqué, racontant que les débats contradictoires s'étaient ainsi tenus jusqu'à 8h le lendemain. Le magistrat du parquet, le Juge des libertés et de la détention et le greffier "ont ainsi dû travailler 24 heures d'affilée".

Il estime donc qu'il est "urgent de faire une pause dans la multiplicité des missions des parquets et de se recentrer sur notre coeur de métier", soit "la mise en mouvement de l'action publique et la direction de la police judiciaire".

Le même discours à Grenoble

"La justice n'a pas les moyens de faire la guerre au terrorisme" déclare le procureur de Grenoble. "Alors que "le risque d'attentat n'a jamais été aussi élevé", ajoute Jean-Yves Coquillat. "Les agressions individuelles à l'arme blanche ou à l'aide de véhicules (...) sont quasiment impossibles à prévenir", a dit le procureur, faisant référence à la récente agression antisémite à Marseille. "Il est à craindre que de tels actes se multiplient et se posera alors inéluctablement la question de la capacité du parquet antiterroriste (de Paris, ndlr) de traiter l'ensemble des affaires"

"Pour faire la guerre, il faut des moyens (...) Pour l'instant, ces moyens depuis longtemps promis, nous ne les avons pas. La seule chose que nous ayons obtenu c'est un téléphone portable pour la permanence" du parquet, a-t-il ironisé.


"Est-il normal qu'à ce jour mon parquet ne bénéficie pas d'un véhicule automobile (...) que le procureur n'ait pas un téléphone portable qui fonctionne, pas un PC portable? Qu'il ne puisse pas consulter ses mails en dehors de son bureau? Est-ce digne d'une justice du XXIe siècle?", a demandé le magistrat. "Chaque réforme est l'occasion de tâches nouvelles, très souvent pour le parquet avec des moyens en moins", a-t-il dit.

Le parquet de Grenoble a reçu 60.000 procédures en 2015, un chiffre en hausse de 23%, a-t-il rappelé.
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