Au cœur du Verdon, le petit hameau de Fontaine l'Evêque a disparu sous les eaux en 1974. Connu pour sa source qui attirait des milliers de touristes chaque année, le village a été rasé et les habitants expropriés. A la place, EDF y a construit le barrage de Sainte-Croix.
93 mètres de haut, 780 millions de mètres cube d'eau, le barrage de Sainte-Croix est la deuxième plus grande retenue d'eau de France. 60 000 personnes sont alimentées grâce à lui chaque année.
Les turbines du barrage ont fonctionné pour la première fois en 1974, mais l'idée d'un projet hydro-électrique à Sainte-Croix est beaucoup plus ancienne. Dès 1905, Georges Clemenceau, alors président du Conseil, évoque la construction d’un tel ouvrage. A cette époque, le Verdon n'était qu'un petit cours d'eau au débit variable.
Ludovic Barthélémy, responsable exploitation des barrages du bas-Verdon :
Il y avait deux enjeux essentiels pour la construction de ce barrage : électrifier la région et sécuriser l’alimentation en eau potable et en eau agricole de la Provence, un véritable défi à l'époque.
3 villages rayés de la carte
Mais sur le chemin de ce barrage se trouvent les villages de Sainte-Croix, Salles-sur-Verdon et le hameau de Fontaine l’Evêque. Pour réaliser son projet, EDF exproprie les habitants et rase les maisons.La famille Bondil habitait à Fontaine l’Evêque depuis 1926. Elle y tenait une boutique de souvenirs et un restaurant, profitant des 70 000 touristes par an. Aujourd’hui, Francis Bondil, ancien habitant du hameau, garde un goût amer de ce déménagement forcé :
Je me dis qu’ils nous ont tout enlevé, notre maison, notre travail. Ils ont tout démoli et on s’est retrouvé sans rien.
7 siècles d'histoire engloutis
Tout a été englouti par ce barrage, le passé de la famille Bondil, mais aussi 700 ans d'histoire. Des monastères du 13ème siècle, un hôpital et un château du 17ème siècle, avec des statuts d'une richesse exceptionnelle.Depuis plusieurs années, l’archéologue Philippe Borgard recueille des témoignages afin de faire ressurgir les traces du passé :
Des vestiges oubliés, 408 familles expropriées. Mais au-delà de sa production électrique, le barrage de Sainte-Croix est aujourd'hui un enjeu touristique majeur pour la région. Le lac et les gorges du Verdon attirent chaque année 1.5 millions de visiteurs.Des dizaines de bâtiments d’époques anciennes qui avaient un intérêt patrimonial évident ont été détruits sans qu’il y ait une photo, un plan, une observation, rien … C'est tout un patrimoine qui a disparu sous le lac.