Bollène : liée à la guerre d'Algérie, un changement de plaque de rue crée la polémique

La rue qui porte le nom de "Rue du 19 mars 1962, fin de la guerre d'Algérie" à Bollène dans le Vaucluse va être rebaptisée en rue "Hélie de Saint Marc". Un changement de nom décidé par le maire de la commune qui heurte habitants et membres de l'opposition.

Les habitants de la "Rue du 19 mars 1962, fin de la guerre d'Algérie" à Bollène dans le Vaucluse vont devoir multiplier les démarches auprès de leurs expéditeurs de courriers à partir du 11 mai prochain.

A cette date, leur rue va être rebaptisée rue "Hélie de Saint Marc", en hommage à celui qui fut résistant, déporté mais aussi officier putschiste pendant la guerre d'Algérie et son régime de torture.

Ce changement de nom a été décidé par Madame le maire, Marie-Claude Bompard, apparentée au parti politique Ligue du Sud (extrême-droite) et voté en conseil municipal. Seul le Front de gauche s'y est opposé. Socialistes et divers gauche se sont abstenus. 

Provocation ou révisionnisme?

Cette décision n'est pas du goût de certains habitants et de membres de l'opposition. Plus qu'une provocation, certains y voient du révisionnisme. C'est le cas de Serge Fiori, élu PC et ancien professeur d'histoire. "Par cet acte, le maire cherche à effacer des repères historiques", selon lui.

"Cette dame est coutumière du fait, d'autre noms de rue ont été changés toujours en référence à l'histoire". Pour lui, "depuis 12 ans, de nombreuses cérémonies républicaines sont aussi altérées par des connotations religieuses". 

Une manœuvre pré-municipale?

Pour les socialistes et divers gauche, il n'est pas question d'être "arbitres de l'Histoire" ou "historiens". "Nous comprenons que deux visions de la guerre d'Algérie s'opposent. Les cicatrices sont encore douloureuses", explique Anthony Zilio, élu divers gauche.

"Il ne nous appartient pas de trancher dans un sens ou dans l'autre. Nous nous abstenons d'ailleurs à chaque fois que le maire revisite ou tente de revisiter l'Histoire".

Pour lui, les intentions de Marie-Claude Bompard sont claires. "Ce qui est détestable, c'est d'instrumentaliser l'Histoire et surtout cette période de l'histoire de France encore très douloureuse, quand on est maire sortant et que l'on sent une menace aux prochaines municipales notamment avec la progression du Rassemblement National".

Avant d’ajouter, "c'est une habile manœuvre politique pour satisfaire un électorat bien précis".

"Il n'y a pas de provocation, les faits sont là."

Des accusations totalement réfutées par Marie-Claude Bompard. Le maire de Bollène dément toute provocation ou révisionisme. 

"Dans cette ville, il y a beaucoup de gens qui ont vécu la guerre d'Algérie et qui continuent de la vivre au quotidien par la douleur qui est toujours très vive", explique l'édile. "Le gouvernement a fait des propositions récemment navrantes et qui continuent de faire insulte aux pieds-noirs et aux Harkis; c'est pourquoi il me semble normal en tant qu'élue de faire un geste envers eux".

"Hélie de Saint Marc avait un amour incommensurable de son pays, il s'est toujours battu pour le défendre même avant l'Algérie. Il n'y a pas de provocation, les faits sont là. La date du 19 Mars 1962 n'est en aucun cas la fin de la guerre en Algérie"

Une date et des précédents en France

A Beaucaire, en 2015, le maire avait déjà rebaptisé en novembre 2015 une rue "du 19 mars 1962" en "rue du 5 juillet 1962", en mémoire du massacre de centaines de civils européens et musulmans à Oran, un des massacres importants intervenus après le 19 mars.

A Béziers, Robert Ménard a lui aussi fait voter en conseil municipal le changement de nom de la rue "du 19 mars 1962" en ""Hélie de Saint Marc". C'était en mars 2015 et cela avait déjà soulevé des désaccords.

Point commun entre ces élus, leur appartenance au Rassemblement National (ex FN). De quoi alimenter aussi la polémique. 
Qui était Hélie de Saint Marc?
Hélie de Saint Marc est un ancien résistant et un ancien officier de l'armée française, ayant servi à la Légion étrangère, en particulier au sein des parachutistes.

Commandant par intérim du 1er régiment étranger de parachutistes, il a pris part au putsch des Généraux en avril 1961. Un fait pour lequel il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle, avant d'être réhabilité en 1978.  

Le 19 mars 1962, date des accords d'Evian, marque le cessez-le-feu en Algérie. Mais cette fin officielle du conflit algérien a été suivie par une vague d'exactions contre les Français d’Algérie et les musulmans fidèles à la France.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité