Dix supporters stéphanois, aveuglés par leur fanatisme, comparaissent devant la justice pour avoir vandalisé un mariage dans le Beaujolais. Le 5 septembre, ces membres des "Magic Fans" s'étaient attaqués à ce qu'il croyaient être un supporter lyonnais dans le cadre d'une opération punitive.
Ils voulaient "détruire le plus beau jour de la vie" d'un supporter lyonnais honni, mais leur expédition punitive s'est trompée de cible: 10 ultras de l'AS Saint-Etienne comparaissaient mercredi devant la justice pour le saccage d'un mariage dans le Beaujolais.
"On n'avait rien demandé à personne", souffle la mariée à la barre. Ce 5 septembre à Denicé (Rhône), à la vue de son buffet de mariage mis en pièces,
la jeune femme et sa famille s'étaient posées la question : mais qui pouvait leur en vouloir autant ? Et qui était cette quinzaine d'hommes masqués en combinaison blanche et armés de barres de fer ayant fait irruption avant que la noce ne revienne de l'église ?
Ce jour-là, la jeune femme était loin d'imaginer qu'elle avait été victime d'un incroyable malentendu sur fond de rivalités entre supporters des Verts et ceux de l'Olympique lyonnais. Préparée de manière "paramilitaire", l'opération-"commando" avait viré au fiasco et s'est soldée par le renvoi devant le tribunal de Villefranche-sur-Saône (Rhône) de dix hommes âgés de 26 a 48 ans, membres ou gravitant autour des Magic Fans, l'un des cinq groupes de supporters de l'AS Saint-Etienne.
Présentés comme des employés modèle ou des pères de famille exemplaires, ils n'avaient pas hésité à participer à cette expédition punitive pour "détruire le plus beau jour de (la) vie" d'un ultra lyonnais. Deux d'entre eux avaient été placés en détention provisoire depuis une première audience en novembre 2015, occasion d'un premier renvoi pour cette comparution immédiate marathon. En dépit de conséquents dégâts matériels et d'un modus operandi très violent, ce coup de force n'avait pas fait de blessés.
"Traître"
Neuf des dix prévenus ont, à des degrés divers, reconnu leur présence sur les lieux, à défaut de leur participation pleine et entière aux violences et exprimé leur "honte" et leurs "regrets". Selon l'enquête, l'expédition trouve sa source dans la haine d'un "traître", un ex-membre des Magic Fans qui -fait rarissime- a intégré un groupe ultra lyonnais.Pour les prévenus, celui qui est à leurs yeux un renégat, est l'instigateur d'une série de violences et de provocations dont le vol "sacrilège" d'un tifo, qui a
trouvé son épilogue dans le saccage du mariage. Au centre des débats, le "transfuge" Maxime G. est le grand absent de ce procès. Pour les deux parties, ce jeune homme est loin d'être un enfant de choeur. Membre d'un groupuscule d'ultra-droite, réputé avoir le coup de poing facile, il a été condamné pour avoir frappé une journaliste et un commandant de la BAC à Lyon pendant une manifestation contre le mariage pour tous. Il a fait appel.
Selon les prévenus et des sources proches du dossier, il aurait même pu avoir sciemment orienté les ultras des Verts sur le mauvais mariage, ce qu'il a nié lors de sa déposition. Dans le récit des Stéphanois, tour à tour piteux ou patauds, le ressentiment envers le néo-Lyonnais semble inextinguible.
"S'il avait été présent (le jour de la noce saccagée), on serait aujourd'hui à un procès d'assises", relève la présidente du tribunal, Claire Jacquin, qui visiblement découvre les us et coutumes du hooliganisme. "C'est quoi le rapport avec le sport ?" interroge la magistrate. "Y en n'a aucun", marmonne un prévenu.
Selon la police, le groupe ultra des Magic Fans comporterait environ 1.600 membres dont un "noyau dur" de 30 à 40 personnes. L'un des prévenus surnommé "Cochon" a été condamné en octobre à 20 mois de prison avec sursis en Italie pour des violences lors d'un match d'Europa League des Verts
face à la Lazio Rome.
Contre cet ex-militaire présenté comme le "cerveau" de l'opération, le procureur Grégoire Dulin a requis trois ans de prison dont six mois avec sursis.
Des peines allant de 18 mois de prison dont six avec sursis à un an avec sursis ont été retenues contre huit co-prévenus, ainsi qu'une relaxe. Le jugement devrait être rendu dans la nuit.